Avant de commencer il est toujours interessant de refaire une petite chronologie des événements pour replacer l'actualité dans un contexte, histoire de ne pas trop se laisser tenter par l'inutile et contre-productive dérive catastrophiste qu'inspire souvent une élévation d'un changement d'alerte.
Pour le Mayon l'épisode actuel débute le 07 mai 2013 lorsqu'une explosion phréatique soudaine, peu intense et non "anticipable" (aucun signe anormal), tue 5 randonneurs qui tentaient la montée au
sommet. Immédiatement une zone interdite d'accès large de 6 km autour du sommet est décrétée*. Les activités de ce type arrivent parfois lorsqu'un système hydrothermale (circulation d'eau, chauffée à l'intérieur de l'édifice pour faire très rapide) est déstabilisé et ne se produisent pas nécessairement à l'approche d'une activité éruptive.
Fin mai 2013, le niveau d'alerte du Mayon est élevé d'un cran et passe à 1: une faible incandescence est observée de temps à autres, toute comme une très très légère inflation (gonflement). La sismicité ne montre alors rien d'anormal mais suite à l'accident du 07 mai, les volcanologues ne souhaitent pas prendre de risques.
Plus rien ensuite ne se passe et l'édifice tombe dans la routine des bulletins quotidiens, tous identiques, signe que la situation est plutôt stable.
Ce n'est que le 12 août de cette année que le volcan refait parler de lui: un petit dôme et repéré au sommet lors d'un survol de contrôle. Il ne manifeste aucun signe d'activité en cours et sa taille est modeste, mais sa présence indique que le volcan n'a pas été totalement en sommeil sur l'année écoulée, malgré l'absence de signes évidents d'activité extrusive. Peu importe: le niveau d'alerte est passé à 2, mais sans activité concrète la zone interdite d'accès reste à 6 km.
Les niveaux d'alerte du volcan Myaon. Image: gmanews |
Et nous voilà donc le 15 septembre 2014, date à laquelle le niveau d'alerte est encore élevé d'un cran et passe donc à 3 (sur une échelle qui va jusqu'à 5). Depuis hier matin en effet une sismicité anormale est enregistrée, accompagnée de lueurs incandescentes au sommet. Les caractéristiques des signaux sismiques (basse fréquence) font qu'ils sont interprétés par les volcanologues comme résultant de mouvements de magma (intrusion). Ces changements ont par ailleurs été synchrones avec des avalanches de blocs incandescents qui ont été observées sur le versant sud-est de l'édifice, le côté éventré du cratère sommital.
Avalanche incandescente sur le flanc sud-est du volcan Mayon au matin du 15 septembre. Image: Denis Mirabueno |
L'élargissement à 7 km du rayon de la zone interdite d'accès a entrainé l'évacuation d'une vingtaine de familles des hauteurs de Guinobatan, sur le versant sud-ouest.
La situation est donc sur une sorte de charnière car on ne sais pas si elle va déboucher si une véritable activité éruptive ou se calmer. Mais il est clair qu'elle est très surveillée, et l'évacuation des familles installées dans la zone à risque étendue en est une preuve importante. Il faut dire que de part sa morphologie** régulière, avec des pentes raides au départ qui s'adoucissent au fur et à mesure que la base s'étend, le volcan a des zones à risques assez vastes. Ce n'est pas si rare en effet que les coulées de lave comme les écoulements pyroclastiques arrivent jusqu'en bas de l'édifice, dans les zones anthropisées: la surveillance et la réactivité sont donc généralement assez pointues.
Mise à jour 13h02
Un nouvel article du journal Inquirer indique que les évacuations se poursuivent , pilotées par l'armée qui a mobilisé 20 camions pour cela. L'objectif final de cette évacuation et de parvenir à mettre en dehors de la zone de danger les quelques 10 000 familles qui y vivent. Pour le moment le bilan fait état de plus de 1600 familles, soit bien plus que ne l'indiquait un autre article du même journal (référence aux 20 familles ci-dessus). Ce n'est donc pas une petite opération qui est en cours, mais d'après le journal, elle se déroule sans problèmes.
Par ailleurs la zone interdite d'accès n'est pas étendue sur tout le pourtour de l'édifice mais uniquement sur le versant sud-est, où se sont produites les avalanches de blocs incandescents. Pour le reste de l'édifice, la zone interdite garde un rayon de 6 km.
Le cercle noir épais est la zone interdite d'accès. Le 1/4 de cercle gris est l'extension à 7 km sur le versant sud-est de l'édifice. Image: Global Volcanism Program. |
* 6 km ça peut paraitre beaucoup pour une zone d'exclusion sur un volcan qui ne manifeste que quelques faibles signes d'activité. Cela s'explique par la morphologie de l'édifice qui guide particulièrement bien les différentes phénomènes (coulées de lave, écoulement pyroclastiques, coulées de boue (lahars)) qui peuvent apparaitre pendant une éruption, et leur donne une portée assez grande. Les volcanologues et les autorités sont donc décidé des diamètres des zones d'exclusion en fonction.
** c'est l'un des très rares volcans a avoir la forme à laquelle on pense quand on en dessine un.
Sources : PHIVOLCS; Inquiers; Global Volcanism Program.
Se que je comprends pas, c'est comment il peut y avoir différents type de dynamisme dans un seul type de contexte géodynamique et aussi sur le changement de caractère de dynamisme des volcans qui peuvent être par fois effusif et d'autre fois très explosif ?!
RépondreSupprimerEst-ce en rapport avec la nature du magma dans la chambre ou la présence des fluides quelque soit leurs origines ou aussi sur le contexte géologique ?!
quand on lis l'histoire d'un volcan on trouve qu'il a une histoire très varie et riches en event qui sont complètement différents, alors qu'on essaie de trouvé le réponse a la grande question de prévenir une éruption a échelle humaine alors qu'on sait pas pour quel raison y a ces changements de caractères ?!
Merci d'Avance ! ^^
C'est pire que ça: il peut y avoir plusieurs dynamismes éruptifs lors d'une seule éruption.
SupprimerJe crois que pour comprendre le fonctionnement des volcans il faut un peu oublier les grandes catégories de volcans, d'éruptions que l'on trouve dans les manuels scolaires. C'est important de la connaitre mais il ne s'agit que d'une (grosse) approximation qui permet aux élèves de se forger une première idée de ce qu'est le volcanisme.
Pour reprendre une expression toute mathématique: e modèle scolaire est une approximation nécessaire mais insuffisante.
Pour faire court, à défaut de vous faire un cours (manque de temps oblige): le magma qui est émis par un édifice volcanique n'est pas toujours identique: ce n'est pas parce qu'un basalte sort un jour d'un volcan,que l'éruption suivante émet le même basalte.
Le dynamisme dépend d'abords de la quantité de gaz et de la viscosité:
- beaucoup de gaz= activité explosive (fontaines de lave, explosions stromboliennes pour les magmas fluides / gros panaches de cendres (vulcanien, plinien) pour les magmas visqueux)
- peu = coulées pour les magmas fluides et modérément visqueux; dôme pour les magmas très visqueux.
Si il y a de l'eau sur le passage (lac, mer, système hydrothermale, nappe phréatique), un magma fluide au visqueux donnera une activité explosive à cause de la vaporisation brutale (et plus complexe que de l'eau qui boue :- ) ) de l'eau.
Ensuite c'est une combinaison de l'ensemble qui détermine les événements qui se déroulent pendant l'éruption. Et tous les cas de figure sont envisageables, donc il faut surveiller chaque éruption, et presque les étudier au cas par cas (dans l'idéal , ce qui est difficile) pour comprendre ce qui se passe.
en tous cas moi étant que je suis en Master 1 en Pétrologie ! je comprends se que vous dite ! mais j'aimerai bien que si vous voulez me donné des titre de livre ou theses qui me permetrai de mieux comprendre le volcanisme ! d'ailleurs j'ai un livre de Pr.bardintzeff = titre = Volcanologie ! et j'aimerai bien savoir si vous êtes Pr dans une université, si ça vous dérange pas ?!
SupprimerMérci pour l'explication !