21 février 2016

Un point sur l'activité des volcans Aira-Sakurajima et Colima

Sakurajima, Japon, 1117m

Depuis que l'activité explosive est revenue, le 05 février dernier, elle n'a cessé de s'accentuer. Mais par "accentuer" il faut entendre que la fréquence des explosions n'a cessé de grimper depuis ce redémarrage, plutôt que leur violence. Depuis lors, de manière plutôt fréquente (quelques explosions par heure), on voit
s'élever au-dessus du cratère Showa des panaches, plus ou moins chargés en cendres suivant que les explosions ont plutôt faibles ou relativement fortes.

Panache de cendres d'une explosion modérée, 20 février 2016. Image: MBC

Autre explosion modérée, 21 février 2016. Image: MBC

A la fin du post du 05 février, on pouvait se demander si l'explosion était une sorte d'"accident" ou si elle marquait le retour d'une activité explosive plus régulière: il semble que la seconde solution soit la bonne.

Source: MBC

Colima, Mexique, 3850 m

Le volcan est resté le siège d'une activité explosive ces derniers mois. Elle a un peu varié en intensité, connaissant des phases marquées par des explosions relativement fortes et des panaches très chargés,et d'autres où les explosions étaient un peu plus faibles et les panaches un peu plus dilués.
L'enseignant-chercheur Nick Varley, de l'Université de Colima, a indiqué avoir repéré depuis la semaine dernière un changement dans les images produites par les webcams de surveillance, à savoir l'apparition d'une lueur presque permanente dans le cratère. Voulant en à savoir plus, il n'a pas hésité à payer, avec ses étudiants, un survol de l'édifice afin d'avoir le coeur net.
Ce survol privé (il me semble important de le préciser) a permis de constater qu'un (très joli) petit dôme, haut de 10 m environ et large de 25 m, a fait son apparition dans le cratère qui, de son côté, ne mesure pas moins de 300 m de diamètre. L'éruption est donc devenue mixte: extrusive/explosive.

La petite masse de lave lovée au fond du cratère du Colima est un dôme vraisemblablement apparu la semaine passée. Image: Nick Varley

Pour le survols les scientifiques avaient emporté une caméra thermique avec laquelle ils ont pu estimer une température maximale sur le dôme de 850 °C. Les chercheurs ont aussi donné une estimation, qu'ils qualifient eux-même d'approximative, du débit de lave qui produit ce dôme: environ 0.2 m3 par seconde. Une de leurs intentions est de préciser ce paramètre.

Reste maintenant à suivre l'évolution de ce nouvel objet, voir par exemple si sa croissance va être plus importante que sa destruction par l'activité explosive, ou l'inverse. Et, qui sait, si cette croissance perdure assez longtemps, on pourrait même voir, d'ici quelques semaines ou mois, ce dôme devenir assez important pour commencer à déborder du cratère. Les volcanologues précisent par contre que le cratère est actuellement très profond, creusé progressivement par chacune des nombreuses explosions qui se sont produites depuis août dernier.
Mais d'ici là, continuons de suivre de près l'activité de volcan.

Pour rester sur le Colima, merci à Onoxyne de m'avoir fait savoir, via twitter, qu'une photo de ce volcan, faite par Sergio Tapiro, a été primée au World Press Photo of the Year 2016, catégorie "Nature" (3ème prix).


Sources : Université de Colima; Onoxyne via twitter

5 commentaires:

  1. Sympa les photos!!!

    O,2 m3/s...; C'est tout petit!! Cest 200 litres par seconde, l'équivalent d'une baignoire par seconde, d'un point de vue géologique, c'est minuscule..... D'où la question qui tue..... Est-ce que la croissance de ce dome ne se fait pas par àcoups? Par exemple, après une explosion qui en pulvérise une partie, un gros débordement à plusieurs dizaines de m3/s se produit pendant quelques dizaines de minutes le temps que la pression revienne à la normale... Ensuite plus rien, seul des gaz surchauffés et une lente cristallisation qui figent la forme du dome en place et le maintiennent incandescent mais solide (850°C, c'est pas énorme, meme pour un magma ultrasiliceux).

    Simple digression sur le mécanisme...

    Lorsque une explosion survient, il est probable que le contenu de la cheminée se vide un peu, que les parties superficielles du bouchon de lave presque à l'état solide soient pulvérisées, et donc que du magma plus profond plus "frais" (donc plus chaud ;) et bien plus fluide remonte et s'étale au fond du cratère peut etre accompagné d'une activité strombolienne discrète (d'ou l'incandescence, et comme le cratère est très profond, on ne voit pas les projections). Ensuite le gros paté de lave se refroidit et fige sur place en baissant lentement de température, seuls des gaz à 850°c percolent et le gardent incandescent. Ce dégazage constant ne suffit pas à écouler toute la production gazeuse du volcan, donc la pression augmente dans la cheminée, de plus en plus au fur et à mesure qu'elle se colmate. Vient un moment où la pression est telle qu'elle dépasse le point de rupture du dome, et boom, explosion vulcanienne et plus de dome.... Ou bien la pression dépasse le point de rupture de la paroi de la cheminée qui contourne le dome, et soit exhalaison si le passage est étroit, soit explosion qui élargit la cheminée et laisse un bout du dome en place. Rien n'empeche de penser que le cycle recommence indéfiniment...jusqu'à remplir le cratère!

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  2. Commentaire tres intéressant... Sur le role des gaz pour maintenir le dôme incandescent, c'est tres clairement le cas. Par contre je ne pense que des explosions répétées détruisent des embryons de dômes comme celui photographié par Nick. Depuis deux semaines, on note justement que les "explosions" du volcan (entre guillemet parce qu'ils s'agit en réalité d'episodes de dégazage durant plusieurs minutes) sont moins énergétiques et plus fréquentes, et que le dégazage ne s'arrête pas entre deux explosions. Le croissance d'un dôme marque donc paradoxalement le retour a des conditions de conduit plus "ouvert". On voit autour du dome une dépression de forme annulaire qui est la trace des évents á l'origine des "explosions"

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    1. C'est vrai que la situation est intéressante, d'autant plus avec ce paradoxe du conduit ouvert conjoint au dôme.
      Mais ce paradoxe n'existe uniquement car le dôme est pour l'instant modeste et d’une taille probablement comparable à celle du conduit ; l'activité cendreuse (pour ne pas dire explosive donc) trouve donc la place pour s’émettre au pourtour du dôme sans le détruire. Mais dans le cas où le débit effusif augmenterait (car là, c’est du très faible comme le faisait remarquer Alcide), le dôme pourrait emplir la dépression et constitué un réel bouchon…
      Selon le débit effusif, on serait alors :
      - Soit en présence d’un mini-dôme formé par un modeste volume de magma résiduel. Quant au mécanisme de mise en place, pourquoi pas ce qu’évoquais Alcide. Etant donné la petitesse de l’objet, l’activité explosive (ou cendreuse) pourrait rapidement le démanteler.
      - Soit au début d’une activité mixte.

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  3. Justement, a Colima, les phases d'activité effusive qui se font a débit élevé sont marquées par une absence d'explosivité et l'émission de gaz de maniére passive et continue. L'activité "explosive" n'apparaît que quand l'activité effusive (comme en ce moment) est soit faible, soit inexistante. Je pense qu'il faut peut être repenser le paradigme dôme=bouchon impermeable qui empechent les gaz de sortir...

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