Cela faisait plusieurs mois que le volcan était retourné dans un état de calme, depuis novembre 2015 pour être plus précis, lorsque s'était effectuée la dernière remontée de magma dans l'édifice. Mais c'est en fin de matinée aujourd'hui (11h05 heure locale), d'après le rapport spécial publié par l'IGEPN, que la sismicité a
commencé à monter en flèche, produisant un essaim de secousses de deux types:
- volcano-tectoniques, produites par la fracturation de roches rigides
- Longue période (ou basse fréquence), dites "LP", qui marquent la circulation de fluides sous pression dans les fractures.
Et c'est très peu de temps après, à 12h12 (heure locale) qu'une activité explosive a démarré. Au moins deux explosions se sont succédées, mais la première fut la plus importante, et à l'origine d'un panache plutôt imposant, chargé de cendres, large à sa base d'environ 350-400 m, et qui s'est élevé sur une hauteur de 5 km.
Sur l'image ci-dessous on note bien deux panaches: celui à droite est en cours de dispersion, et c'est lui qui s'est élevé jusqu'à 5000m de hauteur. Le plus petit, mais plus sombre car plus dense, marque le moment de la seconde explosion.
Les deux panaches de cendres vus depuis Riobamba (30 km au sud-est). Image: Santiaguma |
Emportées par le vent d'altitude, les cendres se sont dispersées essentiellement en direction de l'ouest et du nord-ouest, en moindre quantité au sud-ouest, et sont retombées sur plusieurs zones habitées dont Choglontus, Pillate,Cahuaji et El Manzano, toutes habituées à ce type de situation, devenue plutôt fréquente depuis que l'activité est revenue sur ce volcan, à la toute fin des années 90.
A voir la hauteur du panache on serait tenté de penser que l'explosion a été importante. Or le rapport des volcanologies précisent que l'onde de pression atmosphérique associée n'a été que de 30 pascal, ce qui en fait une explosion catégorisée comme faible.
Par ailleurs Patricia Mothes, volcanologue à l'IGEPN, a fait savoir que cette activité avait une origine superficielle, et n'était pas en lien avec une remontée magmatique. Il s'agirait, à priori, d'une conséquence du refroidissement du magma laissé dans les conduits depuis novembre 2015 qui:
- d'une part colmate lesdits conduits, ce qui empêche tout dégazage de se faire tranquillement
- d'autre part provoque la cristallisation du magma et, par là même, la libération de gaz. Ces derniers n'entrent en effet que peu dans la composition de la plupart des minéraux. Au fur et à mesurent qu'ils se forment, le gaz se retrouve concentré dans un espace de plus en plus restreint. Cette évolution normale des magmas a donc pour conséquence une hausse de la pression dans la partie supérieure des conduits.
Hausse de pression d'un côté, colmatage de la seule porte de sortie d'un autre: voilà bonne recette pour faire une belle explosion sans magma neuf, et un beau panache de cendres.
Mise à jour, 27 février, 21h22
Après la première série d'explosions modérées en fin de matinée, le volcan en a produit d'autres un peu plus conséquentes dans l'après-midi du 26 avec, en particulier, des écoulements pyroclastiques à 13h33 (heure locale) et de 15h35. Les volcanologues, dans les différents bulletins spéciaux qu'ils ont édité tout au long de cette crise, ont spécifié que les écoulements pyroclastiques ont été de deux types différents:
- un effondrement de la base d'un panache de cendres pour l'explosion de 13h33
- une émission sans explosion pour celui de 15h35, écoulement dit de "type "boiling-over" ("bouillir par-dessus" textuellement). Ce second type d'écoulement est un peu particulier car il peut se mettre en place avec ou sans magma neuf, et à basse température. On peut se le représenter comme la conséquence du débordement du cratère d'un mélange dense de cendres et gaz. C'est un phénomène qui a été étudié justement grâce aux dépôts du Tungurahua et du Cotopaxi notamment il y a peu (2013).
Une activité explosive décrite comme strombolienne, modérée, s'est poursuivie par la suite, projetant des blocs et des bombes sur les hauts versant du stratovolcan. Les chutes de particules qui ont été récoltées alentours ont permis de constater qu'elles étaient constituées d'un mélange multicolore, rouge, beige, noir, gris, qui traduit une origine superficielle (particules colorées = lave altérée, oxydée), probablement mélangées à des particules de magma neuf (en noir, vraisemblablement, mais il faut au moins un examen au microscope pour se faire une idée un peu plus précise).
Bien qu'ayant vraisemblablement, vue l'activité explosive et les caractéristiques de certaines des particules récoltées, une composante magmatique (présence de magma neuf) l'idée de départ élaborée par l'IGEPN tient toujours la route. En effet aucune signal géophysique particulier n'a été détecté avant que ne débute cette crise:
- ni sismicité profonde
- ni déformation
La dispersion des cendres de cette activité explosive peut être suivie par satellites. Image: NOAA/CIMSS |
A voir la hauteur du panache on serait tenté de penser que l'explosion a été importante. Or le rapport des volcanologies précisent que l'onde de pression atmosphérique associée n'a été que de 30 pascal, ce qui en fait une explosion catégorisée comme faible.
Par ailleurs Patricia Mothes, volcanologue à l'IGEPN, a fait savoir que cette activité avait une origine superficielle, et n'était pas en lien avec une remontée magmatique. Il s'agirait, à priori, d'une conséquence du refroidissement du magma laissé dans les conduits depuis novembre 2015 qui:
- d'une part colmate lesdits conduits, ce qui empêche tout dégazage de se faire tranquillement
- d'autre part provoque la cristallisation du magma et, par là même, la libération de gaz. Ces derniers n'entrent en effet que peu dans la composition de la plupart des minéraux. Au fur et à mesurent qu'ils se forment, le gaz se retrouve concentré dans un espace de plus en plus restreint. Cette évolution normale des magmas a donc pour conséquence une hausse de la pression dans la partie supérieure des conduits.
Hausse de pression d'un côté, colmatage de la seule porte de sortie d'un autre: voilà bonne recette pour faire une belle explosion sans magma neuf, et un beau panache de cendres.
Mise à jour, 27 février, 21h22
Après la première série d'explosions modérées en fin de matinée, le volcan en a produit d'autres un peu plus conséquentes dans l'après-midi du 26 avec, en particulier, des écoulements pyroclastiques à 13h33 (heure locale) et de 15h35. Les volcanologues, dans les différents bulletins spéciaux qu'ils ont édité tout au long de cette crise, ont spécifié que les écoulements pyroclastiques ont été de deux types différents:
- un effondrement de la base d'un panache de cendres pour l'explosion de 13h33
- une émission sans explosion pour celui de 15h35, écoulement dit de "type "boiling-over" ("bouillir par-dessus" textuellement). Ce second type d'écoulement est un peu particulier car il peut se mettre en place avec ou sans magma neuf, et à basse température. On peut se le représenter comme la conséquence du débordement du cratère d'un mélange dense de cendres et gaz. C'est un phénomène qui a été étudié justement grâce aux dépôts du Tungurahua et du Cotopaxi notamment il y a peu (2013).
Image thermique qui montre, outre une explosion à 15h10 (heure locale), les dépôts encore chauds des écoulements pyroclastiques de l'explosion de 13h33. Image: IGEPN |
Une activité explosive décrite comme strombolienne, modérée, s'est poursuivie par la suite, projetant des blocs et des bombes sur les hauts versant du stratovolcan. Les chutes de particules qui ont été récoltées alentours ont permis de constater qu'elles étaient constituées d'un mélange multicolore, rouge, beige, noir, gris, qui traduit une origine superficielle (particules colorées = lave altérée, oxydée), probablement mélangées à des particules de magma neuf (en noir, vraisemblablement, mais il faut au moins un examen au microscope pour se faire une idée un peu plus précise).
Echantillonage des particules (cendres et lappili) retombé des panaches. Image: IGEPN |
Bien qu'ayant vraisemblablement, vue l'activité explosive et les caractéristiques de certaines des particules récoltées, une composante magmatique (présence de magma neuf) l'idée de départ élaborée par l'IGEPN tient toujours la route. En effet aucune signal géophysique particulier n'a été détecté avant que ne débute cette crise:
- ni sismicité profonde
- ni déformation
Toutefois, puisque les faits semblent bien indiquer qu'une fraction de magma neuf participe à cette activité, l'IGEPN suggère qu'un tout petit volume de magma, insuffisant pour perturber les appareils de surveillance, se serait mis en place dans l'édifice. Il n'est pas impossible non plus que la disparition du bouchon ait entrainé la dépressurisation du conduit, provoquant la remontée d'une fraction de magma resté encore à l'état suffisamment liquide depuis novembre dernier. Des secousses ont en effet été enregistrées entre 2 et 5 km de profondeur sous le sommet et, à ces profondeurs-là le refroidissement du magma est déjà beaucoup plus lent vu que l’environnement rocheux lui-même est plus chaud (gradient géothermique).
L'activité explosive dans la nuit du 26 au 27, ici à 22h14 (heure locale). Image: Francico Vasconez, via IGEPN |
Quoi qu'il en soit l'IGEPN, sur la base des données instrumentales et de l'observation du déroulement de la crise, a élaboré 2 scénarios:
1-l'activité reste similaire à celle qui est déjà en cours, à savoir une émission de gaz et cendres plus ou moins continue, entrecoupée d'explosion modérées. Il peut y avoir de petits écoulements pyroclastiques. C'est, pour eux, le scénario le plus probable.
2- une masse de magma neuf arrive des profondeurs et, en conséquence, l'activité érutpive devient plus violente, plus intense, voire paroxysmale (ils prennent l'exemple de la crise d'août 2006, qui avait fait des victimes et détruit un village près de Baños).
Sources: IGEPN; NOAA/CIMSS; Merci à Shérine France pour l'info
Bonjour,
RépondreSupprimerL'activité continue au Tungurahua : plusieurs explosions, deux écoulements pyroclastiques, incandescence cratèrique...
Bonjour Ludovic. En effet, il y a eu d'autres explosions, probablement une trentaine au moins au total, et un changement de l'alerte institutionelle dès après les premières explosions hier. Les échantillons prélevés sont multicolores, donc essentiellement matériaux anciens, mais il y a peu être une fraction juvénile: pour l'instant je n'ai pas vu de résultat d'analyses de ces échantillons donc rien n'est sûr.
SupprimerQuand aux écoulement pyro, l'IGEPN en a bien décrit deux types: des effondrements de base de colonne et le fameux "boiling-over" décrit dans le second rapport spécial. Vu que le mécanisme de ce type d'écoulement peu ou non impliquer du magma juvénil, ça serait top que le dépôt puisse être échantillonné....mais je doute que cela soit fait :-)
Bonjour,
SupprimerEst-ce que le boiling-over a été photographié, filmé ?
C'est clair que l'échantillonnage apporte une vraie info sur l'activité, info qui ne peut être apportée par les photos ou images satellites. Ce qui est dommage, c'est que ces infos ne filtrent que rarement ou tombent dans l'anonymat au vu des (longs) délais d'analyse. C'est dommage car souvent, une étude microscopique suffit pour avoir une bonne idée de la situation, les données géochimiques venant complétées.
Avec 6 amies nous allons en octobre faire des treks vers et autour des volcans . est ce raisonnable ? devons renoncer et prévoir d'autres treks ? Merci pour vos informations. Cordialement - Monique Blanc
RépondreSupprimerBonjour.
SupprimerJe pense que je pourrais plus facilement vous renseigner de manière la plus complète possible par mail (culturevolcan@gmail.com). Dans votre mail, n'oubliez pas de me dire où vous pensez partir, car toutes les situations sont spécifiques.
Bonne journée :-)