28 février 2016

L'activité éruptive du volcan Sinabung se poursuit

Il n'est malheureusement pas simple d'avoir des détails concernant la façon dont cette activité évolue. En particulier savoir comment peut être caractérisée l'intensité de l'activité en cours: est-elle importante? En hausse/en baisse/stable? Cependant une chose semble sûre: l'activité reste mixte (explosive/extrusive) avec à la fois:
* la mise ne place de panaches de cendres verticaux, liés à des explosions ou à des épisode de dégazage intense ("ash venting") 
* des avalanches de blocs et parfois des écoulements pyroclastiques, qui viennent, pour leur part, du lobe de lave toujours en extrusion, sur le haut versant est-sud-est.

L'activité extrusive, donc l'émission tranquille de lave visqueuse dans le cratère sommital, semble continuer à se faire à faible, voire très faible débit, si l'on se base sur les bribes d'informations et les images prisent depuis début février. Celles-ci ont en effet montré assez peu d'avalanches de blocs ou d'écoulements pyroclastiques, sauf ces derniers jours. En effet on peut noter que, depuis le 19 ou 20 février, les réseaux sociaux montrent un peu plus d'écoulement pyroclastiques notamment, qui semble traduire une recrudescence du phénomène, et peut-être une hausse du débit de l'extrusion, qui la rendrait instable.
Si la plupart des écoulements ont été plutôt modestes, ceux qui se sont mis en place le 26 février ont été, à contrario, plus importants. Au moins l'un d'entre eux a atteint une distance de 3 km ce qui, malgré tout, n'égale pas la longueur (4 à 5 km) des écoulements mis en place au début de la phase d'extrusion, fin décembre 2013, janvier-février 2014, lorsque l'activité extrusive était à son maximum. Un autre écoulement récent (23 février) a du approcher lui-aussi cette longueur au vu des photos de lui qui ont circulé.
Il semble que les images ci-dessous montrent cet écoulement du 26 février, mais c'est à confirmer (je ne peux pas exclure qu'il puisse ne s'agir que d'image d'archives servant à l'illustration de l'info).




Si l'on part du principe que les images ci-dessus sont bien celles des écoulements du 26 février, le terme "apocalyptique" employé dans le titre n'est par contre pas très adapté à la réalité de la situation. L'écoulement le plus important était certes plutôt impressionnant puisqu’il a atteint la base Est de l'édifice, et que sont front avançait sur 2-300 mètres de largeur, d'après les images. Mais les seuls dégâts qu'il a fait sont d'avoir déclenché quelques incendies dans le village déjà en ruine et partiellement détruit de Simacem. Aucune victime n'est à déplorer, la zone étant vide de tout habitant depuis 2013. Et à part quelques chutes de cendres un peu drues et probablement responsables d'un gêne dans la population la plus proche, il n'y a pas eu de problèmes graves associés à cet événement en particulier.

Un incendie dans la partie nord du village de Simacem, sur le bord des dépôts d'écoulements pyroclastiques de 2015-2016 (le sud du village a été totalement enseveli sous ces mêmes dépôts). Image: Endro LEwa

Le mot "apocalyptique" a donc vraisemblablement été plus inspiré par la façon dont les prises de vue ont été faites que par l'ampleur réelle du phénomène. Le front des écoulements pyroclastiques visibles est "shooté" au téléobjectif, ce qui rapproche le premier (le village) et le dernier plans (le front des écoulements), modifiant les proportions visuelles de l'un et de l'autre, ce qui produit une image plus anxiogène (l'impression que le village est en danger immédiat alors que plusieurs kilomètres séparent le premier et le dernier plan). Le gros plan sur le panache de cendres et son bourgeonnement a la même vocation anxiogène, en donnant à l'"objets toute la place à l'écran, on lui suggère une taille image, alors qu'il s'est agit d'un panache de cendres d'une taille modérée.
Si l'on regarde cet "apocalypse" depuis l'espace, par contre, la remise aux dimensions reèlles, recontextualisées, est frappante: vue de l'espace, le panache produit par l'événement n'est franchement pas très impressionnant, encore moins apocalyptique.

Émission de cendres du 26 février, résultat de l'écoulement pyroclastique "apocalyptique". Image: Himawari 8

Ce qui demeure maintenant la manifestation la plus fréquente de cette activité éruptive, ce sont les explosions qui se déroulent au sommet, à travers la galette de lave. Elles sont à l'origine de panaches de cendres hauts de 1500 à 3000 m . Et, de nuit, s'apprécient autant les projections incandescentes (qui font caractériser cette activité comme "strombolienne" alors que ce n'est pas le cas) que quelques éclairs dans les panaches de cendres. Et ça, c'est toujours beau à regarder.

Panache de cendres, le 23 février. Image: Endro Lewa

Éclair intrapanache, lors d'une explosion le 25 février. Image: Sadra Ps

Pour l'heure en tout cas, que l'activité soit intense ou non, elle demeure un danger pour toute les activités humaines dans un rayon de 5 km à 7 km. Et à cause de cette éruption ce sont toujours plus de 9300 personnes qui vivent leur quotidien répartis dans 9 camps de réfugiés.

Pour finir, je souhaitais vous faire savoir que Google Earth à mis à jour son image du Sinabung. On y distingue maintenant très clairement non seulement la coulée visqueuse (mise en place en 2014) mais aussi les dépôts d'écoulements pyroclastiques du versant est qui ont détruit en partie Simacem, sans compter les dépôts d'écoulements pyroclastiques plus anciens et les coulées de boue.

La nouvelle image Google Earth du Sinabung.

Sources: PVMBG-CVGHM; Leopold Kennedy Adam; Himawari 8; VAAC de Darwin; Google Earth

2 commentaires:

  1. Même si les médias exagèrent (comme toujours peu importe le sujet) ce volcan donne toujours de splendides vidéos/photos. Cela donne envie de faire un tour sur place.

    https://twitter.com/search?f=images&vertical=default&q=%23EndroLewa

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tout à fait d'accord. Le souci c'est que l'activité n'est pas aussi intense qu'il y parait (quelques panaches par jour si j'ai bien compris, peu d'écoulements pyroclastiques, d'après les images qui circulent) et, malheureusement il faut habiter sur place pour faire les photos qui sont faites et circulent sur les réseaux sociaux (qui proviennent d'ailleurs presque toutes de photographes locaux).
      Ce qui m'intéresserais, idéalement, c'est être à nouveau sur place une dizaine au moins, histoire de voir réèllement comment ça se déroule: je ne connais rien de mieux que de se faire sa propre opinion..non?
      En tout cas il y a quelques photos sympas, en effet

      Supprimer