25 septembre 2014

Un point sur la situation des volcans Kilauea et Mayon

Kilauea, Etats-Unis, 1222m

Depuis le 19 septembre le front de coulée qui se déplaçait en direction de Pahoa n'a pas progressé et s'est donc arrêté juste à la sortie de la forêt. A partir de cet endroit, peut-être sous l'effet du vent, des feux de brousse ont démarré, enclenchés par la lave bien entendu. Simultanément, de nouveaux fronts de coulée ont commencé à émerger en arrière du front arrêté, longeant le bord nord de la coulée. Ces
nouveaux fronts ne progressent pas très vite non plus: il semble donc que pour le moment la situation laisse à la fois aux autorités et aux habitants le temps de se préparer correctement à l'éventuelle arrivée de la lave dans Pahoa.

La coulée de lave du volcan Kilauea, proche des villages de Kahoe Homesteads et Pahoa, 24 septembre 2014
La zone des coulées et les traces d'incendie de broussailles, photographiés le 24 septembre. Image: HVO/USGS
Un chercheur en Géographie Economique à l'Université d'Hilo a tenté d'estimer l'impact qu'aurait l'éruption sur le district de Lower Puna ("Puna bas"), où se trouvent Kahoe Homestead et Pahoa entre autres, en particulier si la coulée coupe l'autoroute 130.
D'après ses simulations l'isolement des habitants de la pointe sud-est de l'île, qui serait la conséquence directe de la disparition de cette route, mettrait en péril 257 entreprises (services, agriculture, carrières, bâtiment etc), et par là même 1200 emploi au moins.
Le chercheur souligne que, malgré la construction de deux routes alternatives, la situation économique sera dégradée car, sans l'autoroute 130, le flux de circulation des biens et services sera moins important. Dans le cas de figure ou la lave va jusqu'à l'Océan, et coupe donc toutes les routes qui relient Lower Puna au nord de l'île, même la seconde route, dont la réouverture a débuté mardi, ne sera pas une alternative économiquement viable. Connue sous le nom de Chain of Crater Road ("La route des cratères alignés") il s'agit en fait de la portion de la route 130 qui longe la côte sud de l'île. Problème: elle a été engloutie par les coulées descendues du Kilauea et constitue de toutes manières une voie extrêmement longue pour rejoindre les centres urbains importants de l'île.
L'isolement aura donc pour conséquence de rendre l'énergie et les aliments plus chers, car plus difficiles à acheminer.

Au delà de ces projections, l'éruption a déjà des conséquences concrètes: au moins une école privée de Pahoa a définitivement fermé ses portes et une autre les à closent au moins temporairement, le temps de trouver un emplacement plus sûr, ce qui entrainera sa fermeture définitive.

Bref: souhaitons que la coulée coulée n'aille pas plus loin.

Sources: HVO/USGS; Hawaï Tribune Herald


Mayon, Philippines, 2462 m

Peu après la mise en alerte niveau 3 et l'évacuation de plusieurs dizaines de milliers de personnes l'activité sismique s'est atténuée, tout comme l'activité superficielle. Il n'y a en effet plus de mentions d'avalanches de blocs incandescents observés, même si quelques uns des signaux sismiques enregistrés par les volcanologues peuvent être reliés à ce type de phénomène. Les bulletins quotidiens du PHIVOLCS précisent même qu'il n'y a plus d'incandescence nocturne visible, et que la quantité de dioxyde de Soufre mesurée est redevenue assez faible (606 tonnes/jour aujourd'hui, contre 1048 tonnes/jour le 22 septembre). Lors d'un survol effectué le 23 septembre, le dôme a été photographié avec, à son pieds, les dépôts de blocs liés aux avalanches décrites au moment de la mise en alerte 3. Les volcanologues ont estimé son volume à un peu plus de 563 000 m3, et sa hauteur à 46m.



Toutefois, les données GPS continuent de montrer que l'édifice connait une inflation (gonflement), qui a débuté en août. Celle-ci est, pour les volcanologues Philippins, le signe qu'une masse de magma est en cours de mise en place, bien qu'elle se déplace très lentement.
Dans un article du quotidien Inquirer, un volcanologue Philippin compare la situation actuelle à celle de l'éruption de 1984, avant laquelle il y avait eu 2 semaines de "repos" au niveau des signes précurseurs, avant que l'activité, vulcanienne, ne se déclenche avec violence.

Ecoulement pyroclastique sur le volcan Mayon, 24 septembre 1984
24 septembre 1984: ds spectateurs regardent les écoulements pyroclastiques du Mayon (VEI 3). Les blocs de roche sur lesquels ils sont installés sont les dépôts de coulées de boue de 1814 (VEI4). Image:  Norm Banks, Smithsonian

Bien qu'il soit impossible de dire à l'avance ce qui va se produire, et qu'il ne faut donc surtout pas voir dans la photo ci-dessus (prise il y a quand même pile 30 ans!) une image de ce que sera le Mayon dans quelques jours ou semaines, il faut retenir ici avant tout le fait que ce qui inquiète probablement le plus les volcanologues sur place, c'est que le système volcanique soit fermé, bloqué, notamment par la présence du dôme.
En effet dans ce cas de figure le gaz contenu dans le magma neuf en cours d'ascension ne peut s'échapper correctement (ce qui peut expliquer la faible quantité de SO2 mesurée en ce moment) et participe à la montée en pression progressive du système (qui peut être une des causes de l'inflation constatée).
L'OCHA (Office for the Coordination of Humanitarian Affairs, partie des Nations Unies), indique que ce sont 11 338 familles, comptant pour environ 55 000 individus, qui ont été déplacées dans 50 centres d'accueils différents.
 Le niveau d'alerte 3 est bien sûr maintenu.

Sources: PHIVOLCS; OCHA; Inquirer

4 commentaires:

  1. Et il n'y a pas de potentiel de passer à VEI4 ?
    On compare à celle d'il y a 20 ans mais n'y-a-il pas de description par les "savants" de l'époque (1814) de l'état du Mayon avant son déchainement ?

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    1. Bonjour.
      On ne peut comparer que ce qui est comparable. En 1814, en Europe, la guerre d'idées entre Plutonistes et Neptunistes s'achève, et celle des "cratères de soulèvement" s'engage contre celle des "cratères d'accumulation". On est loin d'avoir une surveillance volcanique et l'érudition concernant la volcanologie n'est pas mondialisée. Il faut attendre les années 1840-1850 pour avoir le premier observatoire volcanologique (Vésuve) et la première surveillance géophysique sur ce même volcan (1851, avec Luigi Palmieri).
      Comment dès lors comparer les mesures géophysiques et observations modernes avec les descriptions de l'époque, sans forcément commettre des grosses approximations dans les conclusions que l'on peut en tirer?

      Quand à une VEI 4: rien n'est impossible, mais personne ne peut dire à priori quel sera le VEI d'une potentielle éruption en préparation, autre que par les statistiques. Or dans l'historique de ce volcan on a surtout des VEI de 1 à 3, très peu de 4 (2 seulement).

      Bonne journée :-)

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