Il y a quelques jours je me faisais le relais de l'impact peut-être mésestimé des émanations volcaniques sur l'évolution actuelle des températures de l'atmosphère. Des études menées par une équipe internationale de biologistes (Australie, Royaume-Unis, Nouvelle-Zélande) semblent maintenant indiquer que le volcanisme aurait aussi des vertus salvatrices pour la biodiversité, lorsque cette même atmosphère devient trop froide, pendant les périodes glaciaires.
La question a l'origine de ces travaux est simple: comment, pendant les périodes glaciaires, une vie diversifiée peut résister pendant des périodes qui peuvent, à certains endroit, se compter en millions d'années? Si les biologistes avaient déjà mis en évidence qu'en de nombreux endroits la reconquête post-glaciaire s'est fait depuis l'extérieur, en suivant le retrait progressif des glaciers, il y aussi des études qui indiquent que des espèces sont restées in situ, dans ou sous la calotte
glaciaire. Restait à expliquer ce second point et l'hypothèse d'un coup de pouce de Vulcain avait commencé à émerger suite à de nombreuses observations de part le monde dans des sites spécifiques (Patagonie, Islande).
glaciaire. Restait à expliquer ce second point et l'hypothèse d'un coup de pouce de Vulcain avait commencé à émerger suite à de nombreuses observations de part le monde dans des sites spécifiques (Patagonie, Islande).
Où donc tester cette hypothèse?
Localisation des sites géothermiques et non géothermiques qui ont été corrélés avec l'analyse de la biodiversité qui s'y trouve. Image: C.I Fraser et al, 2014 |
Actuellement, le seul endroit sur Terre qui présente des conditions similaires à un âge glaciaire est l'Antarctique, qui compte aussi de nombreux volcans actifs (dont peut-être un nouveau caché, souvenez-vous). Clairement l'endroit idéal pour tester la capacité du volcanisme a servir de zone refuge, en créant des cavités sous-terraine où l'eau peut rester liquide et où il peut faire quelques degrés au dessus de zéro.
Des décennies d'études menées sur le continent glacé ont permis de constituer une immense base de données du vivant* actuellement présent en Antarctique ce qui ouvre la possibilité de trouver des corrélation géographique entre zones géothermales, zones non-géothermale et biodiversité.
Les conditions étaient donc réunies pour mener cette étude à bien. En comparant les espèces de mousses, champignons/lichens et invertébrés présentes dans les zones géothermales (volcaniques) avec celles présentes dans les zones "froides" du continent, les chercheurs ont pu mettre en évidence une décroissance progressive de leur biodiversité avec l'éloignement aux sites volcaniques. Des facteurs externes, comme la présence ou non de roche à l'affleurement ou le rayonnement solaire lié à la latitude, avaient déjà été testés mais aucun ne fournit une corrélation aussi nette que la proximité à un site géothermal. Il semble avoir été necessaire pour les chercheurs de séparer la péninsule Antarctique du reste du continent glacé car les corrélations y sont un peu différentes.
En effet les invertébrés en particulier semblent être très dépendant des zones volcaniques pour leur survie sur la partie continentale tandis que, sur la péninsule, cette proximité aux volcans semble moins essentielle, ce qui ouvre un piste de recherche nouvelle.
Pour les mousses et les champignons/lichens ce lien reste par contre extrêmement fort sur les deux sites.
Pour faire simple: plus les mousses et lichens vivent loin des volcans, moins leur biodiversité est grande (bizarrement je me sens tout à coup très proche d'une mousse**...). C'est aussi le cas pour les invertébrés, mais sur les sites situés loin des côtes.
La raison de cette baisse de diversité fonction de l'éloignement semble assez logique: sur la multitude d'espèces de mousses, champignons/lichens qui libèrent leurs spores à partir des zones refuge, la plupart ne sont pas aptes à survivre en conditions extrêmes. Plus on s'éloigne des zones géothermales et moins d'espèces peuvent survivre.
Source: Ceridwen.I Fraser et al, 2014: "Geothermal activity helps life survive glacial cycles"
*: 39 000 espèces de 1823 taxons différents entre le 60° parallèle et le pôle sud d'après l'étude
** soit dit en passant, les géologues sont généralement assez proches des mousses, mais plutôt celles qu'on décapsule.
*** période géologique qui va de 1.8 millions d'années à 10 000 ans.
Article intéressant une nouvelle fois. Ces résultats semblent logiques car ils sont tout à fait comparables à ce qu'on trouve à proximité des fumeurs noirs sur les champs hydrothermaux sous marins. Ce sont des oasis de biodiversité, et cette biodiversité décroit à mesure qu'on s'éloigne.
RépondreSupprimerOui c'est tout à fait logique: là où l'énergie est en quantité suffisante (ni trop ni pas assez) la vie peut se réfugier. En milieu glaciaire le phénomène était connu localement, restait à savoir si cela pouvait durer sur de longues périodes, notamment les glaciations, voilà qui est fait pour certaines plantes et champignons. Cela démontre qu'en période glaciaire, des zones de vie persistent et peuvent servir de foyer de reconquête post-glacaire.
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