Le système volcanique du Krakatau à nouveau plus instable (mis à jour)

L'activité du Krakatau semble avoir évolué depuis hier. Les informations qui sont transmises actuellement suggèrent fortement qu'une activité éruptive, probablement phréatomagmatique, est en cours.

Depuis la spectaculaire phase éruptive qui s'est déroulée entre juin 2018 et janvier 2019, culminant avec l'effondrement du cône construit par les éruptions successives depuis 1960, le site n'était pas resté totalement calme. Des gerbes de boue avaient parfois lieu, indiquant que les infiltrations d'eau étaient suffisantes pour aller se réchauffer au contact (ou très près de) du dyke, encore à très haute température, mis en place lors de la dernière éruption. Bref: des explosions phréatiques, et non pas une activité éruptive.

Or la webcam installée sur l'ile depuis plusieurs mois, et qui fait parfois des prises de vue très spectaculaires, montrait, au cour de la nuit du 29 au 30 décembre, l'éjection de fragments à très haute température.

Projection de fragments à très haute température dans la nuit du 29 au 30 décembre. Image: PVMBG

Par ailleurs, tout au long de la journée du 30 décembre, l'autre webcam, celle qui est installée sur la côte javanaise, à environ 45 km de distance, a pu permettre l'observation de l'émission de panaches assez clairs, donc riche en eau. L'un d'entre eux a dépassé les 2000 m de hauteur (d'altitude puisqu'il est parti de 0m d'altitude ou presque), signe d'une certaine vigueur. Ces derniers ce sont succédé régulièrement, ce qui ne s'était plus produit depuis la fin de l'éruption précédente: autre signe d'une activité soutenue, donc d'un système volcanique redevenu instable. Avec la compression des images, due à la réalisation du gif, un détail disparait (il devait faire 1 ou 2 pixels pas plus): on peut voir sur les images originales de nuit, à la base du panache, un point lumineux très faible et dont l'intensité varie : il est possible qu'il s'agisse des explosions et des fragments à haute température éjectés. Mais c''est un détail si fugace que le doute reste permis et que je préfère ne pas le mettre ici. C'est toutefois l'image webcam et ce détail qui me font penser que le terme "éruption" semble pouvoir être utilisé pour cette phase.

Les panaches émis au cours de la journée du 30 décembre. Images : PVMBG

Les images produites par Himawari 8 et SENTINEL 3 ont aussi permis de constater la présence de faibles quantités de cendres, mélangées à l'eau dans une bonne partie de ces panaches.

Le panache d'eau, de gaz magmatiques (probablement) et cendres, vu le 30 décembre. Images: Himawari 8

Il est possible qu'une activité se poursuive aujourd'hui, mais ce n'est pas clair du tout, en particulier en raison d'une masse de nuage qui gêne considérablement la vue.

Nous verrons bien comment se termine 2019!

Mise à jour, 11h35

SENTINEL 2 est passé aujourd'hui au-dessus du détroit de la sonde. Les nuages dont je parlais au-dessus gênent la vue mais permettent quand même de constater qu'il y a un signal thermique présent au niveau de l'évent actif, dans le lac : ce n'était plus arrivé depuis la fin de l'éruption précédente, début 2019.

Source de chaleur assez importante au niveau de l'évent actif. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

Le lac qui s'est formé pendant et après la dernière éruption semble toujours présent : toujours pas asséché, ni expulsé par les explosions, ni comblé par des dépôts. Il est d'autant plus étonnant de voir ce signal thermique au milieu du lac, ce qui suggère qu'une partie de l'évent pourrait être près de la surface, voir avoir déjà émergé. Malheureusement les nuages, et la résolution (encore un poil trop faible) de l'image, ne permettent pas d'en savoir plus.

Su cette image en couleurs naturelles, mais dont les gain/gamma/niveaux ont été retravaillés pour augmenter les contrastes, le lac est bien visible, avec un peu d'évaporation sur les rives. Image : SENTINEL 2 - ESA/Copernicus

Sources : Himawari 8; PVMBG; merci à Alex Bogár pour le partage de l'image webcam; SENTINEL 2 - ESA/Copernicus