30 octobre 2021

Un point sur l'activité aux volcans Great Sitkin, Tinakula, Erta Ale et Fukutoku Okanoba

 Great Sitkin, États-Unis, 1740 m

L'activité éruptive qui a débuté fin juillet se poursuit et reste pour ainsi dire uniquement effusive avec la mise en place d'une galette de lave dans le cratère sommital.

La croissance de cette masse de lave est assez lente indiquant un débit éruptif faible. Ce n'est en effet qu'à partir de la mi-septembre que le bord de la galette est parvenu à franchir le rebord du cratère en deux endroits : la portion sud-ouest et la portion sud. En conséquence deux langues de lave (des coulées, courtes, visqueuses et très faiblement alimentées) ont commencé à se former.

Croissance et débordement de la galette de lave sommitale. Images : SENTINEL 1 - ESA/Copernicus

Il semble qu'une troisième langue parvienne à se frayer un passage au nord-ouest du point d'éruption avec l'amorce d'une troisième petite coulée. Sur l'image SENTINEL 2 en couleurs naturelles ci-dessous (mixée avec les données thermiques pour mettre en évidence le point d'éruption où le rayonnement thermique est le plus fort) les deux langues principales sont parfaitement visibles car elles contrastent bien avec la couverture neigeuse.

L'activité éruptive vue le 25 octobre depuis l’espace. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

La progression de ces coulées est suffisamment lente pour qu'elles restent, pour l'heure, cohérentes : on ne note en effet, sur l'image ci-dessus, que très peus de blocs détachés de ces coulées dans la pente, et c'est surtout sur la coulée sud-ouest (dont on peut dès lors supposer qu'elle est la plus active).

Il est par ailleurs toujours intéressant de noter que la neige tient à la surface de la galette, alors même qu'elle continue de croitre : sa surface est donc à l'équilibre avec la température extérieure. il est aussi intéressant de noter que cette neige ne tient pas au front des coulées (frange sombre) ce qui indique de facto une plus grande température, probablement en lien avec leur lente extension (peut-êtres que des fractures laissent échapper la chaleur de la partie interne de la coulée...).

Cette éruption reste donc discrète pour le moment mais toujours très surveillée du fait des couloirs aériens qui passent dans le secteur et le niveau d'alerte aviation est donc maintenu à l'orange : on est jamais à l'abri d'un changement de régime éruptif vers quelque chose de plus explosif (donc une production plus importante de cendres, dangereuses pour les avions).

Sources : AVO; SENTINEL 1&2 - ESA/Copernicus


Tinakula, Iles Salomon, 851 m


Le "Stromboli du Pacifique" mérite ce surnom à au moins 2 titres : la morphologie de son sommet, qui forme une île* dont l'aspect est proche de celui du célèbre volcan Méditerranéen, et à son activité, très fréquente. La crise éruptive en cours a débuté de manière très intense en 2017 et se poursuit depuis de manières plus tranquille, peut-être sous la forme de séquences plus ou moins longues d'activité strombolienne au sommet (hypothèse la plus compatible avec le faible signal sismique sommital régulièrement détecté et l'absence de cendres produites) .

Relevé des signaux thermiques détectés par les satellites MODIS et traité par l'algorithme MIROVA, sur l'année écoulée. Image : MIROVA

 

La dernière image satellite qui a été acquise en l'absence de nuages (situation très très rare sur cette île) permet de constater qu'une nouvelle séquence d'effusion (mise ne place de coulée de lave) a débuté et, comme pour les séquences similaires qui l'ont précédée (avril, octobre et novembre 2019, pour celles qui ont pu être détectées), la coulée se met en place dans la cicatrice d'avalanche qui marque le quart nord-ouest de l'île. Une composition mêlant des couleurs visibles et de l'infrarouge thermique permet de se faire une idée de la situation.

Présence d'une courte coulée de lave le 28 octobre 2021. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

Cette activité reste faible et ne pose, pour l'instant, pas de soucis. Sa surveillance (ou plus exactement son suivi) reste toutefois complexe du fait des fréquents nuages dont je parlais plus haut et de l'isolement de cette île.

* la majeure partie de l'édifice est sous-marin, seul le sommet sort de l'eau, comme pour Stromboli et bien d'autres.


Sources : MIROVA ; SENTINEL 2 - ESA/Copernicus


Fukutoku Okanoba, Japon, quelques dizaines de mètres d'altitudes, mais ça diminue


L'activité éruptive du mois d'août n'a pas repris mais un puissant dégazage sous-marin se poursuit à côté de la petite île formée lors de cette phase, qui n'est qu'une portion de l'anneau de dépôt qui entoure l'évent de dégazage (qui fut l'évent éruptif en août). Cet îlot, composé de cendres et ponces pour l'essentiel a, par essence (puisque ce n'est qu'un tas de fragments accumulés), une structure fragile et subit de ce fait une puissante érosion par l'incessant impact des vagues.

Les gaz volcaniques se dissolvent dans l'eau de la Mer des Philippines et donnent cette belle tâche vert-bleuâtre en forme de .... Goniatite (un peu de géoparéidolie, ça ne peux pas faire de mal). Quelques ponces flottent à l'est, probablement arrachées quelques temps auparavant par les vagues. Image: LANDSAT 8 - NASA/USGS

Toutefois ce n'est pas à cause de ce dégazage qu'un post m'a semblé nécessaire, mais à cause de l'important radeau de ponces produit par l'éruption en août. Il a, depuis, connu beaucoup de péripéties tout au long de sa dérive, en particulier au moment où le typhon Mindulle lui est passé dessus, le dispersant sur une surface de plus de 4700 km² ( minimum) au tout début du mois d'octobre.

Le radeau de ponces dispersé après le passage du Typhon Mindulle. Image : MODIS/NASA

Quelques jours plus tard, une partie du radeau de ponces touchait les premières côtes Japonaises en Mer des Philippines, sur les îles Kitadaito et Minamidaito puis le reste du radeau a piursuivit sa course vers l'ouest, touchant plus récemment les îles des archipels Japonais des Ryukyu et de Satsunan, entre Taiwan au sud-ouest et Kyushu au nord-est.

Les ponces en approche de l'île Kikai, archipel de Satsunan, le 13 octobre. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

 

Les ponces à l'assaut des îles Iheyajima, Nohojima, Izenajima & Yanahajima (du nord au sud), archipel  des Ryukyu. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

Les ponces à proximité des côtes de l'île d'Okinawa, portion de l'archiepl des Ryukyu le 26 octobre. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus


Plusieurs ports des îles touchées sont remplis de ces ponces, qui font certes la joie des enfants sur les plages (ils s'amusent à soulever d'énormes fragments....et à leur place je ferai pareil d'ailleurs) mais qui sont un énorme problème pour les pêcheurs dont les bateaux ne peuvent plus naviguer (au moins 750 navire immmobilisés, certains endommagés), les ponces bloquant les moteurs et certains ports (19 ports recensés jeudi 28 octobre, probablemetn plus maintenant, qui en sont littéralement remplis) tuant aussi les élevage de maquereaux. Les autorités d'Okinawa ont commencé à mettre en route les pelleteuses pour les enlever car ces ponces bloquent aussi les ferries qui font les liaisons inter-îles : bref : l'économie insulaire est mise à mal.

 

Le port d'Hentona, sur l'île d'Okinawa, engorgé de ponces le 28 octobre. Image : The Yomiuri Shinbun

Les pelleteuses s'activent le 30 octobre pour ramasser les ponces : 2 à 3 semaines de travail en perspective. Image :The Yomiuri Shinbun


 

Un autre potentiel problème commence à inquiéter aussi, car une partie des ponces pourrait se propager plus au nord courant novembre et frôler les îles principales du Japon...où des centrales nucléaires proches des côtes pompes l'eau de mer pour refroidir leurs réacteurs. Pour le moment ce risque n'est pas avéré et peut-être qu'au final, ces ponces ne poserons pas de souci si elles passent assez loin des côtes, mais la situation sera probablement suivie de près.


Sources : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus ; The Yomiuri Shinbun

 

Erta Ale, Ethiopie, 613 m


L'activité éruptive, qui était plutôt aléatoire jusqu'en septembre semble plus perenne depuis avec une activité qui est probablement permanente ou presque permanente dans le Pit Crater Sud. Cette activité s'accompagne parfois d'épisode d'effusion de courte durée dans le Pit Crater Nord aussi : le système volcanique semble donc bien actif en ce moment.

Les signaux thermiques en provenance d'Erta Ale sont plus fréquents depuis la mi-septembre. Image : MIROVA


De l'activité dans les deux Pit Crater le 30 octobre. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

 

Source : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

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