Feu d'artifice au Piton de la Fournaise pour le 14 juillet (Mis à jour)

Après l'éruption ratée du mois de mai, les paramètres géophysiques (déformation, sismicité) et géochimiques  (composition des gaz) étaient progressivement revenus à la normale. Mais depuis quelques jours le nombre de secousses volcano-tectoniques a montré une tendance nette à la hausse, incitant à la vigilance.

Au soir du 13 juillet, tout s'accélère, comme souvent au Piton. La sismicité sous le Dolomieu monte en flèche, ainsi que la déformation, signe que le magma quitte sa zone de stockage ("chambre") superficielle pour entamer sa remontée vers la surface. A ce stade les conditions sont réunies pour que le Préfet de la Réunion déclenche l'alerte 1 du plan ORSEC Volcan, qui s'accompagne de mesures de préventions simples: interdiction d'accéder à l'intérieur de l'Enclos, par quelque moyen que ce soit.

Sismicité précurseur, sour le Dolimieu. Image: OVPF-IPGP

Mais c'est en plein milieu de la nuit, vers 00h50 (heure locale) que le magma a commencé à sortir, à ce qu'il semble plutôt vers la base du versant sud du Dolomieu. La Préfecture a déclenché au même moment l'alerte 2-2 du plan ORSEC "volcan", parlant dans son communiqué de l'apparition du "trésor éruptif" à la place de "trémor": voilà une très appropriée faute de frappe :). La visibilité au départ de l'éruption n'est pas très bonne à cause de quelques nuages bas, et, en pleine nuit, la localisation précise n'est pas tellement évidente. L'activité, comme à l'accoutumée, se déroule le long d'une fracture éruptive avec fontaines de lave

La fissure et ses fontaines de lave, masquées par quelques nuages malvenus; belle ambiance tout de même. Image: OVPF-IPGP/Piton de Bert

L'éruption vue depuis le nord-ouest. On devine le bas du Dolomieu à gauche de l'éruption. Image: OVPF-IPGP/Piton Basaltes

Au petit matin la situation est plus claire et apparait dans toute sa beauté. La fracture éruptive s'est ouverte au pied du versant sud-est du Dolomieu, à ce qu'il semble à quelques centaines de mètres plus à l'ouest du Chateau-Fort (éruption de 1948). Elle semble relativement longue, de l'ordre de 200 m, valeur qui sera très certainement précisée, voire corrigée, dans le prochain bulletin de l'Observatoire. Elle est orientée plutôt du nord-ouest au sud-est et c'est depuis son extrémité sud-est que s'échappent les coulées de lave, qui progressent rapidement: à peine 5 heures après le départ de l'éruption, le front le plus avancé mesurait déjà environ 1000m, voire un peu plus.

La fracture éruptive, ses fontaines de lave et le champ de lave en cours de formation. Image: OVPF/IPGP

Dès mon retour du travail ce soir, un peu tard, je ferais une mise à jour de la situation car je ne doute pas que les images auront commencé à pleuvoir.

Mise à jour, 21h44

La situation est restée stable tout au long de la journée. Le trémor a diminué après le départ de l'éruption, ce qui est assez classique, et est resté stable par la suite. La fissure éruptive est bien située à l'ouest de Château-Fort mais sa longueur a bien été précisée par l'OVPF: environ 450m d'après les volcanologues qui ont pu se rendre sur place.

Localisation précise du site de l'éruption, avec la fissure orientée nord-ouest/sud-est. Image: OVPF/IPGP

Des multiples fontaines de lave présentes au début de l'éruption, il ne semble en rester cette nuit que très peu, 3 ou peut-être 4, surtout situées dans le tiers aval de la fissure. L'une d'entre elle semble prendre progressivement le dessus cette nuit: sa hauteur a augmenté de manière significative ces dernières heures, mais il faudra attendre pour voir si cette situation s'accentue ou non.

Comparaison d'images: matin en haut, soir en bas; on voit bien les changements d'activité sur la fissure. Images: OVPF/IPGP

Difficile d'estimer la longueur des coulées puisque:
- leur front sort du champ de vision de la webcam
- les nuages ont masqué la vue toute la journée

Toutefois les données prisent aujourd'hui par l'instrument VIIRS du Suomi NPP suggèrent que le front le plus avancé pourrait approcher les 3000m de long, et se trouver non loin du Gros Bénard (éruption de 1972). C'est aussi une donnée qu'il sera bon de préciser.

En attendant le spectacle a été à la hauteur: l'ambiance est, comme à chaque fois, merveilleuse.

Le rideau de fontaines de lave et les coulées n arrière plan..et un petit rayon de lumière dans le panache bleuté des gaz volcaniques. Image: Imaz Press

Les autres images sont à voir ici.

Sources: OVPF-IPGP; Piton de Bert; et encore merci à Olivier Dupéré pour sa vigilance :); Imaz Press; Suomi NPP