25 février 2016

Un point sur l'activité des volcans Momotombo, San Cristobal, Nevado del Ruiz (mis à jour)

Momotombo, Nicaragua, 1297 m (mis à jour)

Le volcan a connu, en surface, une très courte pause  avec une journée sans explosion le 22 février. L'activité interne ne s'est, par contre, vraisemblablement pas calmée car au soir du 23 c'est une explosion particulièrement forte qui s'est produite dans l'après-midi du 23 février, juste avant 16h (heure locale).
En plus du panache de cendre, un écoulement pyroclastique a dévalé la pente nord-est, en lieu et place de ceux qui l'ont précédé. Comme pour les autres écoulements la question de l'origine se pose: effondrement d'une partie du panache, ou déstabilisation d'une structure située au sommet du volcan (bout de paroi de cratère, petite masse de lave, etc...)? Pour le coup les images ci-dessous ne permettent pas de trancher.

Panache d'explosion accompagné d'un écoulement pyroclastique, vus du sud-est. Image: INETER

Panache d'explosion accompagné d'un écoulement pyroclastique, vus du nord-ouest. Image: INETER

L'explosion vue depuis le ciel. On peut difficilement être mieux placé pour voir la scène intégralement. Image: Rick Doolitle


Après l'événement la nuit a été calme, avec seulement l'habituelle lueur dans le cratère sommital indiquant les températures élevées qui y règnent, mais une autre explosion, bien moins intense s'est manifestée dans la matinée du 24 février, à 08h35 (heure locale), puis une autre à 12h47, encore moins intense.
Bref: le système volcanique du Momotombo n'est toujours pas stabilisé.


Mise à jour 26 février, 11h31

Juste une vidéo de l'activité explosive le 21 février, par photovolcanica. On y voit bien, dans la première séquence, de petites décharges électriques.




Dans les séquences de jour, et en particulier les très gros plans sur la cratère on peut voir quelques détails intéressants. Le premier d'entre eux est le fait que, sans surprise, l'activité explosive de ces dernières semaines,  a fortement retouché le cratère. Pour mémoire la fin de l'éruption de décembre 2015 avait laissé au sommet un cratère rempli, débordant d'une coulée de lave dans la ravine du versant nord-est, ainsi qu'un reliquat de lave qui avait été nommé "dôme".  Pour vous (re)donner une image de ce qu'était la morphologie du sommet pendant l’éruption et tout de suite après sa fin, voir la vidéo ci-dessous.


Or les images faites le 21 février montent clairement un cratère bien marqué, aux parois instables (on note certaines parties récemment effondrées) et, en lieu et place de la coulée de lave, se trouve une paroi plutôt abrupte. De là on peut se permettre de supposer que les écoulements pyroclastiques qui, de temps à autres, se mettent en place on pu d'abord provenir de la déstabilisation, bout par bout, de la partie amont de la coulée de lave, puis progressivement de la paroi visible sur l'image. Après tout, elle ne semble pas très solide, ni très épaisse, et les explosions sont des coups de boutoir à chaque fois, qui peuvent sinon la pulvériser, du moins la rendre de plus en plus fragile et instable.

Image extraite de la vidéo de Photovolcanica. Image: photovolcanica

Belle séquence en tout cas, et les premières que je vois qui montrent dans le détail l'activité en cours.

Source: INETER; Presse Nicaraguayenne; Photovolcanica

San Cristobal, Nicaragua, 1745 m

La presse Nicaraguayenne s'est mise à relayer hier une information, très courte au demeurant, concernant ce qui est décrit comme une explosion qui se serait produite à peut avant 09h du matin (heure locale). Mais les articles en question précisent que seul un panache de vapeur, blanc, a été émis. Le mystère là-dedans, c'est que sur les images de la webcam installée sur le Telica, et qui pointe vers le nord-ouest ce qui permet de voir le San Cristobal, on ne voit rien de spécial au moment donné par la presse, à 08h48 (heure locale).

L'image prise à 08h48 par la webcam installée sur le Telica ne montre rien d'anormal sur le volcan San Cristobal. Image: INETER

De là à dire qu'il ne s'est rien passé il y a un pas que je ne vais pas franchir. Tout d'abords parce que si les images ne montrent rien de clair, peut-être que la sismicité, elle, a enregistré un signal. Mais aussi parce que début février la zone du San Cristobal a été le siège d'une petite crise sismique qui a compté 3 secousses, dont la première assez forte (magnitude 4.1 sur l'échelle de Richter) pour être clairement ressentie par la population et semer une vive inquiétude. L'hypocentre (foyer) de ces secousses était superficiel (8 km de profondeur) et un lien, direct ou non, entre les deux ne peut pas être exclu (ni affirmé) pour le moment.
Bref: la situation pourrait aussi être un peu moins stable du côté de ce volcan, même si le dernier rapport édité le 23 (mais mis en ligne au soir du 24) n'indique rien d'anormale côté activité interne. Ce qui, après le Momotombo, le Masaya (qui a vu s'ouvrir un nouvel évent dans le cratère actif récemment) et le Telica,  en fait le 4ème édifice du Nicaragua à quitter sa zone de stabilité ("background level" des anglosaxons).

Affaire à surveiller donc.

Sources: Merci à ShérineFrance; Presse Nicaraguayenne; INETER

Nevado del Ruiz, Colombie, 5279 m

Le dernier rapport du Service Géologique Colombien, qui fait la synthèse des données récoltées entre les 15 et 22 février, fait état d'un volcan dont l'activité interne montre toujours les signes clairs d'une instabilité. La sismicité montre que l'intérieur du volcan continue de se microfracturer, et que la circulation des fluides fait toujours vibrer la tuyauterie. Ces mêmes fluides alimentent, une fois arrivés en surface, le panache de gaz qui est émis en permanence par le cratère Arenas. Ces gaz sont vraisemblablement à haute température puisque sur les images prises de nuit par la webcam installée face au versant nord-est montrent des lueurs.
Ce rapport indique aussi que vu l'instabilité chronique dont fait preuve ce système volcanique depuis 5 ans, il n'est pa impossible que des émissions de cendres fassent leur apparition.

C'est le cas depuis le 23 février au soir au moins (il y en a peut-être eu d'autres, masquées par les nuages) avec une première émission, modeste, à 17h14 (heure locale), dont les cendres ont été rapidement dispersées par le vent.

Panache de cendres en fin d'après-midi le 23 février. Image: SGC/Observatoire de Manizales

Mais c'est l'explosion qui a eu lieu plus tard, dans la nuit, qui a été un peu plus importante. Elle se produit à 21h19 (heure locale) et est assez forte pour expulser hors du cratère des blocs incandescents, qui sont donc retombé à environ 300 m à vol d'oiseau de leur point d'émission.

Explosion avec chutes de bombes et blocs incandescents hors du cratère Arenas, soir du 23 février 2016. Image: SGC/Observatoire de Manizales

Et là vous aurez peut-être remarqué que j'utilise incandescent, car la webcam en question ne fonctionne qu'en mode "jour" : pas question ici de "lueurs infrarouges", celles de l'image sont constituées de lumière visible cette fois.

Le volcan reste donc bien dans une phase instable mais les paramètres restent dans une gamme qui permet aux volcanologues de maintenir son niveau d'alerte au jaune.

Source: SGC/Observatoire de Manizales

7 commentaires:

  1. il s'est encore passé quelque chose sur le Momotombo, on voir de nombreux fragments incandescents sur le cône via la webcam INETER, sans doute un autre écoulement pyroclastique sur le flanc Nord-Est. Il est en forme en ce moment !

    RépondreSupprimer
  2. Bonjour Jérémy. Oui: nouvelle explosion vers 02h15 (heure locale), mais sans écoulement pyroclastique cette fois. :-)

    RépondreSupprimer
  3. Ca bouge en ce moment au Nicaragua!!! J'ai compté 5 volcans en éruption ou sur forte surveillance!!! C'est fou ça

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour Gas Kustoms. A moins que je ne sois passé à côté de quelque chose (c'est tout à fait possible), pour ma part j'en compte 4: Telica, Momotombo, Masaya et San Cristobal. Les rapports de l'INETER indiquent que l'activité du Cerro Negro et du Concepcion sont normales, et il n'y a aucune indication d'activité anormale pour les 10 autres volcans donnés comme actifs connus dans le pays :-)
      Mais c'est vrai que 4 en même temps qui sont en surveillance accrue ce n'est pas une situation particulièrement fréquente au Nicaragua.
      Bonne journée à vous :)
      CV

      Supprimer
  4. Bonjour,

    Ici une photo à 360 degrés du volcan Cristobal! Cela donne envie de faire un voyage dans le coin !

    http://www.rutacolonialydelosvolcanes.com/san-cristobal/

    RépondreSupprimer
  5. Bon j'ai l'impression que les coulées pyroclastiques du Momotombo sont le résultat d'effondrement de colonnes produites par les eruptions vulcaniennes. Comme ca s'observe parfois a Colima ou au Sakurajima ou récemment au Santiaguito. Bon après, comme ces écoulements sont erosifs sur le début de leur parcours, il y a surement du vieux matériel qui se fait entraîner dans l'écoulement, mais le mécanisme générateur c'est l'effondrement de la colonne

    RépondreSupprimer
  6. Salut Robin. Pour ma part pour certains écoulements j'ai dans l'idée qu'il s'agit bien d'effondrements au niveau du cratère: j'ai argumenté en ce sens pour l'écoulement du 13 février (http://laculturevolcan.blogspot.fr/2016/02/volcan-momotombo-nicaragua-une.html).
    Mais l'explication pour un écoulement donné n'est pas valable pour tous, j'en ais bien conscience: pour l'écoulement du 23 février je donc suis resté plutôt réservé quand à l'explication, car aucune des images disponible ne m'a paru vraiment très claire (contre-jours etc..je suis méfiant) pour tenter une explication.
    Par contre le fait que cet écoulement du 23 février provienne d'un effondrement de colonne ne me pose pas de problèmes particuliers: c'est quelque chose que j'ai en tête pour chaque écoulement pyro que je vois. Malheureusement aucune des images n'est très claire pour être sûr. Même sur l'image aérienne, par malchance, la base de la colonne et le départ de l'écoulement sont dans l'ombre du panache vertical, et on ne voit pas comment les deux s'articulent l'un-l'autre...

    Cependant je pense qu'il peut y avoir des écoulements issus de deux mécanismes différents, pas toujours faciles à identifier (du moins à tenter) sur les images. Et je soupçonne, suite aux images du 13 février, que la partie amont de la coulée de lave de décembre n'a pas été seulement érodée par des écoulements pyroclastiques: je pense que des morceaux se sont détachés. Une image prise de nuit le 12 février abonde dans ce sens, avec ce qui semble être une avalanche de blocs dans la ravine depuis le sommet, sans explosions, qui suggère que la paroi visible sur la vidéo n'est pas très stable.

    Il serait vraiment interessant de voir des vidéos ou, mieux, d'y assister directement :-)
    @+

    RépondreSupprimer