17 juin 2016

Retour d'une activité hydrothermale dans un des cratères de Waimangu (Nouvelle-Zélande)

C'est un bulletin du GeoNet publié aujourd'hui qui révèle cette info: en mai dernier, des projections de boue ont eu lieu dans l'un des cratères de la zone hydrothermale de Waimangu.
Cette zone est culte pour plusieurs raison:
- c'est le seul site géothermal au monde dont la formation et le développement a été observé
- il est associé à l'éruption historique la plus importante de Nouvelle-Zélande, celle qui a éventré le
massif de Tarawera ("les collines brulées", en Maori) en juin 1886, massif qui fait partie de la caldera d'Okataina

- c'est là qu'a fonctionné le plus important geyser observé sur Terre: le geyser Waimangu, entre 1900 et 1904, qui projetait des jets de boue jusqu'à plus de 450 m de hauteur!
Le geyser Waimangu en action, en 1903. Image: Te Ara

L'éruption du Tarawera, en juin 1886, a été extrêmement importante avec un VEI qui a atteint le niveau 5, signifiant une très grande explosivité (pour mémoire l'éruption du Kelut en 2014 a atteint "seulement" le VEI 4), à l'origine d'un panache de cendres dont la hauteur a été estimée à 28 km. Pendant l'éruption, qui n'a duré que 5 heures pour sa phase la plus intense, tué 108 personnes et libéré du basalte*, une fracture longue de 17 km s'est ouverte:
- ouvrant en deux le massif de Tarawera
- traversant le lac Rotomahana, ce qui fit disparaitre au passage les "White and Pink Terasses", un site hydrothermal d'une exceptionnelle beauté
- ouvrant ce qui est aujourd'hui appelé le Waimangu Rift Valley, dans laquelle plusieurs cratères d'explosions se sont formés pendant l'éruption.

Ces cratères sont, du nord-est au sud-est:
- Raupo Pond Crater et Fairy Crater, côté à côte
- Inferno Crater
- Echo Crater

Ce n'est que quelques années après la fin de l'éruption qu'une activité hydrothermale s'est mise en place progressivement, entre 1888 et 1896, dans les cratères ci-dessus nommés. Et la figure la plus emblématique fut le geyser Waimangu, apparu dans l'Echo Crater, dont l'activité fit, en août 1903, quatre victimes qui n'avaient visiblement pas fait preuve de prudence et s'étaient approchées trop près.

Après l'extinction du geyser Waimangu, le 01 novembre 1904 (peut-être en lien avec un glissement de terrain mais ce n'est visiblement pas claire, car l'activité déclinait depuis déjà plusieurs mois), aucune activité particulière n'a plus été observée jusqu'en 1906, date à laquelle une explosion hydrothermale fait apparaitre le site appelé aujourd'hui "Mud Rift", dans le cratère Raupo Pond. Au cours du 20 ème siècle quelques phases hydrothermales se produisent sur l'Echo Crater essentiellement. Mais il faut attendre la toute fin des années 70 et mai 1981 pour qu'une nouvelle explosion hydrothermale se produise à nouveau dans le cratère Raupo Pond et ouvre deux nouveaux petits cratères sur le Mud Rift.
La fracture de 1886 et les cratères qui s'y sont formés à son extrémité sud-ouest.

Depuis lors, plus rien de particulier à signaler dans la zone, mise à part les température assez chaudes  des lacs qui remplissent Inferno Crater et Echo Crater** et les variations périodiques du niveau des deux lacs. Ces derniers s'élèvent et s'abaissent de 6 à 9 m en l’espace de 40 jours dans l'Inferno Crater et sont en lien avec des variations similaires, mais décalées dans le temps, dans l'Echo Crater (le niveau haut d'un lac correspond au niveau bas de l'autre), trahissant un lien entre les deux.
Raupo Pond quand à lui est resté calme depuis mai 1981 jusqu'en mai 2016. Entre les 17 e 20 de ce mois une activité hydrothermale faible y a visiblement de nouveau eu lieu. Les mesures réalisées par le Geonet récemment sur le site n'ont montré aucune température anormalement élevée: dans les mares boueuses, à peine plus de 13°C ont été relevés. La végétation à proximité des mares de boue a été affectées mais il n'y a aucune indice de destruction mécanique: pas de branches cassées, pas de plantes couchée. Les plantes sont marron, peut-être mortes sur pied, ou avec au minimum leur feuillage endommagé.
La végétation endommagée autour d'une des mares de boue qui occupe un petit cratère ouvert dans Raupo Pond Crater en 1981.

Pour les scientifiques cet événement ne semble pas lié à une quelconque réactivation du système magmatique qui a conduit à l'éruption de Tarawera en 1886: il ne donc s'agit pas du signe précurseur d'une éruption. A priori et jusqu’à preuve du contraire, c'est un événement purement hydrothermal qui pourrait être en lien avec une variation anormale du niveau du lac d'Inferno Crater, situé à environ 400m de là. En effet ce dernier a connu un niveau très élevé entre janvier et avril 2016. Mais les volcanologues ont noté une baisse brusque du niveau, 6 m environ, 3 semaines avant l'activité dans le Raupo Pond. Personne n'ayant assisté à l'événement du mois de mai, il est difficile de savoir concrètement comment il s'est déroulé. Mais l'absence de casse sur les fougères arborescentes notamment laisse supposer qu'elles n'ont pas eu à supporter la lourde masse d'une charge boueuse. Il est donc vraisemblable que l'activité ait surtout projeté de l'eau chaude, plutôt peu chargée en particules. Les volcanologues ont enfin noté que les bords des deux petits cratère qui ont subit cette activité se sont affaissés.

Source: Geonet

* lave très fluide: qui a dit "volcan rouge" quand c'est de la lave fluide? Cette éruption du Tarawera 1886 est dite "plinienne basaltique".

** le lac de ce dernier s’appelle d'ailleurs "Frying pan Lake" ou "lac poele à frire", ce qui est on ne peu plus évocateur

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