Un point sur la situation des volcans Bardarbunga (Bárðarbunga) et Kilauea (mis à jour 21 septembre, 14h57)

Bardarbunga (Bárðarbunga) , Islande, 2000 m

Les rapports de l'IMO continuent d'indiquer que l'éruption se poursuit et reste globalement stable. Durant ces dernières 48 heures la météo n'a pas permis de voir la progression de la lave, jusqu'à hier quand le brouillard a finit par se lever. L'activité sur la fissure reste en effet importante et la coulée de
lave beaucoup progressé depuis le 16 septembre.

Progression de la nouvelle coulée entre les 13 et 20 septembre. Images: MILA

Les volcanologues expliquent par ailleurs que les analyses préliminaires de la composition chimique de cette lave indique qu'elle semble provenir d'une profondeur supérieure à 10 km, ce qui est cohérent avec la sismicité observée depuis le début de la crise. Pour le moment ils ne peuvent pas être plus précis: ce type d'analyse et son interprétation demandent un peu de temps. Mais nul doute que l'on verra assez rapidement fleurir des articles scientifique sur cette éruption, qui permettrons d'aller plus loin dans la compréhension de ce qui se passe actuellement.

La caldera sommitale du Bardarbunga continue, de son côté, de lentement s'affaisser. Comme je vous le présentais le 15 septembre, elle le fait toujours de manière un peu progressive mais quelques secousses sismiques importantes, dont celle de magnitude 5.3 du 18 septembre, ont été accompagnées de mouvements plus brusques, en l’occurrence -20 cm d'un coup ce jour-là. Ce n'est toutefois pas toujours le cas: vous remarquerez sur l'image ci-dessous qu'une autre secousse, de magnitude 5.2, n'a été accompagnée d'aucun mouvement particulier.

Les données GPS montrent que l'altitude du glacier au niveau de la caldera continue de lentement diminuer.  Image: IMO-Université d'Islande-Protection Civile Islandaise

Quand à la qualité de l'air, celle-ci reste exécrable dans les zones situées sou le vent, en particulier à proximité de la zone éruptive bien entendu. Pour aujourd'hui les données météo prévoient que ce devrait surtout être la côte nord qui sera impactée par le panache de gaz. Pour faire un suivi des plus fins et en temps réèl, ce sont 40 capteurs supplémentaires qui ont été installés sur tout l'Islande ces derniers jours.

40 new SO2 sensors being deployed around #Iceland to monitor and report better on gas from #Holuhraun #eruption
— Gisli Olafsson (@gislio) 19 Septembre 2014

Il n'y a pas à dire: l'Islande met le paquet pour pourvoir capturer le plus de données diverses (sismicité, déformation, qualité de l'air, composition des cours d'eau etc) qui servent le jour J pour permettre aux autorités d'agir et prend des mesures de précaution (bulletins d'alerte pollution, règlementation des accès routiers etc), mais qui serviront aussi ensuite à tous les scientifiques de l'île dans leurs professions respectives.

Prévision de la répartition des gaz émis par l'éruption pour cet après-midi 14h (heure locale). Image:IMO

Quelques images faites ces derniers jours: j'ai l'impression qu'elles se sont faite beaucoup plus rare. Il faut dire que les conditions météo excécrables et la restriction des accès à cause de la présence de forte concentrations en gaz sur la zone n'aident pas non plus j'imagine.

Tout d'abord une image des fontaines de lave, faite le 18 septembre. Leur hauteur est estimée à 40 0 par l'Université d'Islande.

Pic of #Holuhraun eruption last night. ~40m high lava fountains. Credit: Uni. of Iceland/Gro Pedersen pic.twitter.com/GYLpzgmt2N
— Univ. of Iceland (@uni_iceland) 18 Septembre 2014

Une autre image, non datée mais transmise par l'IMO, indique que de nouveaux noms ont été assignés aux différents éléments de la fissure.
Le spatter-cone principale s’appelle toujours Baugur (l'anneau) mais deux de ses évents latéraux portent maintenant les noms de Krakkinn (le le fils) et Heimasaetan (la fille).

New names for #Holuhraun: #Krakkinn (kid) and #Heimasaetan (daugther) http://t.co/ajYa08oTuc
— Bernd Andeweg (@BerndAndeweg) 19 Septembre 2014

Photo de famille: le spatter-cone principal (Baugur) et ses deux rejetons.

Mise à jour 21 septembre 14h57

L'Université d'Islande a fait parvenir une nouvelle carte montrant l'extension du champ de lave. Elle confirme que la première coulée a grosso modo arrêté sa progression la semaine dernière, au moment ou la seconde coulée ("coulée sud" dans mes posts, mais elle n'est pas de nom officiel) a entamé sa formation.

Cette dernière couvre maintenant une surface de 7.6 km², contre 29.6 km² pour la coulée principale: la surface totale est donc évaluée à 38 km²

Dans le derniers rapport officiels publiés par les volcanologues, l'activité sur la fissure n'a pas diminué, et la sismicité au niveau de la caldera du Bardarbunga reste importante avec des secousses toujours assez fortes. L'affaissement se poursuit malheureusement les bulletins ne précisent pas combien de mètres ont été perdu depuis le début du phénomène.

Extension des coulées de lave dans la plaine d'Holuhraun, le 20 septembre 2014. Image: Université d'Islande.

Sources: IMO; MILA; Twitter; Université d'Islande


Kilauea, Etats-Unis, 1222m

La coulée continue de progresser droit en direction de Pahoa, tout en évitant de justesse les quelques maisons de Kahoe Homesteads. La vitesse moyenne de sa progression est variable: 210 m/jour entre les 12 et 15 septembre , 290 m/jour entre les 15 et 17 septembre, 200 m/jour entre les 17 et 19 septembre d'après les rapports de lObservatoire. Ce dernier explique toutefois que ce type de variation est tout à fait classique et n'indique en rien que l'activité de la coulée s'épuise.

Nouveauté (attendue) depuis hier: la lave est sortie de la forêt et progresse maintenant en milieu ouvert.

La coulée est sortie de la forêt le 19 septembre. Image: HVO/USGS

Le front de la coulée ne se trouve plus qu'à 2.4 km de la route d'Apa'a-Cemetery Road ce qui, à sa vitesse de progression actuelle, représente un délai qui va de 8 jours (pour une vitesse de de 290 m/jour) 12 jours (pour une vitesse de 200 m/jour). Ces délais varient évidemment en fonction de la manière dont la vitesse change mais aussi de la trajectoire de la coulée. En effet ces projections sont basées sur l'idée que la coulée suive une droite entre elle et Pahoa. Mais plus la trajectoire sera sinueuse, plus la distance à parcourir sera longue, dont le délai rallongé d'autant.

Image aérienne de la zone de Pahoa. En rouge la position du front de la coulée au 19 septembre, les flèches bleues représentent la trajectoire supposée, déterminée à partir de la topographie. La route d'Apa'a est notée. Image: HVO/USGS

Une vidéo a pu être tournée probablement avant-hier, avant que la coulée ne sorte de la forêt: une ambiance toujours surprenante. Cependant il ne faut pas croire que ce type de situation (coulée lente) soit sans dangers pour qui veut la filmer. Je me souvient avoir vu, il y a fort fort longtemps, des images d'explosion de méthane (à Hawaï justement) se produisant sur le pourtour de la coulée en progression lente. Le méthane est en effet l'un des gaz issus de la décomposition de la matière  organique, abondante dans ces sous-bois. Par ailleurs, à filmer de si près en sous-bois on n'est jamais à l'abri des gaz de combustion (CO2, CO) ou de chutes d'arbres dont le tronc aura été brûlé. Bref: la coulée elle-même ne pose pas de danger immédiat mais son interaction avec l'environnement forestier n'est pas sans risques.

Mise à jour 21 septembre, 10h02

La vitesse de progression de la coulée a fortement ralenti depuis avant-hier et les derniers rapports de l'H.V.O la donnent maintenant à moins de 50 m par jour. Par ailleurs les volcanologues ont constaté que le panache de gaz lié à la combustion de la végétation a fortement diminué lui-aussi, et que la largeur de front de la coulée s'est agrandit: elle s'étale un peu. Cependant le pourquoi de cette évolution un peu brusque n'est pas claire et deux possibilités, au moins, peuvent l'expliquer:
- la première serait évidemment une baisse du débit de la coulée, qui ne serait plus autant alimentée.
- la seconde pourrait être d'ordre topographique, comme l'expliquent les volcanologues: si la lave vient de rencontrer une sorte de dépression par exemple. Le temps qu'elle remplisse cette dernière, la lave n'avance pas ou peu, mais elle s'élargit. Quand au panache il est aussi logique qu'il soit moins important puisque la coulée est sortie de la forêt et se déplace désormais en terrain découvert.

La bonne nouvelle c'est que ça laisse du temps supplémentaire aux habitants de Pahoa pour préparer leur éventuelle évacuation.


Sources: HVO/USGS; Herald Tribune;