Éruption numéro 4 au Piton de la Fournaise pour 2018! (mis à jour)

Depuis le début du mois de septembre les volcanologues de l'OVPF enregistraient des signaux indiquant une possible réalimentation du réservoir superficiel et précisaient dans leur rapport du 08 septembre qu'une telle réalimentation pourrait signifier une éruption a court terme. Leur scénario fut le bon puisqu'une cette éruption a démarré cette nuit, et elle démarre assez fort!

Ce n'est pas une éruption différente des précédentes: elle a démarré et se maintient actuellement tout à fait de la même manière que les autres.

Elle a commencé vers 04h30 (heure locale) d'après les webcams bien que le trémor ait commencé a être enregistré par les volcanologues à partir de 04h25 (heure locale). Le dyke (fissure pleine de magma) a fait émergence à la surface du volcan au pied du versant sud-sud-ouest du Dolomieu, en face du Piton de Bert (idéal pour suivre à la webcam) et en-dessous du Cratère Kata et Pélé (formé lors de l'incroyable éruption de septembre-octobre 2015). Le réseau de fractures éruptives semble long d'environ (estimation personnelle, à revoir probablement donc) 350 m et s'est ouvert en direction du sud.

Les images prisent par la webcam du Piton de Bert suggèrent qu'il y a au moins 3 fissures éruptives pour ce réseau,  organisées en échelon, c'est-à-dire parallèles mais légèrement décalées. Mais attention: c'est ce que je vois sur les images de la webcam et il faudra attendre les images prisent depuis le terrain ou les airs (ça tarde pas en général, surtout qu'il fait beau) pour avoir une vision plus concrète et réèlle de la situation.

Localisation du site de l'éruption et organisation en échelon des fractures éruptives. Image: OVPF/IPGP

L'activité est classique: sur la zone de fracture le magma jaillit sous pression et le gaz s'échappe avec vigueur projetant une partie du magma fluide en l'air sous la forme de fragments. Ces derniers retombent sur le sol, s'accumulent, et forment une série de nouveaux cônes, alignés sur les fractures.

L'autre partie du magma fluide parvient à s'échapper sans être fragmenté et comme il est fluide il peux (par définition) couler sur le sol, ce que l'on appelle "effusion de lave" ou "activité effusive". Une champ de nouvelles coulées de lave est donc en formation et ce qui m'a surpris cette fois c'est débit initial de cette effusion, visible important.

Les fronts de coulées les plus rapides, émis par les parties amont et aval de la zone fracturée, avaient déjà parcouru entre 1000 et 1500 m en l'espace de deux heures à peine, sortant du champ de vision de la webcam vers 06h36 TU, soit une vitesse moyenne de progression (estimation personnelle à nouveau, sortez les pincettes) d'environ 8 à 12.5 mètres par minute. Certes ça va plus lentement qu'une personne qui marche normalement (environ 60 m/minute), mais pour une coulée de lave elle file pas mal quand même! Les deux coulées principales partent directement vers le sud-est en sortant des fractures, puis semblent bifurquer vers l'est à l'approche des Grandes Pentes. Seule une coulée de lave moins alimentée est partie en direction du sud-ouest au départ de l'éruption mais elle a vite cessé d'être alimentée.

Les deux coulées principales, bien séparées au départ, semblent se rejoindre ou en tout cas se rapprocher fortement peu avant de quitter le champ de vision de la webcam .

Départ de l'éruption et développement du nouveau champ de lave

Une belle éruption qui a démarré donc, sous une météo pour le moment favorable: espérons que l'on pourra suivre dans le détail son évolution!

En tout cas la préfecture a placé l'Enclos Fouqué en alerte 2-2 du plan ORSEC "Volcan" avec les restrictions d'accès d'usage.

Mise à jour, 16 septembre, 21h26

L'activité éruptive se poursuit et, comme à l'accoutumée, le trémor a entamé sa décroissance  peu de temps après que l'éruption ait commencé. Sur le site de l'éruption même, l'activité explosive (fontaines de lave) reste soutenue sur un cône qui se construit à partir de trois des 6 ou 7 évents initialement actifs. Les images ont commencé à pleuvoir donc pas possible de suivre le rythme (le blog n'est malheureusement pas mon métier) mais voici une des belles séquences filmée, par drône, de la fracture éruptive et de l'accumulation de projections autour (ce qu'on appelle "cône").


L'activité reste globalement stable et le changement le plus notable aujourd'hui est le passage d'une effusion à l'origine des deux coulées de lave, à une effusion qui ne produit plus qu'un seul chenal de lave à partir du versant sud du cône en croissance, dont le cratère est égueulé. En l'occurence le chenal en question est l'un des deux qui est alimenté depuis le départ de l'éruption, à savoir le plus au sud.

Alors je m'avance peut-être un peu mais je pense que ce changement a eu lieu en cours de matinée car son pouvait voir sur les images prisent par la webcam du Piton de Bert entre (grosso modo) 03h00 TU et  05h30 TU la progression d'une coulée très très bien alimentée marquée, à son front, d'un dégazage important qui permettait, grâce à un éclairage à contre-jour, de suivre sa progression (plutôt rapide).

Nouveau front de coulée en progression, visible grâce à s on dégazage vu en contre-jour. image: OVPF/IPGP

Pour l'heure cette coulée n'a pas atteint les Grandes Pentes, qui descendent vers l'océan Indien.

Source: OVPF