3 janvier 2015

Un point sur les volcans Indonésiens: Soputan, Tangkubanparahu et Sinabung

Il y a eu ces derniers temps quelques petits changements qui, pris individuellement, ne me permettaient pas de rédiger une actu. Mais elles se sont accumulées et c'est donc l'occasion de les regrouper ce matin.
3 volcans pour 3 îles de cet immense archipel.

Soputan, Indonésie (Sulawesi), 1784m

Le PVMBG a décidé, le 26 décembre dernier, d'élever le niveau d'alerte de l'édifice d'un cran et de le passer à l'orange (Siaga, ou encore 3/4).
En cause, une hausse progressive de la sismicité générale de l'édifice à partir du 16 décembre avec
plus de secousses liées à des petites avalanches de blocs et d'autres liées à du dégazage. Mais ce qui a surtout déclenché le changement du niveau d'alerte est l’apparition, sur les sismomètres, des drumbeats.
"Drumbeat?" Kézako? Pour le savoir, n’hésitez pas à lire ou relire le post que je leur ais consacré l'an dernier . Pour faire simple: ce sont des signaux sismiques répétitifs qui accompagnent généralement les mouvements de magma visqueux à faible profondeur, voire en surface, lorsqu'un dôme se forme.

Dans le cas du Soputan rien ne vient pour le moment indiquer que le dôme qui occupe le sommet, et qui est apparu en 1991 (détruit puis reconstruit plusieurs fois depuis) ait repris sa croissance, mais les drumbeats semblent indiquer que le magma dans le conduit soit un peu sous pression et susceptible de se déplacer. 

La situation est donc à risque pour les populations les plus proches, situées à environ 8 km à l'ouest de l'édifice. Car c'est sur ce versant que se mettent généralement  en place les avalanches de blocs et les écoulements pyroclastiques, produits par l’activité au sommet de l'édifice, et en particulier lorsque le dôme est instable.
Le risque de coulées de boue, en période de pluies, étend même la zone "impactable" par une activité éruptive jusqu'à la côte, a environ 20 km au nord-ouest. La petite ville de Tumpaan est en effet traversée par des rivières qui descendent directement du volcan.

Carte de risques du volcan Soputan
La carte de risques élaborée par les volcanologues indonésiens, plaquée sur Google Earth. On voit que le versant ouest est le plus affecté par les avalanches de blocs et les écoulements pyroclastiques (rouge-mauve). Les lignes jaunes sont les rivières susceptibles de charrier les lahars, jusqu'à la côte. Images: PVMGB; montage: Culture Volcan


La dernière période de sismicité anormale, en mai 2013, avait déjà conduit à un passage en alerte orange, mais celle-ci avait été levée dès juin suivant.

Sources: PVMBG; BNPB


Tangkubanparahu, Indonésie (Java),  2084m

Ce stratovolcan situé juste au nord de la ville de Bandung, sur l'île de Java, a vu son niveau d'alerte passer à 2 le 31 décembre 2014. Là encore ce sont des modifications de la sismicité qui ont conduit les volcanologues à changer le niveau d'alerte, sans qu'il y ait de changements significatifs de l'activité en surface. Le problème c'est que plus encore qu'au Soputan, les environs de l'édifice sont peuplés, ce qui augmente le risque en cas de départ d'éruption.

La ville de Bandung elle-même n'est pas directement menacée, mis à part quelques quartiers qui peuvent être traversés par des lahars en cas de très très importante activité éruptive. Mais ce sont surtout les versants est et nord-est qui sont plus directement concernés, en raison de la configuration du cratère, le Kawah Ratu, ouvert de ce côté. De part l'activité hydrothermale qui anime le fond de ce cratère, il est une attraction touristique très prisée des indonésiens, et d'importantes infrastructures occupent sa lèvre est. En février 2013 une activité phréatique passée inaperçue les avait recouvertes de cendres et incité les autorités a temporairement fermer l'accès à l'édifice.


Le volcan Tangkubanparahu
Le Tangkubanparahu et son cratère actif, Kawah Ratu. A droite de l'image on distingue, outre les zones cultivées, des petites villes, des routes, infrastructures menacées en cas d'éruption. Image: Google Earth, annotations: Culture Volcan
Source: PVMBG

Sinabung, Indonésie (Sumatra), 2460m

La lave continue de sortir au sommet de l'édifice et alimente toujours la seconde coulée qui descend le long du bord sud de la première. Cette dernière reste courte car l'alimentation en magma ces dernières semaines n'a pas été très important. Par ailleurs, chaque mètre gagné par la coulée est repris par des effondrements, qui ont été peut importants ces derniers temps.
Toutefois ce matin la situation a un peu changé avec la mise en place d'une série de décrochements qui a produit une succession d'impressionnants écoulements pyroclastiques. Les panaches co-pyroclastiques qui se sont formés ont été tellement importants qu'ils ont incité le VAAC de Darwin a élever le niveau d'alerte aviation au rouge.
Les écoulements se sont dirigés, comme c'est le cas depuis maintenant plusieurs mois, vers le sud et sud-est, et affecté la zone située juste au-dessus du village de Payung. Pas de dégâts ni de victimes n'ont été décrits.

Ecoulements pyroclastiques sur le volcan Sinabung, 03 janvier 2015
Effondrements du lobe de lave ce matin, observé depuis le nord-est. Image: Endro Lewa, via @volcanoalert

Le niveau d'alerte pour le volcan a, quand à lui, été maintenu à l'orange (Siaga) par les volcanologues du PVMBG.

A noter qu'au cours de ma recherche d'infos de ce matin je suis quand même tombé sur la réaction d'un twittonaute qui indiquant qu'il faudrait peut-être se pencher sur l'éruption du Sinabung plus que sur la météo pour expliquer la disparition du vol QZ8501 d'Air Asia .
Pourquoi il est inutile de se pencher sur cette hypothèse? Parce que plus de 1400 km séparent les deux événements et que le volcan, bien que les images soient impressionnantes, ne libère en réalité que très peu de cendres, les panaches sont peu dynamiques et les cendres se déposent très vite. Par ailleurs, au moment de l'accident l'activité sur le volcan était plutôt réduite.

Sources: @volcanoalert; PVMBG; VAAC de Darwin

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire