20 juin 2013

Batu Tara et Paluweh: des nouvelles fraîches

Un groupe de spéléologues anglais m'a spontanément contacté cette semaine, au retour d'une petite sortie en Indonésie sur les volcans Paluweh et Batu Tara, afin de me transmettre quelques informations concernant l'activité en cours. Je les en remercie bien sûr chaleureusement!
Voilà donc le résultat de quelques unes de leurs observations.


Lors de leur passage vers l'île les 04 et 05 juin, où les conditions d'accostage se sont révélées mauvaises en raison de la météo, le groupe a pu observer une activité strombolienne d'une intensité modérée avec, en moyenne, une explosion toutes les 10 à 15 minutes. Les bombes projetées par cette activité roulent, pour bon nombre d'entre elles, jusqu'en mer où elles pénètrent avec force, de manière tout à fait similaire à ce que l'on observe fréquemment à Stromboli (les points communs sont nombreux entre les deux édifices).


Activité strombolienne au volcan Batu Tara
Activité strombolienne classique au sommet du Batu Tara. Le panache est assez chargé en cendres.Image: Niki Adlam-Stiles.



Le VAAC de Darwin a émis ce matin un bulletin indiquant la présence d'un panache de cendres, vraisemblablement lié à un petit effondrement du dôme. Lors de leur séjour sur Paluweh, entre les 08 et 10 juin, le groupe à pu observer une activité extrusive (émission lente de lave visqueuse avec peu ou pas d'explosions) très faible. Celle-ci se manifeste de manière sporadique par quelques éboulements sur le versant sud du dôme qui montrent que le dôme reste instable de ce côté. Aucune activité du côté nord du dôme n'a été décrite. Cette activité est accompagnée d'une sismicité qui, début juin, était encore intense, avec de nombreuses secousses ressenties dans la partie haute de l'édifice. A noter que des insulaires ont indiqué au groupe que deux personnes avaient été emportées par un lahar récemment.

La morphologie du dôme a beaucoup évolué en quelques mois. Mais les images sont toujours plus parlantes que les mots et je vous propose une petite comparaison de celles prises prises au début de l'éruption et celles prises début juin. J'ai ajouté une ligne en tiretés pour visualiser une zone commune aux deux images qui donne l'échelle.

Dôme actif du volcan Paluweh (Rokatenda) en novembre 2012
Le dôme actif en novembre 2012 (image recadrée). Image : R.Roscoe

Dôme actif du volcan Paluweh (Rokatenda) en juin 2013
Le dôme actif en début juin 2013 (image recadrée). Image : Niki Adlam-Stiles

On note clairement que le dôme s'est étalé. Son volume semble aussi plus important, probablement du simple au double.

L'autre point intéressant est la présence, au sommet du dôme, d'un cratère. En regardant les archives des actualités de ces derniers mois je n'ai pas trouvé la trace d'un événement unique et intense (forte explosion) qui aurait été à même d'ouvrir ce cratère. Par contre il y a eu à plusieurs reprises des émissions de cendres relativement importantes relevées par le VAAC de Darwin et qui pourraient correspondre à des épisodes de "Ash Venting" (jet de gaz puissant). Ce type d'activité a pu ouvrir, progressivement, ce cratère sommital. Cette ouverture s'est faite, quoi qu'il en soit, après le mois de février: James Raynolds avait, en février, filmé le dôme actif et il n'y avait aucune trace du cratère à ce moment-là.

Cratère au sommet du dôme Rorembola, volcan Paluweh (Rokatenda)
Le dôme Rorembola et son sommet éventré. Image : Niki Adlam-Stiles
Niki Adlam-Stiles précise que, à l'intérieur de ce cratère, on peut voir un nouveau petit dôme mais il n'est pas possible de dire si ce dernier est encore en croissance ou pas.

Enfin, il semble qu'une fracture se soit propagée depuis la zone du dôme jusqu'au point d'observation, vers le nord. Des fumerolles sont en effet apparues dans la zone du point d'observation, qui n'existaient pas en février dernier d'après leur guide et organisateur, Aris Yanto (www.exploredesa.com).
Le niveau d'alerte aviation reste à l'orange.

Vous pouvez retrouver les images et un compte-rendu (en anglais) de l'expédition du groupe sur le site web www.winstercavers.org.uk, que je remercie ici chaleureusement.
Pour le Batu Tara .
Pour le Paluweh .

J'ajoute que la situation sanitaire et humanitaire des personnes déplacées (à Sikka et Ende) est extrêmement préoccupante. L'état d’urgence, qui devait prendre fin le 23 mai, avait déjà été prolongé fin mai jusqu'au 23 juin. Un rapport du Yakkum Emergency Unit  (YEU) en date du 03 juin indique que depuis mi-mai de nombreuses personnes ont été obligées de retourner sur l'île, n'ayant pas assez d'argent pour subvenir à leurs besoins fondamentaux. Mais sur l'île, il n'y a pour l'instant peu ou pas d'eau potable (pollution par les gaz et chutes de cendres) et les terres agricoles ont été fortement impactées. Le YEU décrit par ailleurs des enfants en état de malnutrition, d'autres avec des  infections touchant la peau ou les poumons. Il n'existe pas de toilettes et très peu d'eau propre pour l'utilisation quotidienne ce qui pose d'importants problèmes sanitaires.

Sources : www.winstercavers.org.uk, VAAC de Darwin; YEU.

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