Kirishima, Japon, 1700 m
Le Japan Meteorological Agency a décidé aujourd'hui d'élever le niveau d'alerte à trois pour une partie du massif volcanique de Kirishima, qui a connu une activité éruptive en mars de cette année. Toutefois le secteur concerné n'est pas celui où l'éruption a eu lieu (le cône appelé Shinmoedake) mais un autre secteur plus au nord-ouest: le site d'Ebino (ou Iwo, ou Io).
Depuis 2016 en effet les volcanologues du JMA ont publié une série de bulletins indiquant que, progressivement l'activité qui, sur ce site se manifeste par des fumerolles, change progressivement. La température des fumerolles, leur position et leur composition ont en effet changé ce qui avait, en 2016, provoqué le passage du site en alerte 1. Ce niveau d'alerte a été augmenté à 2 en février 2018 car depuis l'été 2017 la sismicité tend à augmenter, suggérant qu'un peu de magma se met en place et cause les diverses perturbations observées.
Dernière étape en date: des modifications assez importantes depuis le début du mois d'avril, en particulier l'apparition de nouvelles fumerolles, d'une marmite de boue et l’enregistrement de températures élevées au niveau des évents fumerolien. Mais surtout, de nouvelles bouches se sont ouvertes aujourd'hui 19 avril, par lequel un dégazage très intense et sous pression s'est manifesté. Un événement capturé par les webcams du JMA.
Vers 15h40 (heure locale) aujourd'hui une activité fumerolienne très intense a débuté sur un nouvel évent. Images: JMA, via Takano Tsubuyaki |
Les chaînes d'info ont évidemment relayé l'événement et, comme souvent, pu transmettre des images faites depuis des hélicoptères (je pense), ce qui permet de voir le débit du dégazage: très important, ce qui signifie de hautes pressions. La teinte légèrement jaunâtre du panache suggère la présence de composés soufrés en quantités importantes.
Il n'est pas impossible qu'une activité éruptive finisse par débuter mais le passage en alerte trois est avant tout, je pense, une mesure de sécurité, de prévention pour empêcher quiconque d'approcher ce site qui est très touristique.
Pour finir une image faite depuis un avion, où l'on voit les deux sites actifs du Kirishima: Ebino (premier plan) et Shinmoedake avec sa nouvelle galette encore fumante.
La situation est à suivre de près, évidemment.
Mise à jour, 24 avril, 06h26
Juste une petite précision apportée par des images prisent aujourd'hui: au niveau de l'un des évent il semble y avoir un jet de boue très chaude, qui est aussi la source d'une petite rivière de boue chaude qui descend maintenant du plateau d'Ebino. Elle emprunte, je pense, une petite ravine enjambée par la route d'accès au site.
Pour le moment donc il semble que l'activité reste soit hydrothermale, soit phréatique, la seconde solution étant visiblement plus proche de la réalité puisque les volcanologues soupçonnent la mise en place d'une poche de magma. L'éruption qui a créé le site où se déroule l'activité, un dôme-coulée appelé Io-yama, s'est produite en 1768.
Sources: JMA; Merci à Shérine France pour les liens vers les vidéos!; Ryusuke Imura
Nyamulagria, République Démocratique du Congo, 3058 m
Le MIROVA a éveillé les soupçons en détectant ces derniers jours des signaux thermiques intenses au sommet du Nyamulagira. Cela suggérait en effet que le magma était parvenu à faire éruption dans la zone sommitale, au niveau de la caldera.
C'est toutefois une image satellite SENTINEL 2, en fausses couleurs, prise le 18 avril qui montre qu'effectivement une activité éruptive est en cours: même si les nuages masquent la vue, l'intensité et la position de la source des rayonnements infrarouges ne laisse place à aucun doute: une éruption a bien commencé. Il reste toutefois à en connaitre les modalités: vu l'historique des éruptions, en particulier récentes, on peut supposer la mise ne place de coulées de lave au fond du Pit Crater formé suite à l'intense éruption de 2011. L'autre possibilité est l’installation d'un lac de lave: seules des images permettront de trancher!
Les bulletins de l'Observatoire de Goma indiquent que lors d'un posé par hélicoptère le 15 février des observations ont permis de constater un dégazage en hausse, ainsi que des mesures de potentiel électrique, suggérant une meilleure conductivité. Il s'agit-là peut-être de signes précurseurs mais il est difficile d'être certain sans des mesures de routine, très complexes à effectuer dans le secteur malheureusement.
La dernière éruption a eu lieu dans la caldera, au fond du Pit Crater, entre janvier et mai 2017.
La situation est à suivre en tout cas!
Sources: MIROVA; SENTINEL2-ESA/Copernicus; Observatoire Volcanologique de Goma
Pour finir une image faite depuis un avion, où l'on voit les deux sites actifs du Kirishima: Ebino (premier plan) et Shinmoedake avec sa nouvelle galette encore fumante.
L'intense dégazage sur le plateau d'Ebino au premier plan, et le dégazage plus discret sur le cône Shinmoedake au troisième plan. Image: auteur inconnu, via Ryusuke Imura |
La situation est à suivre de près, évidemment.
Mise à jour, 24 avril, 06h26
Juste une petite précision apportée par des images prisent aujourd'hui: au niveau de l'un des évent il semble y avoir un jet de boue très chaude, qui est aussi la source d'une petite rivière de boue chaude qui descend maintenant du plateau d'Ebino. Elle emprunte, je pense, une petite ravine enjambée par la route d'accès au site.
Le jet et la rivière de boue chaude qui prennent naissance sur l'un des nouveaux évents. Image: Ryusuke Imura |
Pour le moment donc il semble que l'activité reste soit hydrothermale, soit phréatique, la seconde solution étant visiblement plus proche de la réalité puisque les volcanologues soupçonnent la mise en place d'une poche de magma. L'éruption qui a créé le site où se déroule l'activité, un dôme-coulée appelé Io-yama, s'est produite en 1768.
Sources: JMA; Merci à Shérine France pour les liens vers les vidéos!; Ryusuke Imura
Nyamulagria, République Démocratique du Congo, 3058 m
Le MIROVA a éveillé les soupçons en détectant ces derniers jours des signaux thermiques intenses au sommet du Nyamulagira. Cela suggérait en effet que le magma était parvenu à faire éruption dans la zone sommitale, au niveau de la caldera.
Le signal thermique, assez intense pour fortement suggérer le départ d'une éruption. Image: MIROVA |
C'est toutefois une image satellite SENTINEL 2, en fausses couleurs, prise le 18 avril qui montre qu'effectivement une activité éruptive est en cours: même si les nuages masquent la vue, l'intensité et la position de la source des rayonnements infrarouges ne laisse place à aucun doute: une éruption a bien commencé. Il reste toutefois à en connaitre les modalités: vu l'historique des éruptions, en particulier récentes, on peut supposer la mise ne place de coulées de lave au fond du Pit Crater formé suite à l'intense éruption de 2011. L'autre possibilité est l’installation d'un lac de lave: seules des images permettront de trancher!
Très fort signal thermique dans la caldera sommitale: une éruption est en cours. Image: SENTINEL2/ESA/Copernicus |
Les bulletins de l'Observatoire de Goma indiquent que lors d'un posé par hélicoptère le 15 février des observations ont permis de constater un dégazage en hausse, ainsi que des mesures de potentiel électrique, suggérant une meilleure conductivité. Il s'agit-là peut-être de signes précurseurs mais il est difficile d'être certain sans des mesures de routine, très complexes à effectuer dans le secteur malheureusement.
La dernière éruption a eu lieu dans la caldera, au fond du Pit Crater, entre janvier et mai 2017.
La situation est à suivre en tout cas!
Sources: MIROVA; SENTINEL2-ESA/Copernicus; Observatoire Volcanologique de Goma
Bonjour à tous...
RépondreSupprimerC'est curieux cette éruption sur plusieurs sites au Kirishima.... C'est une caldera ce complexe volcanique ? Parce que ça fait un peu penser à Rabaul, et c'est pas très rassurant, ça voudrait dire que la chambre magmatique principale a été realimentée, et qu'une activité plinienne sur plusieurs sites est possible....
La zone abrite plusieurs caldeiras géantes, dont l'Aso San, le Kikaï, et surtout la superstar, le Sakura jima,qui est le cône post-effondrement d'une énorme structure, la caldera d'Aïra. Est-ce que le complexe de Kirishima fait partie du même groupe ?
Bonne journée à tous. Alcide
Bonjour Alcide. C'est curieux oui et non: on apprend à l'école qu'une éruption se déroule au sommet d'un volcan, que la chambre magmatique est en dessous du sommet, que la cheminée est rectiligne etc.. c'est toujours dessiné comme ça et c'est une représentation qui reste en toile de fond, dans l'inconscient.
SupprimerIl se trouve que le système magmatique du Kirishima est (comme tous les systèmes magmatiques) visiblement complexe. Sur la base d'analyses de la résistivité et de l'analyse de données magnétotelluriques (les Japonais adorent), une équipe de chercheurs a, dans un article publié en janvier 2014, proposé un schéma de ce système magmatique, au moins sa partie superficielle, car les parties profondes restent, souvent, très peu accessibles et floues. La poche de magma qui est la plus proche de la surface se trouve vers 15 km et serait composée d'Andésite basique: c'est de là que partent (à priori) toutes les éruptions historiques, que ce soit au niveau du dôme-coulée d'Iwo (sur le plateau d'Ebino où se déroule la crise de ces derniers jours) au Shinmoe-dake ou sur le cône Ohachi. Cette poche se trouve sous l’extrémité nord-ouest du massif volcanique: le dôme-coulée d'Iwo est le plus proche point de sortie! Mais il semble que le magma ait beaucoup plus de facilité à sortir au Shinmoe-dake: les volcanologues ont identifié une voie privilégiée qui passe sous Iwo et, via une trajectoire courbe, arrive sous Shinmoe-Dake. Cette voie privilégiée pourrait être composée soit de fluides hydrothermaux à très haute température (+ de 400°C), soit des dykes et/ou sills de magmas partiellement fondus. LA trajectoire courbe est interprétée comme le résultat de la présence , en la chambre profonde et Shimoe-dake, d'une zone plus résistante, plus difficile à fracturer, qui agirait comme un "déviateur". Il pourrait s’agir d'une chambre magmatique plus ancienne, solidifiée.
Les trois zones actives du massif (Iwo, Shinmoe-dake et Ohachi) étant alimentées par la même chambre (à 15km de profondeur), il n'est pas impossible que les modifications de l'activité constatées à Iwo depuis 2016 soient le fruits de mouvements magmatiques qui ont, in fine, conduit à l'éruption au Shinmoe-dake cette année (hypothèse personnelle, rien de plus). Le pic d'activité (pour l'heure hydrothermale à ce qu'il semble) actuelle à Iwo pourrait aussi être une conséquence de ces intrusions magmatiques. La question est: une partie du magma qui a fait éruption au Shinmoe-Dake, est-elle ou non en train de faire son chemin vers la surface à Iwo? Deux zones de déformations importantes (15 cm!) ont été observées sur le dôme-coulée d'Iwo ces derniers jours: mais sont-elle dues à des mouvements de fluides qui, en s'approchant de la surface se dépressurisent et augmentent de volume? Ou est-ce le résultat d'intrusions magmatiques? Pour l'heure pas de réponse claire: la situation reste surveillée de près par le Japan Meteorological Agency.
Bonne soirée :)
Merci beaucoup. Géniale explication... Et, wow, je pensais pas que le magma pouvait emprunter des trajectoires courbes bizarres ou etre dévié par certains elements de topographie souterraine..... Je pensais qu'une fois en ascension, s'il n'y avait pas de larges fractures à remplir qui allait guider tout ça (je pense à Holuhraun), c'était effet chalumeau, et ça fondait ou craquait tout ce qui était au dessus jusqu'à exploser en surface. Plus la résistance était grande, plus la pression montait, et plus l'éruption avait un départ rapide et violent.
RépondreSupprimerMerci pour tout!
En tout cas pour l'Ebino, s'il y a des fluides et des gaz qui sortent d'un dome coulée, c'est qu'il y a un chemin perméable. Mon petit doigt me dit que tout va commencer par une éruption phréatomagmatique bien cendreuse, puis des galettes ou nouveaux domes coulées vont se metre en place accompagnées d'explosions vulcaniennes.
Sinon, dans un autre registre.... Avez vous vu ce qui s'est passé au Kamchatka réçemment.... Un volcan dont personne n'avait entendu parler, le Zheltovsky, a produit une éruption ultra-violente et ultra-brève, qui est montée à 14km et n'a même pas durée une heure.... Bizarre..
http://www.earth-of-fire.com/2018/04/activite-du-zheltovsky-du-khangar-du-sabancaya-et-de-l-ywo-yama.html
PS1: il s'en passe des trucs au Japon, et celui-là non plus je le sens pas...
http://www.earth-of-fire.com/2018/04/activity-of-kusatsu-shiranesan-nevados-of-chillan-and-kilauea.html
Bonjour.
SupprimerLe KVERT a effectivement publié une série de rapports concernant non pas un mais deux volcans de la péninsules dont personne n'a jamais entendu parler: Zheltovsky et Kanghar, volcans actifs situés respectivement au sud et au centre-ouest de la péninsule. Les bulletins décrivent des explosions très puissantes, de très grandes quantités de cendres et des signaux thermiques puis le retour au calme rapide. Ce dernier point doit mettre la puce à l'oreille: il est rare que des émissions de cendres cessent très rapidement. Par ailleurs il faut tout de suite prendre du recul lorsque deux volcans inconnus et proches sont décrits en même temps en éruption. Mais bon ce qui est surtout noté sur les rapports (en gros mais tout en bas), c'est qu'il s'agit d'exercices, rien de réèl :). Aucune éruption récente sur ces deux édifices.
Pour Kusatsu-Shirane (celui qui a fait parler de lui en janvier avec des explosions à proximité de stations de ski), j'ai fait passer l'info hier via twitter: pour le moment j'attends de voir ce qu'il se passe pour faire un point: la sismicité est en hausse et il y a une légère déformation ce qui a justifié le passage en alerte 2 mais bon: il faut attendre, la crise ne pouvant être que passagère.
Bonne journée en tout cas.
héhé.... j'ai pas été le seul à m'être fait prendre!!!
RépondreSupprimerBien vu pour l'exercice ;)