9 décembre 2018

Un point sur l'activité des volcans Karangetang (Api Siau), Manam et Popocatepetl

Karangetang (Api Siau), Indonésie, 1784 m

L'activité éruptive débuté vers la fin du mois de novembre se poursuit actuellement. Elle ne semble pas particulièrement gagner en intensité mais pour autant la situation à un peu évolué.
Dans le post précédent dédié à cette éruption, fin novembre, il était apparu que l'activité éruptive ne se produisait pas dans le cratère sud, comme c'était le cas depuis de nombreuses années, mais dans le cratère nord, considéré à tors comme inactif. Cette activité se manifestait par l'accumulation, dans ce cratère, d'une lave à priori modérément visqueuse, sous la forme d'une galette et la possibilité avait été évoquée que celle-ci grandisse jusqu'à déborder. C'est le cas depuis déjà un peu plus d'un dizaine de jours. L'image en fausses couleurs du 30 novembre composée à partir des données du satellite SENTINEL 2 est très parlante.



La galette de lave du cratère nord déborde. Image: SENTINEL2-ESA/Copernicus

Visiblement ce sont les ravines situées sur le quart nord-ouest qui sont affectées par les avalanches de blocs, produites par le débordement de la galette. Pour le moment il n'y a pas eu d'autre image donc difficile de savoir comment la situation évolue. Mais si le débit n'(est pas trop fort (ce qui semble être le cas) et la viscosité de la lave pas trop élevée non plus, il n'est pas impossible que le débordement donne naissance à une coulée de lave dans la pente du quart nord-ouest. De cette potentielle coulée continuerait de se décrocher des blocs (avalanches) mais il faut surtout espérer que la coulée ou la galette ne fassent que s'éffriter gentiment en avalanches: si de gros volumes partent,c e sont des écoulements pyroclastiques qui prennent le relai et la situation n'est pas la même.

Cette mise en place progressive des avalanches se voit bien sur l'évolution de la sismicité ("Guguran" en Indonésien).

Évolution de la sismicité depuis septem:bre 2018. Image: MAGMA Indonesia

Situation à suivre de près donc.

Sources: SENTINEL2-ESA/Copernicus; MAGMA Indonesia

Popocatepetl, Mexique, 5426 m

Ces dernières semaines l'activité éruptive (qui est permanente depuis des années sur cet édifice) s'est légèrement accentuée. Des explosions plus ou moins fortes, génératrices de panaches de cendres assez chargés mais rapidement dispersés et sans conséquences, se sont produite. Toutefois c'est la formation assez rapide d'une galette de lave, nommée "dôme n°81" par le CENAPRED, qui m'a incité à rédiger le post.



Ce type de situation est assez classique au Popocatepetl depuis plusieurs années. Et généralement lorsque le dôme se forme, il bloque l'échappement des gaz ce qui se traduit par une hausse de pression....et ce la se termine par une explosion assez forte. Elle s'est produite le 07 décembre en pleine nuit, propulsant des blocs et des bombes sur les pentes externes du stratovolcan (raison pour laquelle l'ascension est strictement interdite). D'autres explosions modérées à fortes ont eu lieu par la suite.


Généralement cette activité explosive détruit le dôme et la situation revient à la normale: c'estl e cas ce coup-ci aussi, comme le montre l'image satellite produite par les données récoltées le 08 décembre.


Au cours de toute cette séquence, l'alerte volcanique a été maintenue à 2 (jaune) car il s'agit d'une situation normale. Les signaux ne sont pas sortis des clous depuis (si je ne me trompe pas) juillet 2013.

Sources: CENAPRED; SENTINEL2-ESA/Copernicus

Manam, Papouasie Nouvelle-Guinée, 1807 m

Une nouvelle phase intense d'activité explosive s'est déroulée au cours de la journée du 08 décembre. Comme celui du mois d'août, ce paroxysme a démarré plutôt brusquement, vers 03h15 TU  pour se terminer quelques heures plus tard: ver 08h00 TU le paroxysme est passé, même si l'activité a duré quelques heures de plus ensuite. Au passage c'est un panache de cendres qui a atteint une attitude estimée à plus de 12 000 m* qui a été produit.

Le panache de cendres produit lors du paroxysme du 08 décembre. Image: Maryanne Merton Photography

Ce qui est frappant avec l'image ci-dessus, c'est la grande quantité d'eau présente, qui forme des volutes blanches. Il serait intéressant de voir pourquoi/comment cette eau se retrouve en aussi grande quantité, donnant des allures de phréatomagmatisme au panache. Cette eau s'infiltre-t-elle dans l'édifice depuis la mer autour, ou vient-elle directement du magma?


Cette activité explosive semble (à confirmer) suivie d'une activité effusive abondante: c'est ce que suggèrent les données récoltées par le capteur VIIRS du  Suomi NPP, qui a enregistré un très fort signal thermique, étalé entre le sommet et la côte nord-est, soit l'endroit déjà impacté par des coulées de lave lors du paroxysme du mois d'août et lors du pic d'éruption d'octobre.

Forte émission de chaleur sur le quart nord-est de l'île, qui permet de soupçonner la présence de coulées de lave (à confirmer). Image: MODIS/NASA et Suomi NPP

Bien que des chutes de cendres ont probablement eu lieu sur l'île, elles ont surtout affecté la côte est, puisque c'est de ce côté que le panache a été emporté par le vent, comme le montre cette animation produite à partir des données du satellite Himawari 8.

La tâche colorée qui se devient visible à partir de 03h30 TU est le panache de l'éruption. Images: Himawari 8.

La situation a été très peu rapportée par les journaux de Papouasie, et aucun ne décrit les éventuelles conséquences subies par les populations sur l'île.


 * ce qui n'est fait pas un panache stratosphérique puisque la tropopause à l'équateur est plutôt vers 18 000 m (environ 8000 m aux pôles).


Sources: Himawari 8; MODIS/NASA; Suomin NPP; Maryanne Merton Photography (merci à Shérine France!)



1 commentaire:

  1. Bonjour. Je vous remercie pour cette mise à jour régulière. J'ai eu la chance de me rendre au Karangetang en 2011 et au Manam en 2012 en pleine éruption un souvenir à vie ! Pour l'anecdote les habitants du Karangetang ont largement plus peur d 'un tsunami que du volcan : la routine pour eux.

    L 'année 2018 est plutôt calme sur les volcans connus en dehors du Guatemala ? Si vous avez le temps une synthèse sur les lacs de lave serait sympa à lire ( hawai, erta ale, Masaya, RDC Vanuatu)

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