Dans un post récent je précisais qu'une activité éruptive avait été détectée via satellite, mais qu'elle était malgré tout passée inaperçue. Bon, il se trouve que les données satellites plus récentes indiquent qu'elle se poursuit..ou qu'une nouvelle phase a débuté et ait en cours.
Tout d'abord les données du MIROVA, qui exploite les données transmises par les satellites MODIS, montrent bien que le groupe de signaux thermiques qui a débuté fin juin s'est interrompu fin août, pendant presque un mois, pour ne reprendre que vers la fin septembre. Le MODVOLC n'a détecté qu'un très faible signal le 09 septembre mais à part ça "silence radio" du côté du rayonnement infrarouge.
Cette disparition momentanée peut avoir au moins quatre explications:
- l'activité s'est effectivement arrêtée, ou...
- ...l'activité a diminué et s'est déroulée plus profondément dans le cratère (tout petit) du Mawson Peak*, ou...
- ...la couverture nuageuse a été trop importante pendant 1 mois, ou...
- ....il y a eu un problème technique et les données MODIS n'ont pu être récupérées ou traitées.
Bon: en regardant les données du MODIS on voit qu'au cours de la période, il y a quelques jours ou il y a peu ou pas de nuages: exit la solution 3. Par ailleurs il n'y a pas eu de message d'erreurs en provenance du MODIS ou du MIROVA: exit solution 4.
Restent les solutions 1 et 2, mais rien ne permet de trancher.
Quoi qu'il en soit ces signaux thermiques réapparaissent sur les données à partir de fin septembre et, depuis lors, elles sont fréquentes et plutôt intenses. C'est le signe qu'une activité éruptive est:
- soit revenue,
- soit a retrouvé de la vigueur et est remontée proche de la surface
Retour des signaux thermiques, fréquents et assez intenses, sur Heard Island après une période d'absence. Image: MIROVA |
Cette activité est bien visible sur les données satellites, en particulier celles du réseau Sentinel 2 de l'ESA. Les deux compositions colorées** ci-dessous ont été réalisées à partir de trois longueurs d'ondes ("couleurs") différentes:
- l'infrarouge proche (bande 8 à 842 nm), à laquelle j'ai associé la couleur rouge
- le vert (bande 3 à 560 nm), à laquelle j'ai associé la couleur verte
- le bleu (bande 2 à 490 nm), à laquelle j'ai associé la couleur bleu
Les données utilisées ont été récoltées les 11 et 18 octobre. Sur la première, la couverture nuageuse empêche d'avoir des détails sur l'activité en cours: elle permet juste de confirmer sa présence. Par contre, sur la seconde on peut noter qu'il y a deux sources distinctes de signaux thermiques:
- l'une se trouve au niveau du Mawson Peak
- l'autre est légèrement en dehors, sur le haut versant ouest. Il pourrait s'agir d'une courte coulée de lave. Malgré la bonne résolution de l'image, il est difficile d'être certain mais j'ai du mal a imaginer une autre explication pour le moment. Par ailleurs, si vous regardez attentivement dans l'ombre portée du Mawson Peak, là où se trouve la potentielle coulée justement, vous verrez une ligne droite qui descend depuis la coulée jusqu'en contrebas: il pourrait s'agir d'un mélange particules de lave et eau ("eau sale"), due à la fonte de la glace sous la chaleur de la coulée.
L'éruption se poursuit (ou a repris) donc sur Heard Island en ce mois d'octobre et, par ailleurs, elle semble être effusive. Il peut s'agir d'une activité strombolienne classique dans le cratère, avec une petite coulée qui déborde. Il peut aussi s'agir d'une activité plus calme, type lac de lave, dont une partie est parvenue à sortir hors du cratère et forme une courte coulée. L'absence de dépôts de cendres visibles sur l'image de droite, qui n'auraient pas manqué de tâcher la couverture de neige et glace, indique que si activité explosive il y a, elle est faible.
La situation est à suivre, évidemment.
Sources: MIROVA; Sentinel 2/ESA-Copernicus
La situation est à suivre, évidemment.
Sources: MIROVA; Sentinel 2/ESA-Copernicus
* la morphologie du cratère influence la manière dont les signaux thermiques sont émis. Un cratère large, très ouvert, peu profond (en forme d’assiette à soupe, en gros) permet aux signaux thermique produits de s'échapper largement et facilite leur détection. A l'inverse, un cratère étroit, profond (en forme de cornet de glace, disons) bloque l'émission vers l'espace des rayonnements: ils sont moins facilement détectés.
** le vrai nom des images satellites
bjr y aurait il pas une similitude avec le Klyuchevskoy (dégazage au sommet et coulée sur le flan?
RépondreSupprimerBonjour Dom 67. Difficile à dire sans images plus détaillées. J'ai l'impression de quelques chose d'un peu plus proche de ce qu'il se passe au Villarrica, mais avec (peut-être) une fuite hors du cratère, éventuellement par un évent latéral comme au Klyuchevskoy effectivement...encore faudrait-il etre sur qu'il y a bien une coulée :)
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