21 février 2020

Un point sur l'activité des volcans Etna, Stromboli, Fuego, Taal, Klyuchevskoy et Ibu

Etna, Italie, 3330 m

L'activité éruptive qui a débuté en septembre 2019 ne cesse pas et reste plutôt vigoureuse. Elle se déroule toujours, pour l'essentielle, dans la Voragine.
Il s'agit toujours d'une activité mixte :

- explosive dite "stromboliennes", avec des projections qui s'accumulent et forment une superbe cône de scories qui doit avoisiner les 100 m de diamètre à la base.
- effusive avec une coulée de lave qui continue de descendre dans la Bocca Nuova, juste en contrebas du cône de scories.





En plus de cette activité, le 17 février a été marqué par des émissions de cendres depuis le "saddle vent" (l'évent "la selle"), situé entre les Nouveau et Ancien Cônes Sud-Est (ont en voit une sur la vidéo ci-dessus) et des bouffées de cendres produites depuis le Cône Nord-Est.


Bouffée de cendres depuis le Cône Nord-Est. . Image: Nicola Zappala

Ces émissions de cendres sont restées extrêmement modestes et n'ont pas duré. Par conte, il semble que le Cône Nord-Est soit lui-aussi le siège d'une activité éruptive, vraisemblablement aussi strombolienne.
Cela est suggéré par de fortes émissions infrarouges détectées par la webcam de Nicola Zappala à Bronte, assez fortes pour être détectées aussi dans la bande 8 du satellite SENTINEL 2, avec une intensité similaire aux infrarouges produits par l'activité strombolienne de la Voragine (raison pour laquelle une activité éruptive peut-être fortement soupçonnée au fond du Nord-Est).

Les principales zones d'activité vues depuis Bronte. Image: Nicola Zappala
Les principales zones d'activité vues depuis l'espace. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus
C'est une belle activité strombolienne, soutenue, mais qui n’implique pas de risques particulier en l'état actuel pour les habitants proches de l'Etna.

Sources: INGV; SENTINEL 2 - ESA/Copernicus; Nicola Zappala

Stromboli, Italie, 924 m

L'activité au Stromboli connait depuis plusieurs semaines des variations importantes avec, depuis des début décembre 2019, des séquences où elle est vraiment élevée.


Le niveau d'activité explosive varie entre "moyen" et "élevé" depuis plusieurs semaines. Depuis mi-janvier il est plus souvent "élevé". Image: LGS
Courant janvier, les volcanologues ont pu constater la formation de rares et courtes coulées de lave issues du percement, par la colonne de magma, des couches de scories accumulées par l'activité explosive. Ces séquences d'effusion sont restées vraiment modestes, à l'inverse de l'activité explosive qui, elle, reste superbe.
Le spectacle est au rendez-vous...mais ne peut (et heureusement) être observé que de loin pour des raisons évidentes de sécurité. L'accès au sommet demeure interdit.
On peut noter, d'un jour à l'autre, des variations dans la fréquence ou l'intensité des explosions mais globalement elles restent fréquentes et assez intenses pour couper le souffle. Il semble que l'évent le plus actif demeure le cône Nord, mais comme les webcams de l'INGV installées au sommet ont été détruites en juillet 2019, pas moyen d'avoir un suivi sur de l'activité sur les autres évents.


Activité explosive intense sur le cône Nord. Image : LGS

Activité explosive intense sur le cône Nord : Image : INGV

Superbe activité strombolienne, vue depuis le rebord de la Sciara del Fuoco. Image: LGS

L'activité éruptive reste donc globalement élevée, alors que les paroxysmes ont eu lieu il y a déjà plus de 7 mois : il est légitime de soupçonner que cette longue phase d'activité intense soit le résultat de l'arrivée d'un magma plus riche en gaz. 
Mais vous connaissez mon crédo : soupçonner, c'est bien, démontrer c'est mieux! Alors attendons que les spécialistes aient pu analyser dans le détail cette situation pour savoir quelles seront leurs conclusions.

Sources : INGV; LGS

Ibu, Indonésie, 1325 m

Et il est temps de faire un point sur l'activité au volcan Ibu, mais ce post sera assez rapide.
Pour celles et ceux qui, parmi vous, ne connaitraient pas ce volcan et l'activité qui s'y déroule, et que l'on pourrait qualifier d'"Ibu-Profanes" (un jeu de mot pour lutter contre le mal de tête), je vous renvoie à un post publié sur le blog en 2013, qui constitue une base assez complète pour y voir clair.

Le dernier post en date remonte à septembre 2019 : y était décrite la formation d'une coulée de lave visqueuse qui partait de la zone d'éruption, située quasiment en plein centre du cratère, en direction du nord. L'éruption en cours depuis 1998 reste donc actuellement mixte : explosive (plutôt dans une dynamique vulcanienne) et effusive puisque des coulées de lave sont produites.

Celle qui a été repérée en septembre 2019 avait déjà atteint l'exutoire du cratère et son front entamait alors sa descente sur la pente externe du volcan. Depuis, elle a continué de progresser dans cette pente. Sa vitesse moyenne demeure extrêmement faible, puisqu'elle n'a parcouru qu'un peu plus de 650 m depuis septembre ce qui indique à la fois une très haute viscosité et un très faible débit.

Progression de la coulée de lave entre septembre 2019 et février 2020. Le polygone blanc marque le bord du cratère sommital. Images : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

La comparaison d'images ci-dessus est toutefois trompeuse car elle suggère que la coulée a parcouru les 650 m à une vitesse régulière, ce qui n'est pas le cas. C'est la raison pour laquelle j'ai précisé plus haut "vitesse moyenne" car en fait elle avait déjà parcouru environ 400 m dès la mi-octobre, puis n'a quasiment pas progressé jusqu'en décembre, puis a repris sa progression pour parcourir les 200 et quelques derniers mètres entre décembre et février. L'activité effusive ne semble donc pas continue.

Comme je le précisais plus haut cette activité est mixte : des explosions ont parfois lieu. Elles restent modestes et peu fréquentes : cette activité éruptive ne pose donc, pour le moment, aucun problème grave...ce qui est le cas depuis qu'elle a démarré il y a 22 ans déjà.

Source: SENTINEL 2 ESA/Copernicus

Taal, Philippines, 311 m

L'éruption violemment explosive (probablement à cause de la présence d'eau en grande quantité) de janvier n'a pas repris. Il y a bien eu une phase d'émissions de cendres en faibles quantités dans les jours qui ont suivi mais globalement le calme est revenu pour le moment. Difficile de savoir si une nouvelle phase éruptive pourrait avoir lieu mais pour l'instant le PHIVOLCS ne semble décrire qu'une sismicité plutôt faible et dominée par de la fracturation.
Ce calme permet la remise en place progressive du lac qui avait en grande partie disparu pendant l'éruption.

Retour du lac dans le cratère de Volcano Island. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus
Bien que la situation soit plutôt calme pour le moment, elle mérite évidemment d'être suivie.

Sources: PHIVOLCS; SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

Fuego, Guatemala, 3763 m

Ça fait vraiment longtemps que je n'ai rien publié concernant l'activité au Fuego, mais c'est tout simplement parce que, globalement, l'activité reste la même. Il s'agit là encore d'une activité strombolienne...et des fois on se demande même si ça n'est pas plutôt entre le strombolien et le vulcanien. Les explosions sont superbes, et arrosent de blocs toute la zone sommitale.
Ce n'est pas une activité éruptive directement dangereuse puisque les fragmentent retombent à proximité, roulent dans la pente mais sans atteindre les zones occupées par l'homme. Les cendres peuvent, parfois, être la cause d'une certaine gêne mais elles ne sont pas produites en grandes quantités en ce moment.


L'INSIVUMEH indique par ailleurs la présence d'une coulée de lave dans la partie haute de la ravine Cenizas (versant sud-ouest). C'est probablement cette coulée que l'on voit sur l'image satellite en date du 19 février, mais elle semblait alors vraiment courte et ressemblait plutôt à un amas de blocs chauds laissés là par une explosion récente (on voit d'autres blocs à haute température dispersés aux alentours sur cette image).

Peu après une explosion, beaucoup de blocs encore chauds rayonnent des infrarouges assez intenses pour encore être détectés par la bande 12 du satellite. Une zone plus chande encore, sur le haut versant sud, ressemble à une coulée. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus
Toujours une belle activité à regarder de toutes manières! Tant qu'elle ne pose pas de problèmes évidemment.


Sources : INSIVUMEH; SENTINEL 2 - ESA/Copernicus; Crelosa, et merci Mr Map!

Klyuchevskoy, Russie, 4835 m

L'activité éruptive qui a débuté le 06 février se poursuit. Elle reste confinée au sommet de l'édifice, et semble être plutôt strombolienne là-encore (le type de dynamisme probablement le plus fréquent sur Terre). Elle semble plutôt soutenue, et des projections tombent maintenant assez fréquemment en-dehors du cratère : il s'agit peut-être là de la conséquence de l'accumulation des projections depuis maintenant une quinzaine de jours sans discontinuer (à priori car il y a eu plusieurs jours de temps couvert sans aucune visibilité sur la situation).



L'activité est assez intense pour que l'incandescence soit visible avant la nuit. Image : IVS-FEB-RAS-KVERT

Il n'est pas rare de voir des projections retomber hors du cratère. Image : IVS-FEB-RAS-KVERT

Pour l'heure cette activité est uniquement explosive : pas de coulée de lave décrite. Mais bon: il vaut mieux garder un oeil ouvert, on sait jamais.

Source :  IVS-FEB-RAS-KVERT

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