16 octobre 2019

Éruption sur le volcan Metis Shoal, ou Lateiki (Archipel des Tonga)

Décidément, je n'arrive pas à terminer le post que je prépare depuis plusieurs jours déjà, pour des raisons aussi diverses que variées. Mais cette fois, c'est à cause d'une petite île, minuscule, rongée par les vagues. Une île située dans l'archipel très dispersé des Tonga. Une île dont la dernière éruption inscrite au Global Volcanism Program est marquée pour 1995, alors qu'en réalité il y a eu une éruption en 2006 (démarrage le 07 août 2006 avec production d'un radeau de ponces assez important, cf fin du post). Correction: le radeau de ponce provenait du voisin immédiat, le volcan Home Reef, et avait été soupçonnée au départ d'être de Metis Shoal.
Mais c'est ce qui se passe actuellement qui nous intéresse.
Il y a un dégazage permanent sur l'île, qui forme, habituellement, une tâche colorée que l'on peut voir tous les jours, sans discontinuer, même si elle semble plus ou moins étendue d'un jour sur l'autre.
Il se trouve par contre qu'il y a peu, Shérine France a fait passer sur les réseaux sociaux, une image du satellite SENTINEL3 qui montre, outre la tâche colorée, un petit panache blanc, composé donc pour l'essentiel d'eau.
Cette image était datée du  13 octobre, et comme il s’agissait d'une activité peu habituelle, elle méritait effectivement d'être suivie.

Panache riche en eau produit le 13 octobre 2019. Image: SENTINEL 3/ESA-Copernicus

Et c'est évidemment une image SENTINEL 2, dont la résolution est bien plus élevée que celle de SENTINEL 3, qui a permis de constater qu'une activité éruptive a débuté sur ce volcan partiellement émergé, dont seul le sommet, composé du dôme de lave formé lors de l'éruption de 1995(ou peut-être 2006, du coup) et en cours d'érosion par les vagues, dépasse encore de l'eau.
Certes, en couleurs naturelles, seul l'imposant panache riche en eau est visible, mais dès qu'on intègre des infrarouges, le doute n'est plus permis: une source de chaleur intense rayonne au point de départ du panache. 

Forte source de chaleur au point de départ du panache. Image: SENTINEL 3 - ESA/Copernicus

Du magma est donc en cours d'éruption, et le style de cette éruption est, vraisemblablement surtseyenne, ce qui explique qu'il n'y a que très peu de cendres dans l'atmosphère car, dans ce style d'éruption, la quantité d'eau est tellement importante que les cendres produites sont immédiatement mélangées à l'eau, formant des masses de boue qui retombent dans l'eau. Le niveau d'alerte aviation a malgré tout été passé à l'orange par le  Tonga Meteorological Service.
Bien entendu ce n'est pas à l'aide des images satellites que l'on peut savoir de quel type de magma il s'agit: seul un échantillonnage de la lave apporterait une réponse à cette question. Mais si l'on regarde les éruptions historiques, on constate qu'elles forment souvent des dômes, suggérant un magma visqueux. Et pour l'éruption de décembre 1967, une analyse pétrologique avait pu être effectuée, donnant une composition de Dacite...une lave de haute viscosité là encore.

Éruption et formation d'un dôme de lave en décembre 1967: une situation similaire à celle qui est en cours?. Image: J.Reichelmann, dans Smithonian to the Earth Science, 1970

Il ne serait donc pas étonnant si, à nouveau, un magma visqueux soit en cours d'éruption, et qu'un dôme soit produit, mais nous verrons bien ce qui se passera, car pour le moment les détails font défaut.

Toutefois, en regardant de près une image en couleurs naturelles, on peut toutefois remarquer:
- que la surface où l'eau est surchauffée et produit le panache est très étendue, probablement  plus de 200m de diamètre et...
-...qu'une sorte d' "appendice", qui se localise un peu au nord de la petite île présente avant l'éruption (= le dôme de 1995 ou 2006), semble présent.

Zone étendue d'évaporation de l'eau (et on note la coloration de l'eau autour, due à la dissolution des gaz issus du magma), et l' "appendice". Image: SENTINEL2-ESA/Copernicus


La nature de cet "appendice" est difficile à déterminer mais il pourrait s'agir d'un dépôt produit par l'activité, peut-être un dépôt de cendres, car le contact magma-eau est fragmente efficacement le magma. Cela fait penser, évoque (et il faut se méfier des impressions: on ne sait jamais, elles peuvent n'être que des impressions) à ce qui avait été observé lors de l'éruption de 1967-1968, lorsque l'île formée par l'éruption avait une forme de croissant.

L'île formée lors de l'éruption de 1967-1968. Image: J-T-M-Holmes
 
À moins qu'il ne s'agisse d'une illusion, une ombre portée ou que sais-je... Les prochaines images pourraient apporter des précisions mais, là encore, c'est trop tôt pour se faire une idée précise.

Pour le moment, très peu d’informations donc, mais le peu que l'on voit est semblable à ce qui avait été observé par le passé. Sauf en 2006 donc, où l'éruption semblait avoir démarré de manière plus "péchue" avec la formation d'un important radeau de ponces.


Situation à suivre!

Sources: Shérine France; MODIS/NASA; Smithsonian Instituion; SENTINEL 2 & 3 ESA/Copernicus

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