7 mars 2017

Détails concernant l'activité du Krakatau

L'activité décrite les 18-19 février ne semble pas s'être poursuivie. Les signaux thermiques ont pour ainsi dire disparu, aucune émission de cendres n'est détectée: tout semble de nouveau calme. Par contre je dois avouer que je suis extrêmement surpris par les images réalisées la semaine passée par le photographe Oystein L Andersen, qui connait bien l'Indonésie.

Ces dernières montrent plusieurs choses qui font de cette courte crise un événement très intéressant, contrairement à ce que laissaient penser les quelques images trouvées sur le net.
Le photographe, qui a pu survoler l'Anak Krakatau, a tout d'abord pu voir que la morphologie du sommet du célèbre cône avait changé. Là où un simple cratère était encore visible en 2015 lors de son passage précédent, un petit "cône"* occupe maintenant le sommet.

Le changement de morphologie du sommet de l'Anak Krakatau est très clair. Images: Oystein L Andersen
Mais ce que montrent surtout ces images, et qui m'a laissé pantois j'avoue, c'est la présence d'une nouvelle coulée, qui est descendu par-dessus celles produites en 2012, c'est-à-dire sur le versant sud-est. Car rien, absolument rien dans les données satellites disponibles à ce moment-là (on verra quand il y aura eu des mises à jour) ne permettait ne serait-ce que de soupçonner que des coulées de lave étaient en train de se mettre en place.
Par ailleurs, vue la brièveté apparente de l'éruption, la mise en place de coulée est pour le moins surprenante.

Le cône sommital et la nouvelle coulée de lave. Image: Oystein L Andersen

Tout cela laisse perplexe et incite à se demander comment, réellement, ce sont passés les événements vers les 18-19 février. Tout d'abord, l'activité explosive, qui paraissait tout de même modeste, a-t-elle pu construire à elle seule le "cône"?
Notez, car ce n'est pas un hasard, que je met des guillemets, car normalement un cône, comme ceux de la Chaîne des Puys, ou celui qui grandit actuellement au sommet de l'Etna. croissent par l'accumulation des fragments de lave (cendres, lapillis, bombes) sur le sol autour du point de sortie de la lave. Et si l'on voit bien des fragments sur les photos, la taille du "cône" me laisse perplexe: il semble relativement grand, eu égard à la faible activité explosive observée qui, de plus, semble ne pas avoir duré très longtemps.
Ce qui me fait principalement douter toutefois ce n'est pas la taille du "cône". Sur certaines images ont peu noter en effet que le versant nord-ouest de ce cône est découpé par des longues fissures radiales (elles partent du sommet et vont à la base), d'où sortent des fumerolles. On les voit sur la photo ci-dessus, à peu près à l'endroit où arrive le trait noté "nouveau cône": elles forment de petits traits blancs.

Ces fissures, assez nombreuses, suggèrent que la zone où s'est déroulée l'activité s'est soulevée, et le "cône" pourrait en réalité être, au moins en partie, un relief créé par soulèvement des fragments accumulés dans le cratère suite aux dernières éruptions (2011-2012, quelques explosions en 2013 et 2014 semble-t-il). Cela a déjà été observé par ailleurs, sur d'autres édifices et à une plus grande échelle: j'aurais l'occasion d'y revenir dans un prochain post.
Aussi il n'est pas impossible qu'en lieu et place d'un scénario classique, durant lequel le magma arrivant à la surface est en partie fragmenté (explosions stromboliennes) ce qui construit un cône, et en partie émis sous forme d'une coulée, un second scénario pourrait expliquer les observations d'O.L Andersen.

Étape 1: de magma, probablement une quantité modeste, remonte vers, et atteint, la surface du globe au fond du cratère d'Anak Krakatau.

Étape 2: lors de son arrivée cette masse de magma soulève les débris accumulés dans le cratère, mais les gaz commencent à sortir et une petite activité strombolienne débute.

Étape 3: la masse de magma perce le "cône" ainsi édifié, pendant ou après sa construction, ce qui l'éventre en direction du sud-est: la coulée se forme alors.


Le tout ne prend que très peu de temps, 2 à 4 jours à priori, car les signaux thermiques disparaissent vite.

Ce que je décris ci-dessus n'est que ce que j'imagine s'être produit car, pour le moment je n'ai vu aucune information précisant les événements au cours de l'éruption  et n'ait pu trouver aucune image de la coulée en question. Coulée dont la présence ne cesse de me plonger dans la perplexité...


 
Source: Oystein L Andersen

* qu'il nomme "dôme" en raison de sa forme mais qui techniquement n'en est pas un d'après ce que je vois

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