23 mai 2016

Un point sur l'activité des volcans Bristol Island, Fuego (màj), Nevado del Ruiz, Awu et Santamaria-Santiaguito

Bristol Island, Royaume-Uni, 1100m

L'activité sur cette île-volcan antarctique se poursuit. Une image prise le 17 mai par le satellite LANDSAT 8, créée à partir de données de ses instruments OLI (détections des longueurs d'onde visibles et proche infrarouge) et TIRS (infrarouge thermique), permettait de constater la présence d'un signal thermique fort au niveau du cône Sourabaya. Assez intense pour traverser la couche de nuages
qui couvrait la zone ce jour-là.

Le signal thermique repéré le 17 mai. Image: LANDSAT 8OLI-TIRS / USGS

L'activité se poursuivait aussi les jours suivants puisque le satellite Suomi NPP a lui aussi repéré les signaux thermiques. Les données du MODIS quand à elles ont permis de voir le panache produit par cette activité, en particulier sur les images en fausses couleurs

Signaux thermiques et panache de gaz produits par l'éruption en cours. Image: MODIS/NASA

En trois mots: l'éruption continue.

Sources: LANDSAT 8/USGS; MODIS & Suomi NPP/NASA

Fuego, Guatemala, 3763 m

L'activité est restée plutôt normale suite à l'écoulement pyroclastique du 18 mai dernier. Au sommet le magma est émis sous la forme d'explosions stromboliennes dont l'intensité est restée dans la gamme de ce qui est observé habituellement. Mais depuis le 21 mai une partie de ce magma est de nouveau émis sous la forme d'une coulée de lave. Elle mesure actuellement environ 300m de long d'après l'INSIVUMEH et descend sur le haut versant sud-est, en direction de la ravine Las Lajas.

La nouvelle coulée de lave, similaires à celles qui se sont formées avant les paroxysmes précédents. Image: USAID/Michigan Tech/INSIVUMEH

Cette activité a progressivement augmenté au cours de la journée du 22 mai, jusqu'à produire une nouvelle phase paroxysmale, marquée par le passage de l'activité strombolienne classique (explosions séparées) par une activité proche de la fontaine de lave au sommet du volcan. L’effusion de son côté se poursuit et la coulée dépasse maintenant les 1000 m de long.

 La fontaine et la coulée de ce nouveau paroxysme. Image: USAID/Michigan Tech/INSIVUMEH

Mise à jour 24 mai, 06

La phase paroxysmale de l'activité est terminée: l'activité de fontaine de lave a disparu. Par contre la coulée reste alimentée pour le moment, et bien visible sur la webcam qui observe le versant sud-est. Elle mesure environ 1500 m de long mais devrait cessé d'être alimentée assez rapidement, d'après l'INSIVUMEH.

LA coulée de lave produite pendant la phase paroxysmale est toujours présente cette nuit. Image: USAID/Michigan Tech/INSIVUMEH

Source: Michigan Tech/INSIVUMEH/USAID

Nevado del Ruiz, Colombie, 5279m

Le système volcanique du Nevado del Ruiz reste instable mais la sismicité liée à la circulation des fluides à l'intérieur du système diminue progressivement depuis au moins fin avril, peut-être avant. C'est en tout cas ce que constatent les volcanologues du SGC (Service Géologique Colombien). Toutefois l'activité en surface reste importante dans le sen où un dégazage important maintient un panache qui dépasse fréquemment les 1500 m de hauteur.
Et malgré une sismicité un peu moins importante, ce panache peut être toujours interrompu par des émissions plus ou moins importantes de cendres. Ce fut le cas les 17, 18 et 20 mai avec l'expulsion, ce jour-là, non pas d'un mais d'une série de panaches cendreux. Une partie de ces cendres est retombée en fine pluie de poussière sur la ville de Manizales, à environ 30 km au nord-ouest du volcan.

Série d'émissions de cendres au sommet du Nevado del Ruiz, le 20 mai. Images: SGC/Observatoire de Manizales
Cette activité se poursuit toujours et d'autres émissions de cendres ont eu lieu, notamment le 22 mai.

Belle émission de cendres le 22 mai au matin. Images: SGC, Observatoire de Manizales
Il est intéressant de noter que le 17 mai dernier les volcanologues Colombiens ont enregistré une sismicité de type "drumbeat", c'est-à-dire une séquence de secousses revenant à intervalles très réguliers, comme un tempo. Ce type de sismicité,décrit au Mont Saint Helens semble être liée à un mouvement par à coup d'une masse de magma frottant sur les parois encaissantes (voir ce post dédié).

La situation reste donc surveillée, et le niveau d'alerte maintenu au jaune pour le moment.

Source: SGC

Awu, Indonésie, 1320 m

En novembre 2015 le niveau d'alerte de ce volcan avait été élevé à 2 sur une échelle de 1 à 4, suite à une augmentation de la sismicité sur le volcan. Après cela, plus de nouvelles particulières, suggérant que la situation s'était stabilisée. Puis le 16 mai le PVMBG a publié un nouveau bulletin dans lequel est précisé que la sismicité était repartie repartie à la hausse, et de manière assez importante, le 11 mai. Ce qui a d'ailleurs conduit à passer, le 12 mai, le volcan en alerte 3, en prévention d'un potentiel départ d'éruption. En effet ce niveau d'alerte volcanique est accompagné d'une zone d'interdiction d'approche de 4 km.
La sismicité qui a le plus progressé était vraisemblablement liée à la circulation de fluides dans l'édifice, à des profondeurs variables: les sismicités profonde ("vulkanik dalam" sur le graph ci-dessous) et superficielle ("vulkanik Dangkal") ont ainsi connu une hausse importante. Il faut noter que, pour l'heure, aucun trémor n'a été enregistré.

Évolution de la sismicité entre septembre 2015 et mai 2016. image: PVMBG

Le cratère de l'Awu est occupé par un dôme de lave, mis en place au cours de l'éruption de 2004, en fin d'éruption plus précisément. Or il n'est pas impossible que sa présence soit un obstacle que du magma, dans l'hypothèse où c'est bien du magma qui est à l'origine de la crise sismique de 2015 et de celle de mai 2016, devrait franchir avant de sortir. Ce type de situation peut conduire à des départs d'éruptions assez puissants (importants panaches de cendres, écoulements pyroclastiques), suivis d'une activité moins soutenue si le magma est émis avec assez de facilité.

Nous verrons bien:
1- si une éruption démarre
2- comment elle démarre
3- ou si tout retourne au calme

Affaire à suivre, donc.

Source: PVMBG

Santamaria-Santiaguito, Guatemala, 3772 m

L'activité sur le ministratovolcan Caliente reste intense. Sur la seule journée d'hier le CONRED et l'INSVUMEH on décrit deux émissions importantes de cendres, en cours de matinée puis en début d'après-midi. La première, vers 08h30 (heure locale) a été décrite par le CONRED comme n'ayant produit aucun bruit audible dans les villages alentours, contrairement aux événements précédents, malgré un panache plutôt imposant. 

Le panache de cendres émis sans bruit audible dans les villes alentours. Image: Stereo100Xela
La seconde a eu lieu en début d'après-midi, vers 13h (heure locale). Le panache s'est élevé jusqu'à environ 5000m d'altitude et le panache de l'explosion a été de nouveau accompagné de plusieurs écoulements pyroclastiques.

Panache de cendres et écoulements pyroclastique à 13h00 (heure locale). Image: CONRED

Dans les deux cas les cendres ont été emportées vers l'ouest et le sud-ouest en majorité. Ce sont donc toujours les mêmes villages qui sont touchés (Nuevo Palmar, San Marcos Palajunoj, Coatepaque etc), villages dans lesquelles les habitants doivent tenter de ce protéger au mieux des microparticules de lave qui s'insinuent partout, irritent les yeux et les voies respiratoires, polluent les réserves d'eau.

Sources: CONRED; INSIVUMEH; Stereo100Xela

3 commentaires:

  1. Bonjour,

    Il me semble que Vulkanik Dalam et Vulkanik Dangkal correspondent respectivement à VT profonds et VT superficiels. L'augmentation de leur fréquence pourrait-elle être dûe à une mise sous pression des fluides dans l'édifice sans qu'il y ait vraiment de circulation (je pense par exemple à un magma visqueux qui serait déjà en place) ? Il n'y a pas de comptage des événements basse fréquence dans le graphe (Embusan correspond à du dégazage je crois, et Letusan à des explosions), c'est dommage... Après les deux sont forcément liés, donc je joue peut-être plus sur les mots qu'autre chose...

    Un point intéressant du graphe, c'est que le nombre de tectoniques locaux augmente en même temps que les VTs. Est-ce un hasard? Ou y a-t-il y a un lien entre une crise sismique locale et la crise volcanique actuelle? Ou est-ce simplement que la distinction entre des VTs profonds et des tectoniques locaux n'est pas forcément évidente? Car après tout, même si les causes sont différentes, ça reste de la fracturation de roches... Et faire la différence entre un forçage purement tectonique et un forçage magmatique n'est pas toujours facile j'imagine, surtout quand les deux entre en jeu pour un même événement.

    Bonne journée,
    Marc P

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonsoir Marc.

      Vous avez raison pour la définitions des secousses Vulkanik: il s'agit bien des VT-A et VT-B. Ensuite, toutes vos remarques sont pertinentes et je suis pas sur de pouvoir donner une réponse, pour deux raisons:
      - je n'ai pas les enregistrements et...
      -..l'analyse fine de la sismicité est un domaine spécifique, qui ne fait pas partie de mes compétences, mais:

      - la hausse conjointe des secousses tectoniques locales et volcano-tectoniques A et B n'est vraisemblablement pas le fruit du hasard.Des situations similaires ont visiblement déjà été rencontrées (Sakurajima je pense)
      - les secousses Volcano-tectoniques peuvent être liées à une mise en tension, effectivement, pouvant être due à une migration de magma. Il est clair qu'avoir un relevé des signaux de basse fréquence pourrait être intéressant: cela permettrait de voir si des fluides sont en migration.

      Mais tout n'est pas perdu sur ce point: il semble que certaines études sur les signaux VT indiquent que certains d'entre eux pourraient provenir de la migration de fluides, justement.

      Enfin la distinction entre seismes tectonique et secousses volcano-tectoniques profondes n'est pas forcément évidente en ce qui concerne leur caractéristiques mais:
      - les secousses tectoniques "pures" sont plutôt isolées et géographiquement localisées assez loin des volcans (quelques dizaines de km disons). Lorsqu'il y a plusieurs secousses le pic de magnitude est généralement au début de la série.
      - le VT se localisent au niveau des volcans (dans un rayon d'une ou deux dizaines de km grosso modo) et arrivent généralement par essaims. Le pic de magnitude n'est généralement pas au début de l'essaim. Les magnitudes sont globalement plus faibles que pour les secousses tectoniques "pures".

      Voilà ce que je peux dire en réponse à votre très intéressant commentaire :-)

      CV

      Supprimer
  2. Merci bien pour ces précisions!

    Bonne journée,
    Marc

    RépondreSupprimer