Première éruption historique sur le Kambalny!

C'est la belle surprise du week-end: une éruption explosive intense a démarré aujourd'hui sur un stratovolcan du sud du Kamchatka, nommé Kambalny, qui n'avait pas connu d'activité éruptive depuis 1350 (environ) d'après le Global Volcanism Program. Il s'agit de la première éruption historique observée sur cet édifice, la plus récente (14ème siècle à peu près) n'ayant été daté que par Carbone 14.

Les données satellites, et les observations réalisées sur place indiquent qu'une activité explosive très soutenue a démarré, visiblement avec très peu de signes précurseurs clairs* le 24 mars à partir de 22h30 TU environ, soit le 25 mars vers 10h30 heure locale. La hauteur du panache a été estimée à 5-6000 m. Les premiers signes tangibles ont été détectés ver 09h50 heure locale.

Le panache de cendres observé par le MODIS en milieu de journée, quelques heures après que l'activité a commencé. Image: MODIS/NASA

Il est important de noter que l'émission de cendres se déroule sans grande violence, c'est-à-dire qu'elle n'injecte dans l'atmosphère qu'une quantité, certes importante mais pas exceptionnelle, de cendres contrairement, par exemple, à l'activité explosive très violente du Kelud en février 2014, ou du Sangeang Api en mai 2014.

En conséquence, au lieu de former une imposante colonne de cendres dont le sommet finit par s'emplafonner sur la tropopause et s'étaler, l'activité a généré un panache de cendres avec une inertie suffisamment faible pour que le vent le rabatte simultanément à sa formation. Du coup, dès son apparition il a été emporté vers le sud et continue à l'heure actuelle de s'étirer. Il atteint maintenant de plus de 750 km!

Progression du panache de cendres entre sa formation et 16hTU. Images: Himawari 8

L'un des agents du Parc Naturel était sur l'édifice pour observer l'activité aujourd'hui: il est clair que même si l'activité est plutôt intense, elle génère essentiellement des cendres, et peu ou pas de chutes de blocs. Les images ne montrent pas d'écoulements pyroclastiques.

Le réseau de satellites MetOp (ESA/Eumetsat) a pu détecter une quantité de soufre injecté dans l'atmosphère importante, signe supplémentaire (en plus de l'intensité de l'événement) que l'activité est bien magmatique ou phréatomagmatique.

La présence de grandes quantités de soufre a été détectée par les satellites du réseau MetOp. Image: SACS/ESA

La question de potentiels risques liés à cette activité concerne principalement deux cibles distinctes:

- comme pour toute éruption explosive assez intense, l'aviation est directement concernée, raison pour laquelle le niveau d'alerte aviation a été élevé à l'orange (et jamais au rouge pour le moment) 

- l'écosystème locale et en particulier les rivières, qui accueillent les plus importantes populations de Saumons d'Eurasie, qui les remontent pour leur frai. Or ils constituent une réserve de nourriture essentielle pour les Ours Bruns qui peuplent ce secteur, déclaré Sanctuaire en 1983.

La situation sera donc surveillée de près, entre autre pour mesurer les modifications de l'écosytème actuellement en place sous l'effet de cette activité.

* pas sûr que l'édifice en question soit doté d'un réseau de surveillance ... Les signes précurseurs qui auraient pu éventuellement être détectés auraient pu être visuels (mis en place d'un dégazage par exemple), voire sismique si certaines de secousses aveint été assez fortes pour être ressenties, ce quoi n'est pas fréquent.

Sources: KVERT; VAAC de Tokyo; SACS/ESA; Himawari 8; Alexander Solodikov