L'activité reste stable au moins dans le style (activité strombolienne + coulée) mais pas forcément dans l'intensité. Depuis mon précédent post, début juin dernier, le VAAC de Tokyo a émis une alerte le 29 juin indiquant la présence de cendres à une altitude estimée à 3000m. Le bulletin indiquait aussi que cette cendre n'a pu être observée sur les images satellites.
Et c'est vrai que sur les images MODIS prisent ce jour-là seul un fin panache s'étire sur une
soixantaine de kilomètres de long.
soixantaine de kilomètres de long.
Le panache du Nishino-Shima le 29 juin, vu depuis l'espace. Image: MODIS/NASA |
Sa teinte un peu sombre pourrait être due à la présence de cendres, mais en réalité il est difficile d'être certain car en fonction de l'éclairage du soleil, les panaches, même de vapeur d'eau, peuvent prendre des teintes allant du clair au sombre. La présence d'une activité explosive accrue reste donc une possibilité mais il me semble difficile d'être sûr qu'elle ait bien eu lieu. Par ailleurs l'importance du panache sur cette image n'est pas vraiment différente de ce qu'elle est d'habitude.
Quoi qu'il en soit, une certitude persiste: les coulées sont toujours alimentées. Comme début juin d'ailleurs c'est surtout la côte Est qui a reçu la lave émise depuis le centre de l'île. En un mois cette alimentation ininterrompue en lave a créé une importante plate-forme de coulées qui a finit par déformer l'île, jusqu'alors quasiment circulaire. La comparaison d'images Landsat8 en vraie couleur permet de constater l'extension de la côte Est de l'île.
La nouvelle plate-forme vue par le satellite Landsat 8. Image AIST/Tokai University |
En imagerie thermique on voit bien que, le 04 juillet en tout cas, c'était toujours la nouvelle plate-forme qui était la plus alimentée en lave.
Dans l'infrarouge thermique les zones des coulées actives brillent littéralement. Image: AIST/Tokai University |
L'éruption reste donc vigoureuse actuellement, et essentiellement effusive.
Sources: AIST; MODIS/NASA
Etna, Italie, 3330m
L'activité se poursuit là aussi sans changement de style. C'est une effusion depuis la petite fissure éruptive qui se maintient. Ces 48 dernières heures, elle a alternativement alimenté soit le bras de coulée sud (12-13 juillet), soit le bras nord (14 et 15 juillet).
L'activité explosive (strombolienne) sur les spatter-cones semble se maintenir, comme le montre cette vidéo mise en ligne hier (la date des images n'est pas forcément le 14 juillet).
L'effusion alimente un bras, puis l'autre. Images: INGV |
L'activité explosive (strombolienne) sur les spatter-cones semble se maintenir, comme le montre cette vidéo mise en ligne hier (la date des images n'est pas forcément le 14 juillet).
A noter qu'une équipe de Laboratoire Magmas et Volcans (LMV), labo de l'Observatoire de Physique du Globe de Clermont-Ferrand (OPGC), où j'ai fait mes études, était sur place la semaine dernière. J'espère donc qu'ils en ont bien profité, même si les tests pour lesquels ils étaient partis n'ont pas pu tous être menés à bien.
En prime une photo prise le 12 juillet des spatter-cones en pleine action qu'un des volcanologues du LMV, Raphaël Paris, m'a envoyé, et je l'en remercie encore une fois :-).
Que dire? Des ambiances comme on les aiment. Image Raphel Paris-LMV/OPGC |
Sinabung, Indonésie, 2460m
Rapide tour des titres de la presse internationale ces derniers jours:
"URGENT Nouvelle éruption du mont Sinabung en Indonésie" (Xinhua)
"Sinabung's lava flows" (les coulées de lave du Sinabung) (Jakarta Post)
Non: il n'y a pas de nouvelle éruption au Sinabung, et non ce qui s'est produit avant-hier n'est pas une nouvelle coulée de lave mais un écoulement pyroclastique et n'a rien d'une "éruption explosive de grande ampleur".
Les titres ci-dessus ne permettent donc pas de se faire une idée de ce qui se passe au Sinabung. Anxiogènes ils font soit l'erreur de faire croire que les choses s'aggravent et que l'activité monte en puissance (titre 1), soit se trompent carrément de phénomène géologique (titre 2).
Là encore la médiation doit se distinguer des médias et employer les termes qu'il faut pour rendre compte de ce qui se passe réèllement.
La présence d'un second lobe de lave, soupçonné dès le mois d'avril 2014, sur une pente instable s'est confirmée avec le temps. La coulée principale est trop importante pour pouvoir être poussée par la lave qui sort au sommet du Sinabung: celle-ci s'est donc logiquement mise à couler à côté, origine du second lobe. Ce dernier progresse mais la pente sur laquelle il avance est vraiment forte et, de ce fait, des fragments plus ou moins gros se détachent et génèrent des écoulement pyroclastiques.
Ceux qui se sont produits ces derniers temps sont un peu plus importants que les premiers, apparus en avril: normal, le lobe grandit, le volume de lave qui peut se détacher est donc plus important, et de facto c'est la même chose pour les écoulements pyroclastiques qui en résultent.
Exit donc la "nouvelle éruption". Les écoulements pyroclastiques ne sont que l'une des manifestations visibles d'une seule et unique éruption qui à commencé en septembre 2013 sur un mode explosif (activité vulcanienne, avec des vraies explosions) et se poursuit depuis décembre 2013 sur un mode extrusif (émission d'un dôme qui est devenu une coulée depuis la mi-janvier), lequel a généré des écoulements pyroclastiques, importants et vraiment dangereux jusqu'en février, de moins en moins important depuis lors.
Et je précise de suite que "de moins en moins important" ne signifie pas "moins dangereux", au contraire. Depuis que le second lobe se met en place, et bien que l'éruption soit calme car uniquement extrusive, puisque la lave sort d'abord et uniquement sous forme de coulée, sa position sur une pente forte le rend instable et les écoulements pyroclastiques générés peuvent être de plus ou moins grand volume, en fonction du volume de roche qui se décroche. Celui qui s'est produit dans la nuit du 12 au 13 juillet a ainsi parcouru une distance de 4 km en direction du sud-est. Autrement dit: il est arrivé aux portes des zones habitées qui ont déjà été évacuées de longues date mais où se sont aussi comptées les victimes de l'éruption en février dernier.
Ainsi le Sinabung est un exemple type, pour moi, de situation difficile à expliquer: l'éruption ne fait que s'affaiblir avec le temps. Elle génère un phénomène "tranquille", la coulée, qui peut elle-même, au cours de sa progression, générer un phénomène plus violent, l'écoulement pyroclastique, uniquement parce qu'une partie de la lave progresse sur une pente forte.
Si le second lobe parvient au pied du Sinabung, sur une pente plus faible, il se stabilisera et les écoulements seront moins fréquents et moins importants.
Il n'y aura donc une réelle aggravation de la situation que si une nouvelle poche de magma remonte des profondeurs. Un magma neuf sera plus riche en gaz et entrainera donc la réapparition des explosions au sommet du Sinabung, d'autant plus importantes qu'il faudra évacuer d'abord le magma dégazé qui rempli actuellement les conduits. Si cet événement ne se produit pas, l'éruption s'épuisera lentement en alimentant les coulées lesquelles produiront, de temps à autres, quelques écoulements pyroclastiques, qui justifient que les autorités maintiennent le secteur sud-est évacué, car il est le plus exposé dans la situation actuelle.
Piton de la Fournaise, France, 2631m
On a pu lire dans le journal Le Monde d'hier qu'un nouveau réseau de surveille sismique était en cours de déploiement sur le volcan. Le projet, nommé Volc-Array, a pour objectif de déployer (d'où le terme "Array") environ 300 sismomètres employés normalement dans la prospection pétrolière, en trois carrés de 100 appareils chacun qui vont, pendant un mois enregistrer... le bruit de fond sismique! Et devinez qui est responsable du projet? Florent Brenguier bien sûr, qui a publié en début de mois un article sur la réaction des volcans aux séismes majeurs, réaction mesurée à l'aide de ce bruit de fond, produit par la houle marine.
L'objectif est de pouvoir faire une image assez fine du système d'alimentation sous le Dolmomieu, jusqu'à 3000 m de profondeur.
Une phase de test à eu lieu fin juin, suivie de la première phase d'installation du réseau. La troisième et dernière phase s'est faite hier et les scientifiques ont dores et déjà commencé l'enregistrement du bruit de fond. Visiblement ces différents étapes n'ont pas été faciles (pluie, vent, froids...) mais le réseau est fonctionnel. Affaire à suivre!
Sources: Le Monde; IsTerre
Stromboli, Italie, 926m
Une nouvelle activité effusive a débuté ce matin sur le Stromboli, à partir de 08h10 TU, environ. La coulée, contrairement aux phases précédentes, ne descend pas directement du cône N2 dans la Sciara del Fuoco, mais d'un évent ouvert un peu plus au nord. Elle descend sur quelques mètres en direction du nord puis bifurque vers le nord-ouest pour plonger dans la Sciara del Fuoco.
Pendant sa mise en place elle a généré des phases d'éboulements assez importants.
La météo médiocre empêche de bien voir les événements, en particulier l'intensité de l'activité strombolienne au sommet.
Mise à jour 16 juillet 2014, 08h08
La coulée apparue hier s'est épuisée en quelques heures. Le soir même elle n'était déjà plus active. Quand à l'activité explosive du sommet: impossible de savoir si elle a décru ou pas à cause de nuages persistants sur l'édifice.
A suivre.
Source: INGV; merci à @BrLeConquerant
On a pu lire dans le journal Le Monde d'hier qu'un nouveau réseau de surveille sismique était en cours de déploiement sur le volcan. Le projet, nommé Volc-Array, a pour objectif de déployer (d'où le terme "Array") environ 300 sismomètres employés normalement dans la prospection pétrolière, en trois carrés de 100 appareils chacun qui vont, pendant un mois enregistrer... le bruit de fond sismique! Et devinez qui est responsable du projet? Florent Brenguier bien sûr, qui a publié en début de mois un article sur la réaction des volcans aux séismes majeurs, réaction mesurée à l'aide de ce bruit de fond, produit par la houle marine.
L'objectif est de pouvoir faire une image assez fine du système d'alimentation sous le Dolmomieu, jusqu'à 3000 m de profondeur.
Une phase de test à eu lieu fin juin, suivie de la première phase d'installation du réseau. La troisième et dernière phase s'est faite hier et les scientifiques ont dores et déjà commencé l'enregistrement du bruit de fond. Visiblement ces différents étapes n'ont pas été faciles (pluie, vent, froids...) mais le réseau est fonctionnel. Affaire à suivre!
Installation du réseau sous des conditions météo pas faciles. Image: Eric Larose, via l'IsTerre |
Stromboli, Italie, 926m
Une nouvelle activité effusive a débuté ce matin sur le Stromboli, à partir de 08h10 TU, environ. La coulée, contrairement aux phases précédentes, ne descend pas directement du cône N2 dans la Sciara del Fuoco, mais d'un évent ouvert un peu plus au nord. Elle descend sur quelques mètres en direction du nord puis bifurque vers le nord-ouest pour plonger dans la Sciara del Fuoco.
Formation de la nouvelle coulée ce matin. Images: INGV |
Pendant sa mise en place elle a généré des phases d'éboulements assez importants.
Éboulements liés à la coulée en progression. Image: INGV |
Mise à jour 16 juillet 2014, 08h08
La coulée apparue hier s'est épuisée en quelques heures. Le soir même elle n'était déjà plus active. Quand à l'activité explosive du sommet: impossible de savoir si elle a décru ou pas à cause de nuages persistants sur l'édifice.
A suivre.
Source: INGV; merci à @BrLeConquerant
Bonjour,
RépondreSupprimerEncore merci pour votre suivi continuel des activités volcaniques avec les soin que vous y apportez.
De passage en Europe en ce moment et voyant ce qu'il se passe en Sicile, je souhaiterais vraiment y faire un détour. Je ne connais pas les règlementations de l'Etna aux visiteurs mais j'aimerais approcher la zone des spatter cônes actifs (avec ou sans guide), pensez-vous que ce soit possible ? J'espère que cette jolie activité va encore se poursuivre quelques jours.
Merci pour vos précieux conseils,
Samuel.
Bonjour. Je crois que vous avez raison de tenter le coup, mais je préfère vous dire qu'approcher les évents, avec ou sans guide, si vous ne connaissez personne sur place, ça me parais très très difficile. L'endroit où s'est ouverte la fissure est particulièrement visible et si vous tentiez de vous approcher des évents seul, vous seriez vite repéré (des guides sont sur place régulièrement et je ne doute pas qu'il y ait des carabiniers qui rôdent). D'après la réglementation, et s'il n'y a pas eu d'ordonnance supplémentaire depuis mars dernier, l'accès sur le flanc nord, qui est celui où ça se passe, peut se faire seul jusqu'au Monte Pizzillo, un des cônes qui longue le chemin des 4x4 qui partent depuis la station de Piano Provenzana. Sinon il faut un guide, à prendre à ladite station. Je doute par contre qu'ils vous emmènent à côté des évents, car les quelques photos que j'ai pu voire semblent plutôt dire que les 4x4 s'arrêtent au bout de piste, près du Pizzi di Neri. Enfin, je ne sais pas combien de temps les 4x4 restent au point de vue du Pizzi di Neri....en espérant que ce ne soit pas aussi court qu'à Stromboli.
RépondreSupprimerSi vous voulez avoir plus de possibilités, le seul moyen à mon sens c'est de discuter avec les guides une fois sur place.
Bonne journée :-)
Fabrice
Bonjour Fabrice,
RépondreSupprimerMerci beaucoup pour ces informations. Ça me parait effectivement plus compliqué que je ne l’espérais. A cela s'ajoute la fin d'activité d'un des deux cônes.
Merci encore et bonne journée, Samuel.
Je ne sais pas quand vous partez aller en Sicile mais si vous décidez de ne pas aller sur l'Etna, allez sur Stromboli! Nouvelle coulée aujourd'hui, après celle d'hier!
RépondreSupprimerQuoi qu'il en soit, et même si vous arrivez après la bataille, si vous ne connaissez pas l'Etna, allez-y: le flanc nord est fantastique, tout comme l'est avec l'entrée de la Valle del Bove, l'ouest avec son versant sauvage et le sud, quand on s'éloigne un peu de la station Sapienza.
Bonjour,
RépondreSupprimernous sommes de retour de Sicile où nous avons eu la chance d'avoir de superbes spectacles ! Le Stromboli le soir du 13 juillet (donc juste avant les coulées de lave d'après vos posts mais aussi juste avant le mauvais temps !). Nous avons pu monter aux 400 mètres et profiter d'un spectacle grandiose : des explosions en quasi-continu, c'était fantastique. Quant à l'Etna, nous avons suivi vos conseils et avons été époustouflés par le spectacle qu'offre le flanc nord et la coulée de 2002. Malheureusement, nous sommes tombés sur un jour où il n'y avait pas d'excursions en soirée à partir de piano provenzana. Du coup, nous nous sommes "contentés" d'un tour du mont Néro avec de superbes paysages lunaires ! Et en redescendant, nous avons aperçu la coulée sur le flanc nord et pu remonter et la regarder. Nous étions loin (entre 1500 et 1600 mètres d'altitude) puisqu'il faisait nuit noire et il était donc impossible de monter à pieds au hasard :-) . Mais, grâce aux jumelles que vous nous aviez conseillées, nous avons pu regarder les explosions et la coulée ! Merci encore à vous pour vos conseils, ils nous ont été précieux ! Quant à Samuel Pierre, si vous avez l'occasion, allez-y !!!
Estelle
Que dire? Je suis simplement ravi de voir que vous avez pu assister à tout ça: l'occasion de voir, en un voyage, ce que vous avez vu ne se présente pas souvent et c'est super que vous ayez pu en profiter. Autre chose: vous avez eu parfaitement raison d'aller voir du côté du Monte Nero: c'est un coin d'une ambiance exceptionnelle, où j'aimerais aller me perdre un peu plus souvent :-)
RépondreSupprimerMerci de votre témoignage