Fuego, Guatemala, 3763 m
L'activité du Fuego est actuellement dans une nouvelle phase de progressive hausse. Comme à l'accoutumée, les explosions stromboliennes sont devenues ces derniers jours de plus en plus fortes et de plus en plus intenses. A tel point que depuis 48 heures les webcams semblent montrer une activité quasi continue.
Sur la webcam située au sud-est (zone dite "La Réuniòn") on peut noter lors des explosions les plus fortes, que des blocs descendent assez bas dans une ravine, probablement la Barranca Honda, située sur le flanc nord-est, c'est-à-dire non loin de celle qui marque la suture avec le stratovolcan voisin Acatenango. Sur le time-lapse ci-dessous, réalisé par Greg Waite du Michigan Tech Institut, on peut noter un petit point lumineux permanent tout à droite: il s'agit d'une lumière ou d'une source de chaleur située sur l'Acatenango, probablement au niveau du point de vue qui permet d'observer l'activité du Fuego. Il s'agit peut-être d'un campement de touristes. Les blocs dont je parle se voient de temps à autre sur ce time-lapse,; par exemple à la 30ème seconde.
Pour l'heure cette activité reste uniquement explosive, aucune coulée de lavee n'ayant commencé à se former. Mais lorsqu'on regarde les phases paroxysmales de ces dernières années, il n e serait guère étonnant que l'une d'elle fasse son apparition à court-moyen terme.
Une activité à suivre de près donc.
Sources: INSIVUMEH; Greg Waite
Manam, Papouasie Nouvelle-Guinée, 1807 m
Lorsqu'on regarde les données du MIROVA on se rend vite compte que l'activité connait une nette hausse depuis la mi-février: les signaux thermiques sont bien plus fréquents et plus intenses qu'auparavant, ce qui constitue un pic nettement visible dans les données.
Pic d'activité thermique depuis la mi-février sur le Manam. Image: MIROVA |
Évidemment se pose la question de ce qu'il se passe là-bas. Sans permettre d'accéder à une certitude quant à ce qu'il se passe au sommet, les données récoltées le 21 mars par SENTINEL 2 montrent tout de même deux choses.
1- Si l'on combine les données pour produire une image en "couleurs naturelles", on peut voir que l'édifice est le siège d'un dégazage important, d'une teinte bleutée prononcée, donc plutôt riche en SO2. Par ailleurs au milieu de ce panache de gaz se détachent de discrets panaches de cendres, signe qu'une activité explosive faible à modérée continue de produire (il en était fait mention dans mon post de décembre dernier).
Panache essentiellement constitué d gaz, mais avec parfois des traces de cendres. Image: SENTINEL 2/ ESA-Copernicus |
2- si l'on combine par contre les données issues de longueurs d'ondes invisibles à l'oeil nu (infrarouges thermiques par exemple) on peut voir que le signal thermique est très intense au sommet et semble assez étendu. Attention toutefois à l'interprétation de cette "extension": elle pourrait n'être qu'apparente, issue de la diffusion du signal thermique par les gouttelettes d'eau qui constituent les nuages présents au-dessus des évents au moment du passage du satellite. Une autre image prise cette fois par LANDSAT 8 le 17 février indiquait malgré tout que l'évent nord semblait plus actif qu'en décembre 2016. Les deux images (LANDAST 8 de février et SENTINEL 2 du 21 mars) sont compilées ci-dessous.
L'activité du Manam vue, en fausse couleurs, en février et mars: les émissions d'infrarouge thermiques sont importantes. Images:! LANDSAT 8/NASA-USGS (gauche); SENTINEL 2/ESA-Copernicus (droite) |
Reste maintenant à interpréter la crise en cours, ce qui n'est pas évident. Aucune des images prisent ne suggère la présence de coulées de lave. Ou si il y en a, elles sont d'une extension très limitées, piégées dans le cratère. On sait par ailleurs que:
- l'intensité du signal thermique est trop intense pour qu'il ne soit produit que par du dégazage à haute température: il est donc bien le résultat d'une arrivée de lave à la surface
- des émissions de cendres, faible, sont toujours présentes, ce qui suggère une petite activité explosive.
Sur cette base il n'est pas inenvisageable que l'activité soit marquée par la présence d'un ou deux lacs de lave (un dans chaque évent), activité parfois entrecoupée par des effondrements dans le lac, susceptible de générer de faibles quantité de cendres. Il est aussi envisageable que les explosions se fassent sans l'aide d'effondrements des parois du lac: l'arrivée de grosses bulles de gaz peut aussi produire ce type de résultat.
Bien: maintenant que l'hypothèse est posée, qui souhaite (et peut) aller voire directement?
Affaire à suivre.
Sources: LANDSAT 8/NASA-USGS; SENTINEL 2/ESA/Copernicus; MIROVA
Erta Ale, Ethiopie, 613 m
L'activité éruptive se poursuit sans grands changements. Deux zones restent actives: le sommet, où le lac de lave est toujours présent dans le Pit Crater sud, et sur le versant sud-est, où la fissure éruptive ouverte en janvier continue d'alimenter le champ de lave qui s'étend en direction du nord-est. La plutôt faible vitesse de progression de ce champ de lave me fait penser à celui du Piton de la Fournaise en octobre 2015: le champ de lave en cours de mise en place pourrait donc être constitué de coulées ayant la morphologie dite "pahoehoe". Là encore ce n'est qu'une idée, et il faudrait aller sur place pour observer ce champ de lave.
Extension du champ de lave u 20 mars. image: SENTINEL 2/ESA-Copernicus |
Le jour même où ces données satellites ont été récoltées un guide, Jean-Michel Escarpit, est monté au niveau du Pit Crater Sud. Il a pu observer le lac de lave, dont le niveau est beaucoup remonté, et dont la surface est très agitée, due à la présence de grandes quantités de gaz. Je remercie Fabrice Fourcade de m'avoir fait passer cette image, qui permet de confirmer ce que suggéraient les images satellites depuis début mars.
Un beau lac de lave, bien dynamique, dans le Pit Crater Sud. Image: Jean-Michel Escarpit, |
On peut donc dire que l'épisode qui a débuté fin 2015, et qui est marqué par une arrivée plus importante de magma, se poursuit. Car non seulement la source de cette éruption alimente le champ de lave du versant sud, qui constitue un volume tout de même assez important, et remet en place le lac de lave. Il n'est donc pas inenvisageable que l'éruption latérale dure encore quelques temps.
Sources: SENTINEL 2/ESA-Copernicus; Fabrice Fourcade; Jean-Michel Escarpit
Bonjour,
RépondreSupprimerSi quelqu'un me finance le billet d'avion pour Madang j'y reviendrais volontiers ( entre 2000 et 3500 euros selon si on passe par Singapour ou Brisbane). Pays hors de prix à visiter notamment les transports (avion) et l'hébergement.
Pour rappel mes photos de 2012 ou depuis le terrain de foot près de la plage on peut lancer un drone facilement
https://www.flickr.com/photos/51873088@N04/albums/72157631389527686
Pour avoir été sur place le 23/01/2017 et observé l'éruption fissurale au plus près, je confirme qu'il s'agit bien de coulées pahoehoe accumulées sur une épaisseur suffisante pour former un "rootless lava lake" animé d'incessants mouvements convectifs faisant s'écarter et convergé de grandes croutes de lave refroidies
RépondreSupprimerBonjour Patrick,
SupprimerQu'en est-il de l'activité explosive, si elle est toujours en cours, sur les évents de la fissure ?
Merci d'avance,
Ludovic
Bonjour Ludovic,
SupprimerDepuis notre passage là-bas, où nous avons eu apparemment beaucoup de chance que les militaires nous y accompagnent, je n'ai vu aucune autre images sur les réseaux sociaux alors qu'auparavant, les images de débordements du Pit Crater sud étaient monnaie courante. De là à penser que plus personne n'est eu l'autorisation d'aller à proximité de la zone de l'éruption fissurale, il n'y a qu'un pas. Donc pour répondre à ta question : nous avons vue en plus du "rootless lava lake", une très belle activité explosive à partir de 2 hornitos, mais depuis je n'ai plus d'information.
Bien à toi
Patrick
Pardon pour les fautes d'orthographe, je me suis relu après coup...
SupprimerBonjour, :)
SupprimerPas de soucis pour l'orthographe et merci beaucoup pour ta réponse. Pourrais-tu, si ça ne te dérange pas, décrire un peu plus largement les spatters-cônes (formes et taille) ainsi que l'activité qui s'y déroule (fréquence et intensité des explosions) ?
Merci d'avance,
Ludovic
Bonjour Ludovic,
SupprimerLe 23/01 au soir les 2 hornitos avaient la forme de cloches de 5/6 m de hauteur pour autant de largeur environ. Leur activité était continue avec projection de lambeaux de lave parfois épais et larges, se déformant durant leur trajectoire aérienne estimée à un vingtaine de m de hauteur. En retombant ils se plaquaient et se "collaient" aux flanncs des hornitos et contribuaient à leur agrandissement rapide. Si l'activité continue toujours actuellement et au même rythme, ils doivent avoir considérablement grandi. Mais j'ai beau cherché, je ne trouve aucune info sur la toile. Bien à toi. Patrick
Ok, super.
SupprimerMerci pour ta réponse,
Ludovic
Video du lac de lave trouvée sur instagram
RépondreSupprimerinstagram.com/p/BR5yurQhZhL/