11 février 2022

Volcan Etna : premier paroxysme de l'année 2022

Et quel paroxysme! Encore une phase absolument ahurissante, très intense et très esthétique. Il faut par contre tout de suite noter que cette séquence (que je vais appeler 2022-01, histoire de faire clair, simple et pas joli du tout)  s'inscrit PEUT-ETRE dans la séquence de paroxysmes qui a débuté il y a presque 1 an (16/02/2021) mais comme il y a une interruption assez marquée on ne peut pas être sûr que ça soit juste la suite. Seul l'INGV sera en mesure de nous dire de quoi il retourne (suite de la séquence, début d'une nouvelle séquence, ou autre).

Dans le déroulement elle n'a pas été fondamentalement différente des paroxysmes que l'on observe habituellement à l'Etna mais cette phase commence, ou du moins s'annonce, en fait dès la fin janvier . Le 30 janvier on pouvait déjà noter l'apparition de quelques bouffées de cendres sur le Cône Sud-Est et une modification notable du tracé du trémor, suggérant une modification de l'activité interne (changements dans la dynamique de circulation des fluides). Cela avait duré quelques heures puis..pshiiiiiit. Plus rien d'anormal.

Jusqu'au 05 janvier où le tracé du trémor a de nouveau commencé à montrer des signes de changement indiquant que la situation n'était pas si "retour à la normale" que ça et qu'il valait mieux garder un oeil ouvert.

La situation n'a pas particulièrement évolué jusqu'au soir du 09 janvier, où une faible incandescence était à nouveau visible sur le Cône Sud-Est. Le changement suivant, indiquant que la situation devenait un peu plus sérieuse, a eu lieu le 10 janvier avec la formation dans l’après-midi, à partir de 14h15 TU (15h15 heure locale) d'une petite coulée de lave débordant su sommet du Cône Sud-Est  en direction du sud.

Coulée de lave en formation sur le versant sud du Cône Sud-Est dans l'après-midi du 10 février. Image : INGV

Parallèlement à la formation de cette coulée, l'activité strombolienne s'intensifie mais il est intéressant qu'une coulée de lave apparaisse aussi tôt dans le processus: Cela pourrait signifier qu le magma en cours d'ascension pousse un reste de roche en fusion déjà présente dans la partie supérieure de l 'Etna et l'oblige à sortir.

On peut noter le passage au cran supérieur vers 17h45 TU avec la mise en place d'une activité strombolienne non seulement soutenue mais continue. Puis c'est la montée en puissance avec des projections de plus en plus hautes et le passage progressif en régime de fontaine de lave*. Le paroxysme à proprement parler, à savoir le moment le plus intense de cette phase, débute vers (à peu près) 20h30 TU et il dure jusqu'à 21h40 TU à peu près.  C'est lors de cette phase que se forme l’imposant panache de gaz et cendres dont le VAAC de Toulouse estime l’altitude maximale atteinte vers 10 km, panache dans lequel quelques éclairs sont produits (c'est très courant).

Fontaine de lave et panache de gaz et cendres associé. Image : Giuseppe Tonzuso

Le moment le plus marquant et spectaculaire de cette séquence ne fut toutefois pas la fontaine et son panache, mais la mis en place, vers 21h25 TU d'un écoulement pyroclastique assez important, qui a impacté essentiellement haut versant sud-sud-est.



Écoulement pyroclastique vue de face. Image : INGV


Écoulement pyroclastique vue de profil. Image : INGV


Sur l'image ci-dessus à gauche on note que l'écoulement en question contourne les cônes de l'éruption latérale de 2002, que l'on voit au premier plan. L'image de droite permet, quand à elle, d'estimer la distance parcourue par cet écoulement : environ 1500 m. Et honnêtement je suis rassuré de voir que l'éruption a eu lieu en pleine nuit et dans une période peu touristique. Car dans d'autres circonstances, cet écoulement pyroclastique, d'une surprenant intensité, aurait pu avoir des conséquences bien plus graves.

Ce n'est qu'avec les images d'aujourd'hui qu'on peut comprendre l'origine de cet écoulement, et de son intensité : le versant sud du Cône Sud-Est est totalement éventré. Cet écoulement est le fruit d'une déstabilisation de ce versant, structurellement (le Cône Sud-Est est sur la jonction de deux grandes zones de fractures majeurs de l'Etna et est littéralement suspendu au-dessus de la Valle del Bove : il y a mieux pour la stabilité) et probablement sous l'injection forcée de roche en fusion à très haute pression.

Comparaison d'images avant et après le paroxysme du 10 février  le Cône Sud-Est n'est pas indemne. Images : INGV

Sources : INGV; Giuseppe Tonzuso via Etna Live

*= la colonne de gaz et fragments de roche en fusion est émise en continue ( ou quais continue car il y a toujours des "pulses") et non plus de manière intermittente.

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