Suite au post publié le 22 janvier dernier, il semblait évident qu'il fallait garder un oeil sur la situation, autant que faire se peut lorsqu'on est pas sur place bien entendu!
Et il est clair que depuis ce moment-là l'activité éruptive est devenue totalement incroyable.
Tout d'abord la phase d’effondrement qui a débuté le 21 et s'est poursuivie plusieurs jours a été vraiment intense, avec la formation de panache de cendres, pas vraiment immenses, mais visibles sur certaines image satellites (ce que je n'avais encore jamais vu depuis que je fait des actus, soit 2003), signe que l'événement était important.
Panache de cendres vu depuis l'espace le 26 janvier 2017. Image: MODIS/NASA |
Toutefois on ne peut se rendre compte de cette activité d'émission de cendres qu'avec des vidéos (les images satellites, c'est super, mais bon: il y a quelques limites aussi :) ). Et là je dois très chaleureusement remercier Mme Valerie Blondin, qui rentre tout juste d'un voyage sur place et qui a pu filmer la formation des panaches de cendres au cours des premières heures de l'effondrement du Pit Crater Sud (celui qui a le lac de lave permanent): c'est tout simplement impressionnant! Et ce d'autant plus qu'il s'agit d'un phénomène très inhabituel sur cet édifice.
Maintenant je dois m'excuser auprès d'Olivier Grunewald, qui m'avait fait passer des infos incroyables directement depuis la zone: je ne les aient pas comprises correctement!
Il m'indiquait en effet qu'un très important champ de coulées était en place au sud de la caldera. Or ce que j'en ais compris, bougre d'âne que je suis, c'était que la partie sud de la caldera, dans laquelle se trouve le Pit Crater et le lac de lave, était recouvert par de nouvelles coulées, que j'ai pensées issues d'un nouveau débordement de gros volume!
Mais pas du tout! Olivier me décrivait alors la mise en place d'un champ de lave bien plus loin: une éruption fissurale, qui a commencé le 21 janvier, à partir de 17h (heure locale), décrit-il. Autant dire un événement extraordinaire de par la (relativement) faible fréquence à laquelle il se produit.
Certains voyages étant terminés les photos et vidéos ne vont pas tarder à pleuvoir sur la toile, et je vous en ferais part d'une sélection bien sûr, mais dores et déjà les satellites permettent d'avoir des détails concrets, et complémentaires, de ce qui a pu être observé sur place.
Tout d'abord la partie amont de la fissure s'est ouverte à environ 2 km au sud du lac de lave et on peut distinguer au moins trois points de sortie (évents).
Elle s'est ouverte en direction du sud-est à une altitude d'environ 480 m pour sa partie amont (valeur à affiner mais c'est ce que donnent les images satellites), soit à une centaine de mètres sous le niveau du Pit Crater Sud. Olivier Grunewald m'a aussi indiqué avoir observé une effusion plutôt passive, sans vraies fontaines de lave (détail qui a son importance je pense).
Elle s'est ouverte en direction du sud-est à une altitude d'environ 480 m pour sa partie amont (valeur à affiner mais c'est ce que donnent les images satellites), soit à une centaine de mètres sous le niveau du Pit Crater Sud. Olivier Grunewald m'a aussi indiqué avoir observé une effusion plutôt passive, sans vraies fontaines de lave (détail qui a son importance je pense).
Le fait que la fracture se trouve à une centaine de mètres d'altitude de moins que le niveau du lac de lave a son importance lorsqu'on le compare à ce qu'un lecteur, Photo-Fab de son pseudo (que je remercie d'ailleurs), précisait dans le post précédent. Il indiquait, je le cite:" Le lac [de lave, NDLR] est à 80-100 m de la surface, le cratère nord est effondré a 70% environ. Les approches étaient périlleuses".
Or il n'y a que très peu de chances que le lac de lave se retrouve à un niveau 80-100 m plus bas, et que la fracture soit aussi à une altitude d'environ 100m en dessous de celle du lac. Très probablement la fracture a tout simplement vidangé le lac via un dyke et, selon le principe de Pascal (Hydrostatique), le niveau du lac s'est stabilisé à l'altitude de ladite fracture. Le drainage brutal du lac est responsable de l'importante phase d'effondrements que je vous ait décrite dans le post précédent, et dont les panaches de cendres de la vidéo ci-dessus en sont l'expression la plus impressionnante.
Bon j'ai préparé un peu comme je pouvais (et avec mes talents exceptionnels de dessinateur bien sûr) un schéma de la situation.
Schéma de la situation: le lac de lave a été drainé le 21 janvier lors de la mise ne place d'un dyke, qui est arrivé à la surface 2 km a sud. Image: Culture volcan |
Reste toutefois la question du mécanisme global responsable de cette évolution. Car deux possibilités s'offrent en effet:
- soit c'est la seule pression exercée par la colonne de magma sur les parois du conduit qui a provoqué la fracturation, la mise en place du dyke et l'éruption fissurale.
- soit la région connait un épisode de rifting, avec des contraintes en extension (ouverture) qui ont facilité la fracturation, et permet au lac de lave de se vidanger dans une fracture, formant un dyke et l'éruption fissurale.
Pour le coup difficile de répondre et d'autres données satellites seraient nécessaires (mesures radar) pour tenter d'y voir plus clair sur ce qui a précédé ces événements, depuis 2015 et même avant.
En tout cas l'image satellite qui permet d'avoir ces détails sur la position de la fracture éruptive etc, a été réalisée à partir des données produites le 26 janvier par le satellite LANDSAT 8. En utilisant 3 canaux dont deux pour deux longueurs d'onde infrarouge distinctes, on peut nettement voir les trois sources, mais aussi les nouvelles coulées de lave...Et donc en faire une cartographie préliminaire.
La fracture a produit en réalité deux champs de lave bien distincts, que je vais nommer ici "nord" et "sud", tout simplement.
Le champ nord a été produit par deux évents, et est structuré en deux branches:
- une importante en direction du nord-est, qui mesure environ 3 km de long
- une plus modeste, en direction de l'ouest-sud-ouest, dont le front se trouvait le 26 janvier à environ 1300 m du point de sortie (toujours à vol d'oiseau).
Le champ sud quand à lui a été formé par la pointe sud de la fracture éruptive. Il s'agit en fait d'une coulée qui s'est mise en place sur une longueur d'environ 1600 m en direction du sud.
La surface occupée par le champ de lave nord le 26 janvier, soit après 5 jours d'effusion est estimée, toujours grâce à l'imagerie satellitaire, à 1.5km² (1 500 000m²).
Le champ de lave sud, quand à lui, occupe une surface estimée à 0.35 km² (350 000 m²) environ.
Voilà une cartographie qui montre les limites des deux champs de lave, la position des pits craters et de la fracture éruptive avec ses trois évents.
La fracture a produit en réalité deux champs de lave bien distincts, que je vais nommer ici "nord" et "sud", tout simplement.
Le champ nord a été produit par deux évents, et est structuré en deux branches:
- une importante en direction du nord-est, qui mesure environ 3 km de long
- une plus modeste, en direction de l'ouest-sud-ouest, dont le front se trouvait le 26 janvier à environ 1300 m du point de sortie (toujours à vol d'oiseau).
Le champ sud quand à lui a été formé par la pointe sud de la fracture éruptive. Il s'agit en fait d'une coulée qui s'est mise en place sur une longueur d'environ 1600 m en direction du sud.
La surface occupée par le champ de lave nord le 26 janvier, soit après 5 jours d'effusion est estimée, toujours grâce à l'imagerie satellitaire, à 1.5km² (1 500 000m²).
Le champ de lave sud, quand à lui, occupe une surface estimée à 0.35 km² (350 000 m²) environ.
Voilà une cartographie qui montre les limites des deux champs de lave, la position des pits craters et de la fracture éruptive avec ses trois évents.
Je suis comme un gosse maintenant: j'attends avec impatience de voir quelques photos pour rendre cette situation plus concrète et visualiser ces nouvelles coulées. J'ai aussi hâte de savoir comment la morphologie des Pit Crater Nord et Sud a été transformée, car les changements ont été importants et spectaculaires.
La seule ombre au tableau: le lac de lave va certainement mette pas mal de temps pour remonter à un niveau qui permettra de l'observer facilement. Et l'approche du Pit Crater qui contient visiblement toujours le lac de lave (qui ne doit pas être très visible je suppose) va être pour un bon moment d'une extrême dangerosité, le temps que les bords finissent de s'effondrer et se stabilisent.
La seule ombre au tableau: le lac de lave va certainement mette pas mal de temps pour remonter à un niveau qui permettra de l'observer facilement. Et l'approche du Pit Crater qui contient visiblement toujours le lac de lave (qui ne doit pas être très visible je suppose) va être pour un bon moment d'une extrême dangerosité, le temps que les bords finissent de s'effondrer et se stabilisent.
Sources: un grand merci à nouveau à Mme Valérie Blondin; un autre pour Olivier Grunewald; Un troisième pour Photo-Fab; MODIS/NASA; LANDSAT 8 - NASA/USGS
En regardant les photos sur mon apareil j'ai peut être été un peu gourmand sur l'effondrement de 70% du pit nord. Quand nous y étions il y avait des petits effondrements toutes les 10 minutes.
RépondreSupprimerPour le sud nous avons du avancer sur des laves "fraîches" qui devaient dater de 2-3 jours, bcp de dégazage, il a fallu faire le tour du cratère et nous avons pu l'observer depuis le côté ou se trouve l'ornithoau sud du pit sud. Lac très bouillonnant.
On devait y aller chacun notre tour pour éviter les éboulement car le bord est extrêmement fragile.
Les champs de laves étaient effectivement hors caldeira.
Une équipe de TF1 était avec nous et a survolé le champ avec un drone! Image exceptionnelle mais que nous aurons le plaisir de voir dans 7a8 que cet ete!
Fabrice a eu une sacrée chance d'être sur place au bon moment avec Aventure et Volcans. D'après le responsable du service volcanologique d'Addis Ababa, les coulées ont atteint les 50 km/h!
RépondreSupprimereffectivement beaucoup de chances. Guy y a été pour beaucoup dans le timing.
RépondreSupprimerCulture Volcan, c'est quoi ton mail?