Et voilà le dénouement tant attendu d'un épisode qui a connu quelques rebondissements! Après la fin de l’éruption du mois d'août 2019, la déformation de type 'inflation (gonflement) avait repris, signifiant, d'après les volcanologues de l'OVPF, une remise en pression du réservoir superficiel. Cette déformation avait cessé début septembre, tout comme les émissions de CO2 et le tout était accompagné d'une sismicité faible.
Pour le dire autrement : retour au calme!
Oui mais..
...la stabilité à pris fin le 11 octobre, date à partir de laquelle l’inflation et la sismicité ont repris, traduisant une remise en pression du réservoir superficiel, décrite par l'OVPF comme résultant d'une réalimentation en magma de ce réservoir depuis une source plus profonde. Hausse significative de la sismicité à partir du 11 octobre. Image: OVPF/IPGP |
Cette activité souterraine, dite "géophysique" puisque détectée par les moyens de la science éponyme (sismicité, déformation etc) a connu un pic important au soir du 21 octobre à partir de 20h00 (heure locale) avec une hausse importante de la sismicité et de la déformation, indiquant qu'une partie du magma avait entamé, sous la forme d'un dyke, sa propagation vers la surface de la Terre. Les volcanologues de l'OVPF ont tout de suite mis en ligne un bulletin indiquant qu'une éruption de ce dyke à brève échéance était tout à fait envisageable (ce qui ne signifie pas que ce soit obligatoire).
Mais, coup de théâtre, le dyke a brusquement cessé sa propagation une demie-heure plus tard, éloignant la possibilité d'une éruption à court terme.
Il est évidemment toujours intéressant de se questionner sur les raisons pour lesquelles un dyke échoue à faire éruption, mais il peut, par exemple, avoir pénétré dans une zone où les contraintes lui sont défavorables localement (des contraintes qui maintiennent les roches fermées).
Quoi qu'il en soit, ce fort ralentissement des paramètres géophysiques (sismicité/déformation) a permis aux autorités d'abaisser le niveau d'alerte de "1" à "vigilance".
Mais le 25 octobre à partir de 04h15 heure locale, la sismicité a repris, tout comme la déformation, indiquant que le magma a entamé une nouvelle tentative d’ascension en direction de la surface. Il n'est pas précisé dans le bulletin si c'est le même dyke qui reprend son ascension, ou si il s'agit d'un autre dyke, démarrant directement depuis le réservoir superficiel. Mais peu importe: tout cela a incité les autorités à réévaluer à la hausse le niveau d'alerte, le passant de "sauvegarde" à "1".
C'est à 14h40 heure locale que le trémor a commencé à faire son apparition sur les enregistrements, marquant le départ de cette nouvelle éruption, et le passage en alerte 2-2 qui va avec. Elle a débuté dans la Grandes Pentes à nouveau, à très basse altitude puisque la fracture est ouverte vers 950 m d'altitude. D'après les observateurs sur place, le front de coulée avance assez rapidement, ce qui a incité les autorités à évacuer la route des lave (la nationale qui passe sur la côte), car elles estiment possible que la route soit coupée dès le 26 octobre! Nous verrons si c'est le cas, tout dépendra de la manière dont la lave progresse à travers la zone végétalisée, mais c'est envisageable car le front de coulée progresse en partie sur les coulées de 2007 (pas de végétation dense).
Malheureusement le secteur où l'éruption a débuté n'est pas couvert par les webcams de l'OVPF, mais une photo du PGHM montre une magnifique coulée qui frôle la base du Piton Tremblet (éruption de 2007) et passe entre ce dernier et les coulées du mois d'août.
Comme l'activité est dans un angle mort, pas moyen de la voir en directe et il faut attendre des images prises par les observateurs. Et Dans ce cas de figure on peut toujours compter sur Imaz Presse, qui fournit, comme souvent, parmi les premières images: vou trouverez toutes les photos d''Imaz Presse sur ce lien.
Sur la seconde photo ci-dessus il semble que la fracture suit à peu près les courbes de niveau: cela ressemble* à une fracturation dite "circonférentielle", alors que la plupart des éruptions au Piton se font plutôt sur des fractures radiales (qui descendent dans la pente et recoupent les courbes de niveau). Si c'est le cas, c'est une chose interessante puisqu'elle peut donner des indications sur le champ de contraintes qui s'exerce sur les roches traversées par le dyke.
Il est clair aussi que l'activité est intense et elle semble assez proche de celle du mois d'août, un peu comme une redite. Mais puisque le point d'éruption a été décrit comme étant vers 950 m d'altitude, il est significativement plus bas que lors de l’éruption d'août. Et si, en plus, on part du principe que le front de coulée ne peut pas être décalé de plusieurs kilomètres vers le nord ou le sud par rapport à la fissure éruptive, on peut supposer une localisation approximative de la fracture éruptive au niveau de l'ovale rouge sur l’image ci-dessous. Mais attention: il s'agit d'une estimation personnelle basée sur des recoupements: rien d'officiel l'à-dedans, et j'ai pu me planter complètement. Attendons les bulletins de l'OVPF pour plus de détails.
Quoi qu'il en soit, ce fort ralentissement des paramètres géophysiques (sismicité/déformation) a permis aux autorités d'abaisser le niveau d'alerte de "1" à "vigilance".
Mais le 25 octobre à partir de 04h15 heure locale, la sismicité a repris, tout comme la déformation, indiquant que le magma a entamé une nouvelle tentative d’ascension en direction de la surface. Il n'est pas précisé dans le bulletin si c'est le même dyke qui reprend son ascension, ou si il s'agit d'un autre dyke, démarrant directement depuis le réservoir superficiel. Mais peu importe: tout cela a incité les autorités à réévaluer à la hausse le niveau d'alerte, le passant de "sauvegarde" à "1".
C'est à 14h40 heure locale que le trémor a commencé à faire son apparition sur les enregistrements, marquant le départ de cette nouvelle éruption, et le passage en alerte 2-2 qui va avec. Elle a débuté dans la Grandes Pentes à nouveau, à très basse altitude puisque la fracture est ouverte vers 950 m d'altitude. D'après les observateurs sur place, le front de coulée avance assez rapidement, ce qui a incité les autorités à évacuer la route des lave (la nationale qui passe sur la côte), car elles estiment possible que la route soit coupée dès le 26 octobre! Nous verrons si c'est le cas, tout dépendra de la manière dont la lave progresse à travers la zone végétalisée, mais c'est envisageable car le front de coulée progresse en partie sur les coulées de 2007 (pas de végétation dense).
Malheureusement le secteur où l'éruption a débuté n'est pas couvert par les webcams de l'OVPF, mais une photo du PGHM montre une magnifique coulée qui frôle la base du Piton Tremblet (éruption de 2007) et passe entre ce dernier et les coulées du mois d'août.
La coulée de lave vers 17h00 (heure locale), entre les coulées d'août 2019 (en bas) et le ¨Piton Tremblet (2007) en haut. Image: PGHM, via OVPF |
Comme l'activité est dans un angle mort, pas moyen de la voir en directe et il faut attendre des images prises par les observateurs. Et Dans ce cas de figure on peut toujours compter sur Imaz Presse, qui fournit, comme souvent, parmi les premières images: vou trouverez toutes les photos d''Imaz Presse sur ce lien.
Le front de coulée, à moitié sur les laves de 2007, à moitié dans la végétation. Image: ImazPress |
La fracture éruptive avec sa série de petites fontaines de lave, et la coulée en premier plan. Image: Imaz Press |
Sur la seconde photo ci-dessus il semble que la fracture suit à peu près les courbes de niveau: cela ressemble* à une fracturation dite "circonférentielle", alors que la plupart des éruptions au Piton se font plutôt sur des fractures radiales (qui descendent dans la pente et recoupent les courbes de niveau). Si c'est le cas, c'est une chose interessante puisqu'elle peut donner des indications sur le champ de contraintes qui s'exerce sur les roches traversées par le dyke.
Il est clair aussi que l'activité est intense et elle semble assez proche de celle du mois d'août, un peu comme une redite. Mais puisque le point d'éruption a été décrit comme étant vers 950 m d'altitude, il est significativement plus bas que lors de l’éruption d'août. Et si, en plus, on part du principe que le front de coulée ne peut pas être décalé de plusieurs kilomètres vers le nord ou le sud par rapport à la fissure éruptive, on peut supposer une localisation approximative de la fracture éruptive au niveau de l'ovale rouge sur l’image ci-dessous. Mais attention: il s'agit d'une estimation personnelle basée sur des recoupements: rien d'officiel l'à-dedans, et j'ai pu me planter complètement. Attendons les bulletins de l'OVPF pour plus de détails.
L'ovale rouge marque la possible zone du point d'éruption, mais la localisation précise doit encore être précisée. Image: Google Earth |
La situation mérite d'être suivie de très près car, cette fois, la route pourrait bien entre coupée, ce qui n'est pas arrivé depuis 2007.
Mise à jour, 26 octobre, 09h15
L'éruption se poursuit se matin, malgré une baisse du débit décrite dans les journaux (pas encore de bulletin OVPF au moment de la rédaction de cette MàJ) et un ralentissement du front des coulées. Le front le plus avancé n'était qu'à 400m de la route nationale ce matin, mais la zone qu’elle doit traverser avant de la couper est assez plate: sa progression est d'autant ralentie.
Une belle vidéo d'Ilotdrone a été publiée: images magnifique de la fracture éruptive et des multiples coulées de lave qui s'organisent en 2 bras principaux et un bras moins alimentée depuis l’extrémité sud de la fracture éruptive. Des images tout à fait réjouissantes!
Mise à jour, 27 octobre, 18h46
Après une évolution assez classique (quoi qu'assez rapide finalement) de diminution de débit au niveau de la fissure éruptive, l'éruption a cessé ver 16h30 (heure locale). Au cours des deux jours environ d'éruption l'activité éruptive, qui avait démarré en plusieurs points de la fracture, s'était focalisée sur un évent en particulier, construisant un joli cône. Avec la baisse du débit, la coulée principale s'est arrêtée peu avant la route, à environ 250 m, sans la couper donc.
Le cône en cours de construction. Image: Mon Ami/Imaz PResse |
L'observatoire précise, à juste titre si l'on se souvient de la précédente éruption par exemple, qu'il n'est pas possible de savoir comment la situation va évoluer à cours terme: reprise d'une activité ou pas. En attendant, les habitants de l'île vont pouvoir commencer à plancher pour des propositions de noms pour le nouveau ^cone.
Sources: OVPF/IPGP; Imaz Press; PGHM; réunion 1ère; Ilotdrones
* ce qui signifie que cela mériterais d'être confirmé: une image de nuit n'est pas suffisante.
Salut CV !
RépondreSupprimerLa fissure se situe un peu au sud de ton cercle rouge, à 500 du rempart environ sur les coulées de 2004 (parfaitement entre les Pitons Tremblet et le Cratère du Passage pour être exact). La photo vu d'en dessous semble en effet montrer que la fissure est circonférentielle mais c'est infirmer par la vidéo d'Ilotdrone dont tu parles (magnifique d'ailleurs). Fissure plutôt ONO-ESE selon un informateur sur le terrain...
La proximité avec la dernière éruption est vraiment intéressante... Est-ce que ce nouveau dyke s'est mis en place dans la même fracture ? En tout cas, ces deux sorties latérales sont à rapprochées des deux éruptions récentes dans le secteur du Formica Léo à mon sens : des éruptions dans des secteurs un peu plus inhabituels, après des éruptions proximales sur une alternance flanc sud / Flanc nord (entre 2015 et 2018) qui faisaient suite à des éruptions sommitales (2008-2010) ! Quoiqu'il en soit, une éruption si basse est assez rare dans l'Enclos !
Les coulées ce matin son actives au niveau des Pitons Tremblet... D'ailleurs le flanc nord de ces cônes superbes disparaissent petit à petit et c'est assez malheureux tant le secteur était vraiment magnifique !
La baisse du débit est assez logique, mais l'activité est toujours assez importante.
Bonne journée,
Salut Ludovic! Ah ben zut: j'avais prévu un cercle assez large pour limiter les risques de tomber à côté :). C'est vraiment proche du rempart dis-donc!
SupprimerMerci pour les détails en tout cas :)
CV
ps: j'ai remis le lien vers la vidéo d'ilotdrone: visiblement il n'a pas fonctionné ce matin. Trops belle cette vidéo
Bonjour,
RépondreSupprimerPourquoi les éruptions sur ce volcan sont si courtes en tout cas dernièrement?
Je me permets de répondre à cette question qui renvoie au fonctionnement et à la morphologie du système magmatique superficiel car le sujet m'intéresse tout particulièrement.
SupprimerIl est communément admis que l'alimentation profonde sous la Fournaise se fait de manière oblique, depuis -20 km environ sous la Plaine des Cafres jusque sous les cratères sommitaux, vers -5 km sous le niveau marin. Y a t-il un réservoir à cet endroit ? Personnellement, je le pense et même si quelques études (sismologie et tomographie) semblent le montrer, c'est pas clair. Toutefois, la grande majorité des éruptions sont alimentées par un magma qui vient de bien moins profond, depuis des zones entre le niveau de la mer et les cratères sommitaux, grosso modo entre 0 et 1000 m d'altitude. Deux grandes hypothèses s'affrontent : un réservoir commun, que ni la sismicité ni la tomographie ne voient, ou des petites poches magmatiques indépendantes, qui se formeraient alors à chaque pulse de la réalimentation magmatique mais sans une sismicité importante... Bref, il y a des arguments de chaque côté.
Concrètement, ces éruptions courtes et de faibles volumes depuis quelques temps semblent plutôt mettre en valeur la seconde option. Car, comme le dit l'observatoire, depuis que la réalimentation profonde est en cours, la quantité de magma disponible est importante... De là à ce que ça sorte obligatoirement, comme l'a indiqué Aline Peltier, ce n'est pas si sûr et une partie de ce magma peut tout à fait rester en profondeur et se solidifier.
De plus, on observe jamais de déflation après les éruptions, c'est à dire de dégonflement de l'édifice suite à la "vidange" d'une partie du réservoir magmatique. Cela va également plutôt dans le sens de poches magmatiques distinctes...
Voilà ce que j'en pense. Je précise que ce n'est qu'un idée, basée sur pas grand chose. Nul doute que les sources de pression (issues des déformations pré-éruptives) et que les analyses géochimiques sur les laves de ces éruptions donneront de précieuses infos... que je n'ai pas !
Ludovic Leduc
Merci pour cette réponse !
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