18 avril 2017

Un point sur l'activité des volcans Nevados de Chillan et Poàs

Nevados de Chillàn, Chili, 3212 m

Ce système volcanique reste instable et, après quelques jours sans activité superficielle particulière, a recommencé à produire un peu de cendres dans la nuit du 16 au 17 avril. Depuis le début du mois il reste le siège d'une activité explosive et irrégulière, faible à modérée qui génère aussi des cendres que des blocs, qui impactent le haut versant du cône Arauco.
La plutôt haute température des fragments projetés fait qu'il est maintenant très fréquent de les repérer sur les images prisent de nuit par les webcams, dont les capteurs sont alors sensibles aux infrarouges. C'est comme ça que l'on peut repérer les deux explosions qui ont eu lieu au cours de la nuit du 16 au 17 avril par exemple.

Deux explosions dans la nuit du 16-17 avril. Images: SERNAGEOMIN

Le point important de cette affaire je l'ai appris lors d'un petit échange avec un étudiant en volcanologie Chilien, Nicolàs Luengo Velasquez, qui a pu mener une série d’analyses sur des retombées de cendres récoltées entre décembre 2016 et mars 2017: une petite fraction des particules projetées par les explosions récentes est constituée de lave juvénile, provenant directement de l'intrusion magmatique responsable de cette crise, qui a débuté voilà plus d'un an maintenant. L'activité est donc très faiblement phréatomagmatique. Cela est cohérent par ailleurs avec la haute température d'une partie des fragments projetés: non pas que les blocs visibles sur les images soient eux-même constitués de lave juvénile (ils n'ont pas été échantillonnés donc personne ne peut affirmer qu'ils le sont ou pas) mais le fait qu'une partie de l'intrusion elle-même participe explique que la température de ce qui est projeté est plutôt élevée depuis quelques mois.

La situation reste toutefois globalement stable et cette activité semble pas, pour le moment (on ne sait pas comment vas se comporter l'intrusion), s'accentuer et aller vers du plus magmatique.

Sources: SERNAGEOMIN; Nicolàs Luengo Velasquez


Poàs, Costa-Rica, 2708 m

L'activité reste élevée dans le cratère depuis les explosions des 14 au 16 avril. Ces dernières ont d'ailleurs été suffisamment importantes pour faire disparaitre une partie de la structure appelée "le dôme", qui était apparue lors de l'éruption de 1953. Le rythme des explosions a changé: elles sont plus faibles mais plus fréquentes, environ 2-3 par heure, et projettent des gerbes de boue plus ou moins importantes. L'analyse des particules projetées lors des explosions des 12 et 14 avril révèlent qu'environ 5% d'entre elle sont constituées de lave juvénile: l'activité en cours est donc légèrement phréatomagmatique et l'intrusion s'est installée à une profondeur suffisamment faible pour qu'une partie d'entre elles participe directement (et pas seulement son énergie thermique) à cette activité.

Des particules de cendres observées au microscope électronique. Image: Gino Gonzales-Llama/Volcans Sans Frontières
J'ignore si, par le passé, d'autres épisodes phréatomagmatiques ont eu lieu, car ils sont généralement décrits comme phréatiques. Mais plusieurs épisodes d'intrusions magmatiques se sont déjà produits depuis l'éruption de 1953. En particulier en 1981: le lac avait été suffisamment réchauffé pour qu'il s'évapore totalement et les fumerolles situées au fond, devenues visibles, étaient incandescentes. Les analyses du flux de chaleur avaient suggérées que l'intrusion en question était à moins de 100m sous la surface. Le lac était réapparu mais une nouvelle intrusion en 1986 avait conduit à sa disparition en 1989, avec cette fois des projections de soufre liquide. Ce n'est qu'en 1995 qu'il s'était totalement reconstitué.

Il est donc logique de se demander à quoi va aboutir, à court,moyen et long terme, la mise en place de cette intrusion: sera-t-elle assez importante pour que le lac disparaisse (et en combien de temps)? Va-t-elle finir par arriver directement en surface pour alimenter une éruption qui sera d'abord phréatomagmatique en raison de la présence du lac puis éventuellement magmatique (si le lac disparait avant que l'éruption ne cesse)? Je serai aussi curieux de savoir quel type de magma constitue cette intrusion.

"Qui vivra verra" comme dit le dicton.

Au passage: beau time-lapse de l'activité sur le facebook d'RSN.

Sources: RSN; Gino Gonzales-Llama/Volcans Sans Frontières

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